Louis Jouvet s’est réincarné à la Valette
«Elvire Jouvet 40», un titre rebutant pour une pièce OVNI, interprétée avec une rare intensité. Au Théâtre de la Valette jusqu’au dernier jour de ce mois.
Publié le 15-10-2021 à 06h36
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Il n’est pas si fréquent d’entendre les mouches voler dans une salle de théâtre. C’est pourtant un de ces moments-là, suspendus, qui a été offert au public de la Valette ce mercredi soir et le sera encore jusqu’au 31 octobre.
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1940. Louis Jouvet enseigne au Conservatoire de Paris. Les notes que nous ont laissées les élèves de Maître Jouvet ont été compilées par Brigitte Jacques-Wajeman, qui les a consignées dans cette courte pièce d’1 heure 15, percutante et inspirante.
Il faut entrer dans cette classe du Conservatoire où Jouvet donne cours à Claudia, une élève en laquelle il croit particulièrement, pour comprendre ce qui se joue chez une élève bousculée par le haut degré d'exigence de son maître. La jeune Claudia tente désespérément d'incarner cette Elvire du Don Juan de Molière, tandis que maître Jouvet, amoureux de la perfection et passionné par la transmission de son art, la bouscule pour lui faire sortir «ses tripes» et la voir se donner, sans réserve.
Un duo impeccable
L’exercice aurait pu être ennuyeux pour qui n’est pas aspirant comédien ou professeur. Il se révèle pourtant passionnant, haletant même. Parce que les mots de Louis Jouvet sont incroyablement bien choisis, parce que la mise en scène de Michel Wright ne concède pas une seconde à l’ennui, parce que les deux acteurs se font face dans une joute, d’une rare intensité émotionnelle. Aidés en cela par le sentiment d’intimité émanant de la petite salle de la Valette. Petit bémol: le contexte est évoqué de manière légère au regard du titre mentionnant la guerre 40-45.
Mais l’essentiel est dans le jeu.
Outre une troublante ressemblance physique avec son modèle, Nicolas Pirson incarne totalement le personnage de Louis Jouvet. Aidé sans doute en cela par son expérience de professeur d’art dramatique au conservatoire de Bruxelles, il est magistral. Face à lui, l’interprétation de la jeune Laura Fautré force l’admiration. La comédienne émeut par sa vulnérabilité, et se transforme gracieusement en danseuse le temps d’une chorégraphie signée Marie Martinez. Quelques pas exécutés sur un fil fragile, à l’image de cette pièce: une partition difficile, jouée avec justesse et nuance.
À voir jusqu’au 31 octobre, www.theatrelavalette.be