Une école de tir… pour enfants de 8 à 14 ans à Orp-Jauche: bonne ou mauvaise idée?
L’association soutient que le tir «développe la concentration, le respect des consignes et responsabilise les enfants».
Publié le 11-10-2021 à 05h01
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«Nouveau dans la région pour les jeunes entre 8 et 14 ans: une école pour le tir au pistolet à air.»
C’est le stand de tir localisé à Orp-Jauche qui propose cette activité. Si elle peut être attrayante pour les jeunes, elle peut inquiéter des parents, pas enchantés à l’idée de voir leurs enfants et adolescents un pistolet à la main.
Les responsables du centre insistent sur les valeurs et les codes véhiculés par la pratique. «Un des objectifs importants de notre enseignement est de faire prendre conscience aux jeunes la différence entre le virtuel et le réel. Au même titre que les adultes, ils sont d'abord drillés sur les règles de sécurité enseignées dans toutes les écoles de tir du monde, à tous les militaires, les policiers ou agents armés.»
«Le tir fait appel à toutes les facultés mentales»
Et de défendre leur école: «C'est une discipline qui a des effets thérapeutiques reconnus par les médecins. Le tir fait appel à toutes les facultés mentales, développe la concentration, le respect des consignes et responsabilise les enfants. Elle améliore même les résultats scolaires. Le tir est une discipline sportive ou de loisir attrayante qui se pratique en toute sécurité. Il permet de développer des qualités humaines, l'esprit d'équipe, l'autonomie, le dépassement de soi et le respect des autres et de l'environnement.»
L'école de tir pour jeunes est gérée par une ASBL, indépendante et non subsidiée par la fédération. «Notre programme est par conséquent plus libre et mieux adapté aux attentes des enfants et des jeunes. Ils seront initiés au tir au pistolet à une main, selon les règles olympiques de la discipline, mais aussi à deux mains. Notre but n'est pas d'en faire des champions mais qu'ils s'épanouissent dans un groupe de copains qui partagent la même passion.»

Des cours de tir, est-ce vraiment une bonne idée pour le développement des jeunes? «C'est très constructif, estime Jan De Mol, chercheur au sein de l'Institut de recherche en sciences psychologiques de l'UCLouvain. Avec le Covid-19, la violence a vraiment augmenté dans les familles, pas seulement dans les couples. Et les enfants sont déjà confrontés aux armes via les réseaux sociaux et voient tout ce qui se passe dans la société. Là au moins, ils sont encadrés. Et puis les enfants sont adolescents beaucoup plus tôt qu'avant.»
Un avis que ne partage pas Vincent Yzerbit, professeur au sein du même institut de l'UCLouvain. «Ce n'est clairement pas l'idée du siècle que de les confronter aussi jeunes aux pistolets. Il y a déjà suffisamment de problèmes avec les armes, comme les tueries de masse aux États-Unis. Si les armes n'étaient pas à disposition, ce serait plus difficile de tuer 80 personnes sur un campus.»
Jean-Yves Hayez, professeur émérite de la Faculté de médecine de l'UCLouvain, n'y est pas non plus favorable. «Il y a de nombreux sports et même des jeux vidéo qui améliorent la concentration. Il y a aussi un tas de règles dans de nombreuses disciplines sportives. Et la différence entre la réalité et le virtuel, ça ne me convainc pas. Pour moi, c'est une manière d'amadouer les parents et associations, en avançant ce volet pédagogique.»
«Cette initiative ne répond à aucun besoin»
Le professeur émérite accepterait plus volontiers une séance de paintball que de tir au pistolet à air. «Parce qu'on est davantage dans l'imaginaire. On se sert de peinture, pas de vraies armes. Libérer de l'agressivité dans l'imaginaire, ça peut être important pour l'enfant. Mais là, ils détruisent des cibles en sortant de l'imaginaire. Cela peut être vécu comme une incitation à se servir d'une agressivité avec une arme. L'enfant pourrait penser qu'il a le droit de régler ses comptes grâce à la compétence qu'il a en main, avec un revolver ou un couteau. Cette initiative ne répond, selon moi, à aucun besoin.»