Il a jeté l’éponge après 25 ans d’hôpital
Après 25 années de service, Benoît Musch a jeté l’éponge. " Devant moi, ce n’était pas des caisses en carton, mais des êtres humains. "
Publié le 27-01-2023 à 15h45 - Mis à jour le 27-01-2023 à 18h55
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"L es infirmiers et aides-soignants n’ont pas le monopole de la lourdeur médicale en milieu hospitalier même si, c’est vrai, ils portent beaucoup de choses à bout de bras. Mais les autres professions souffrent tout autant ! Dans l’imagerie médicale, c’est une catastrophe." Après 25 années d’un travail qui le passionnait, Benoît Musch a jeté l’éponge. Pourquoi ? "C’est un problème général qui ne touche pas que les jeunes. Quand je me suis lancé dans cette profession, ce n’était pas pour voir souffrir les gens mais pour leur venir en aide. Mais là, c’est devenu impossible. S’occuper des gens n’est plus réalisable vu les tâches actuelles. Le volet administratif et la gestion des programmes prennent un temps fou, on ne sait plus prendre le temps de parler avec les gens alors que les patients viennent chez nous avec du stress, des craintes, de la peur. Même des échanges de 3 ou 4 minutes sont devenus impossibles. Moi, si c’est pour faire du boulot à la chaîne, je vais chez VW à Forest…"
Cette situation ne date pas d’hier. "Non, on en parlait déjà beaucoup avec le Covid, mais forcément, cela n’a rien arrangé. Et puis, il y a l’effet boule de neige. Suite aux nombreux départs, ceux qui restent trinquent encore beaucoup plus."
« En haut lieu, on ne percute pas »
Pour Benoît Musch, le Covid a été un dernier moment de vraies valeurs. "C’était une période avec une très grande charge de travail, mais on a retrouvé nos véritables valeurs de travail car il n’y avait plus de soins pour de petits bobos, mais bien de vrais soins à prendre en charge. Je parle en tout cas de la première partie du Covid où j’ai vécu médicalement parlant une période très riche. Mais après, tout est parti en cacahuètes. Je ne retrouve plus toutes les valeurs pour lesquelles je me suis engagé. Hélas, en haut lieu, on ne percute pas. Qu’est ce qui a été fait ? Rien ou presque. Je n’entends pas l’ombre d’une initiative concrète".
Qu’on ne s’y trompe pas, le débat n’est pas que salarial. "Ce n’est en tout cas pas pour nous qu’une question d’argent. Bien sûr, pour certains qui sont dans la dèche, ça dépannerait mais c’est loin de n’être que cela."
Benoît Musch regrette aussi que son travail ne soit pas reconnu comme métier pénible. "Ici, si on se loupe, on donne par exemple un mauvais médicament à une personne avec des conséquences, on ne pourra pas prétexter qu’on était à bout ou fatigué."
« J’ai vu un coach pour me réorienter… »
La situation est devenue compliquée au point que dans certains hôpitaux, des ailes entières sont fermées faute de personnel. "Moi, j’ai quitté l’an dernier, j’ai pris un congé médical, j’ai vu un coach pour me réorienter et quatre mois plus tard, je démissionnais. À présent, je suis conseiller en prévention à l’UCL Bruxelles. Je m’occupe de sécurité, d’hygiène et de… bien-être au travail ! J’ai toujours une importante charge de travail, mais ici, je peux le faire sereinement, sans cette pression permanente. Je regrette, j’avoue, d’avoir quitté mes collègues, mais ce n’était plus possible dans ce contexte."
Et de conclure: "Devant moi, ce n’étaient pas des caisses en carton, mais des êtres humains. Le milieu médical doit garder cela en tête tout le temps. C’est tout un système qu’il faut revoir !"