Le terrain pentu de Corbais aura bien vécu
De 1969 à 1981, le CS Corbais, inscrit à l’ABSSA, a dynamisé les samedis après-midi sur le terrain de football à l’extrémité du village.
Publié le 18-05-2021 à 07h00
Entre 1969 et 1981, le village de Corbais, à l'époque à peine plus de 500 habitants, eut aussi son club de football. Une quinzaine de jeunes en eurent l'envie. Le rassembleur fut le curé Florent Billocq. Mais aussi le bourgmestre Émile Fabry. Agriculteur et propriétaire de terres agricoles, il mit gracieusement un terrain à disposition du CS Corbais en face du cimetière du village. «Les contacts de Roger Prevost poussèrent le cercle vers l'ABSSA (Association belge des sports du samedi), se rappelle Léon Huyghe (72 ans), dit Le Mitte, joueur de l'équipe, aujourd'hui administrateur de l'ASBL Corbais, toute une histoire avec d'autres anciens footballeurs. Le ballon rond a créé des amitiés indéfectibles.
Et Paul Jadoul, autre joueur, ex-échevin et maïeur guibertin, de préciser : «Il voulait absolument jouer le samedi à 14 h afin de pouvoir se rendre le dimanche au stade d'Anderlecht dont il était fervent supporter!»
Le terrain corbaisien présentait une solide pente. Entre 1,5 m et 2 m de dénivellation du but du haut à celui du bas. Mais un bon accueil du délégué fédéral permettait d’arranger cela. Il fut finalement nivelé en 1972 toujours grâce à l’agriculteur bourgmestre.
Pas d’infrastructure évidemment, si ce n’est une vieille caravane posée derrière un goal et servant de buvette. Les joueurs se lavaient dans des bassines à l’eau froide. Avec les compétences de membres, un bâtiment en dur intégrant un bar, des vestiaires et des toilettes fut construit
Grâce aux chevilles ouvrières, Franz Felon et René Laurent, l’équipe fêta trois montées pour se hisser en division 3. Le club posséda aussi, un moment, deux équipes et une formation féminine. Avec quatre petits sponsors fidèles: les Ets. Dewêche, le garage Genicot, le café l’Atomium et l’auberge de Walhain. Tandis qu’un bal annuel au dancing Laermans rapportait quelque 30 000 francs belges (750€).
Après la saison 1980-1981 pendant laquelle l’équipe s’est régulièrement retrouvée à sept ou huit, l’aventure se termina faute de combattants. Les jeunes avaient vieilli.
Un bon bol d’air
L'entraînement s'effectuait le jeudi. «Entraînements? Nous prenions plutôt l'air pendant une petite heure», poursuit Léon Huyghe. Et Paul Jadoul de se remémorer aussi ces Golden Seventies du village : «Quand le temps était trop mauvais, nous mouillions maillots, chaussettes et shorts dans les flaques du terrain, les maculions de boue et les rangions rapidement pour retrouver au bistrot.» Il fallait montrer aux épouses qu'ils avaient fait leur entraînement.
Longtemps capitaine de l'équipe qui n'eut jamais d'entraîneur extérieur, Léon Huyghe n'avait aucun souci à composer l'équipe. «Nous n'étions jamais plus de 12 ou 13. Nous n'avions aucune discipline! Mais un sens pointu de la convivialité et de la camaraderie.»
Au milieu des années septante, un éclairage avec des poteaux en bois fut installé par la Régie électrique de Jodoigne. Des poteaux en béton les remplacèrent une vingtaine d’années plus tard. Quant au terrain, il fut racheté fin des années nonante par la Commune et est aujourd’hui occupé par le club canin et des entraînements du cercle de football américain.
Quant à l’équipe féminine, lancée en 1974 par Léon Gérard, oncle de Léon Huyghe, elle participa à deux saisons de championnat. Avec un événement fort, la rencontre amicale contre le Standard Fémina de Liège. Un demi-millier de personnes se massèrent alors autour du «stade» corbaisien.
Le CS Corbais, c’était aussi...
De l’huile de vidange à la place du shampoing
Paul Felon, Paul Jadoul et Léon Huyghe sont encore complices aujourd’hui, se retrouvant régulièrement et appréciant se remémorer les nombreux moments conviviaux de leur épopée footballistique.
Le fil de leur journée lorsqu'ils évoluaient à domicile? Rendez-vous à 13 h 30 au terrain. «Combien de fois avons dû aller réveiller Léon qui dormait encore après sa sortie arrosée de la veille, sourit Paul Felon. Dans ce cas, il avait d'ailleurs l'habitude de monter sur le terrain avec un pistolet à la main, histoire d'avaler quelque chose. Lors d'une rencontre, il marqua même par deux fois en tirant au goal tout en ayant mordu quelques instants auparavant dans son pistolet.»
Après la rencontre, une heure à la buvette du terrain, puis passage à l’Atomium, café du village, puis chez Kèké, l’autre bistrot. Retour au premier, avec souvent un spaghetti, et direction le dancing Laermans.
Le CS Corbais était aussi une équipe dont les membres aimaient se chambrer. Chaque semaine, un joueur achetait une grande bouteille de shampoing pour tout le groupe. Certains avaient parfois la fâcheuse tendance d’oublier leur tour. C’est ainsi qu’un jour, Paul Felon remplaça subrepticement le shampoing par de l’huile de vidange et tendit, dans la douche enfumée, le flacon à Claude Jossart. Ce dernier s’aspergea avec élan, jusqu’au moment où il se rendit compte que le liquide ne moussait pas. Il dut donc longuement prolonger la douche pour se défaire de l’huile. Sans que cela ne soit suffisant, puisqu’il utilisa tous les maillots de l’équipe pour s’essuyer, au grand dam de la préposée au lavage! Bien connu dans le foot régional, gageons que le Chastrois s’en rappelle encore
L’eau chaude via la morgue
Lorsque le bâtiment en dur fut construit par les membres du club, un chauffe-eau fut installé afin de permettre de prendre une douche chaude. Cependant, pour cela, il fallait prendre une clé et aller ouvrir le robinet de la bonbonne de gaz se trouvant dans la morgue accolée au cimetière. Quelle ne fut pas, un jour, la désagréable surprise d’un des membres de l’équipe qui, ouvrant la porte, aperçut, devant lui, le cadavre d’un cycliste qui venait malheureusement de perdre la vie.