Claudio Stellato, l’artiste en résidence de l’UCLouvain: « Il n’y a pas que les artistes qui doivent être créatifs »
Le circassien Claudio Stellato est le nouvel artiste en résidence de l’UCLouvain. Avec une trentaine d’étudiants, il va travailler à «spectaculariser» des mouvements du quotidien.
Publié le 23-09-2021 à 06h24
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Une chose est certaine: les étudiants de l’UCLouvain qui ont opté pour la mineure en culture et création et qui suivront le cours de l’artiste en résidence de cette année académique ne vont pas s’ennuyer.
Le circassien Claudio Stellato regorge d'idée en vue de les mener à la création d'une performance artistique d'une vingtaine de minutes qui sera jouée le 19 mars prochain. «Avec ma compagnie, on travaille avec un camion. Je compte donc mettre tous les étudiants dedans. J'ai l'image de gens compressés dans un camion. Je demanderai au plus fragile d'entre eux d'amener le camion à la main jusque-là et c'est possible, assure l'artiste né à Milan (Italie) et basé à Bruxelles. Physiquement ils vont souffrir. Des corps seront traînés, poussés, tirés…»
Un baptême étudiant artistique?
Claudio Stellato serait-il en train de créer le baptême étudiant artistique?
L'artiste entend travailler sur le corps à partir d'actions quotidiennes, de «spectaculariser» des mouvements du quotidien. «Ce qui m'intéresse, c'est comment quelque chose de normal peut devenir artistique. Quelqu'un qui écrit sur son bloc de papier, ça peut devenir spectaculaire», sourit-il, l'œil espiègle, tandis qu'il s'adresse aux journalistes venus à la présentation de la nouvelle résidence d'artiste de l'université.
Depuis 2005, l'UCLouvain accueille des artistes en résidence, dans des domaines variés tels que le cinéma, la poésie, la danse, le théâtre… Et donc cette année, l'art du cirque. «À l'époque, la résidence d'artiste dans une université était quelque chose d'original en Europe. La volonté de l'université est d'inscrire la culture au cœur de ses trois missions que sont l'enseignement, la recherche et le service à la société, explique le professeur Ralph Dekoninck, conseiller du recteur à la culture. La mineure en culture et création, comme les autres mineures, a pour but d'ouvrir les étudiants à d'autres horizons. Ici, il ne s'agit pas de les former à une pratique artistique, mais de leur offrir une échappée dans la création artistique.»
Entre 20 et 30 étudiants, sélectionnés sur base d'un dossier de candidature, suivront le séminaire de 30 h de Claudio Stellato. «C'est beau que des gens qui ne vont pas être artistes mais qui vont faire un tout autre travail dans leur vie puissent se tourner vers la création, souligne le créateur. Il n'y a pas que les artistes qui doivent être créatifs. Chacun peut l'être et il y a différentes façons d'être créatifs: changer de trottoir pour aller conduire ses enfants à l'école, ça l'est déjà.»
Pour Claudio Stellato, c'est aussi l'occasion de montrer aux étudiants ce que c'est qu'être artiste. «Quand on pense à un artiste, on pense souvent à la vie de bohème, etc. Ici, les étudiants vont apprendre à mieux me connaître en tant que personne normale.»
Après une formation en musique jazz à Milan, Claudio Stellato s’est dirigé vers le théâtre de rue avant d’entamer une formation d’acrobate de cirque au Centre des Arts du Cirque de Toulouse, en France. Il a aussi travaillé comme danseur contemporain avec différents artistes et compagnies.
En 2008, il forme la compagnie qui porte son nom et à qui l'on doit L'Autre (2011), La Cosa (2015) et Work (2021). Ce dernier spectacle est donné du 26 au 28 novembre au centre culturel d'Ottignies-Louvain-la-Neuve dans le cadre de sa triennale d'art contemporain, Magma.
«Les circassiens ont pourtant la réputation d’être des gens qui font des saltos»
L'artiste en résidence est choisi par le conseil de la culture après un appel à la communauté universitaire. Quelqu'un au sein de l'UCLouvain a donc pensé à Claudio Stellato. Mais l'homme se dit étonné que l'université a fait appel à lui pour assurer cette résidence 2021-2022. «D'autant que les circassiens ont la réputation d'être des gens qui font des saltos…»
Toutefois, il rapproche son travail à celui d'un doctorant. «Je n'ai monté que trois spectacles qui tous m'ont demandé quatre années de recherche pure. La recherche, c'est la base de ce que je fais pour arriver au produit final. Je ne suis pas dans le temps ministériel qui veut que je sorte une création toutes les années et demie. Il y a donc un lien avec un doctorant qui entame son travail pour quatre ans afin d'apporter sa brique à un mur plus grand.»
Et s'il a accepté cette mission, c'est «parce que j'aime faire des choses que je n'ai pas faites avant. Participer à cette expérience, ce sera une innovation dans ma vie.» Assurément, pour les étudiants aussi.