«Il y a comme un sentiment de culpabilité»
Vingt ans après la catastrophe ferroviaire, les villageois ont toujours du mal à parler de ce drame qui a marqué Pécrot à jamais.
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Publié le 27-03-2021 à 06h47
Habitante de Pécrot depuis toujours, c’est le sanglot dans la voix que cette dame, la cinquantaine, se remémore cette journée qu’elle n’oubliera jamais.
«Je m'en souviens comme si c'était hier. J'arrivais avec mon enfant à la petite école du village, à 400 mètres des lieux de l'accident. En entrant dans la cour à l'avant, le train est passé. Je l'ai vu… Puis un bruit sourd, quelque chose que l'on ne peut oublier. J'étais avec une autre maman, nous nous sommes retournées. Je me suis dit, quelqu'un a dû accrocher le pont étroit. Puis j'ai vu que les câbles des voies bougeaient dans tous les sens. Nous nous sommes dirigées vers le pont. En regardant sur ma gauche, j'ai vu cette chose effrayante. Le train accidenté dirigé vers le ciel… Quelle hauteur… À ce moment-là, quel silence…» Avec ses connaissances de secourisme, cette dame s'est précipitée. «Là, il y avait déjà José que tout le monde appelle Grenouille. Il habite juste à côté. On a commencé à entendre des cris, de plus en plus forts, il n'y a pas de mots pour exprimer cela… Je me souviens qu'on a voulu rentrer dans les wagons mais tout était coincé.»
Impossible d'ouvrir les portes. José est allé chercher une masse… «Mais malgré la force qu'il y mettait, impossible de briser les vitres. Finalement, en insistant, une petite vitre de la porte s'est brisée. Comme il est assez fin, il a pu passer à l'intérieur. Il a ouvert tout ce qu'il a pu, et nous avons pu, à plusieurs, venir en aide aux personnes qui se trouvaient là.»
Les secours sont ensuite arrivés, prenant le relais. «Les personnes qui restaient dedans, nous ne pouvions hélas pas les aider, il fallait être équipé.» Mais la journée n'était pas terminée pour autant. «Tout le monde connaît tout le monde. C'était l'attente. On voulait savoir qui était dans le train, mais on craignait de savoir aussi…»
Au bout de cette journée éprouvante, nombreux sont les habitants qui sont venus en aide, à s'être retrouvés pour parler et «évacuer» tout cela. «C'était important de le faire. Depuis lors, cela reste compliqué. Il y a comme un sentiment de culpabilité.»