Le charme discret du paternalisme
Il fut un temps où des patrons se préoccupaient de la formation et du bien-être du personnel. Qui pense élever une stèle à ceux d'aujourd'hui?
- Publié le 31-05-2008 à 10h00
C'est grâce à une souscription faite au sein du personnel que fut érigée en 1949 une stèle à la mémoire de Paul Henricot, fils du fondateur des Usines Émile Henricot (UEH). Les ravages du temps n'épargnèrent ni la pierre bleue ni le médaillon en bronze dû à Alfred Courtens, celui qui a notamment réalisé les statues équestres de Léopold II à Ostende et d'AlbertIer au Mont-des-Arts à Bruxelles.
Sa restauration a donné lieu à une cérémonie à laquelle assistait l'arrière-petit-fils du fondateur, Paul Henricot.
Beaucoup de bâtiments témoignent encore de l'attachement de la dynastie Henricot à leur terroir et au bien-être de leur personnel. Tel le Foyer Populaire, superbe salle polyvalente édifiée en 1913, qui continue aujourd'hui à se délabrer faute de crédits.
L'iconographie présente au Parc à Mitrailles montre également le souci de formation permanente des ouvriers employés par les UEH. On y voit de nombreuses photographies des promotions des Ateliers professionnels, fondés à la fin du 19e siècle au sein de l'usine, qui deviennent en 1954 l'Institut technique de l'État, aujourd'hui ITP.
Les professeurs étaient des ingénieurs et contremaîtres aux UEH. Ils assuraient la formation des jeunes et faisaient acheter les mêmes machines que l'on trouvait dans l'usine. À l'issue de la formation, les jeunes trouvaient automatiquement du boulot.
Cette vision d'un certain capitalisme fut appelée dédaigneusement paternalisme et chargée de tous les maux. On fait beaucoup mieux aujourd'hui: emplois précaires, délocalisations, seuil de pauvreté pour 20% des travailleurs. C'est le progrès.
Des photos, on en trouve également dans un wagon du type «six chevaux, cent hommes» qui stationne devant le Parc à Mitrailles. L'une d'entre elles, datant des années50, montre un groupe d'ingénieurs et de cadres Indiens du groupe Tata, venus s'enquérir des techniques industrielles en usage chez Henricot. Les conseils durent être bons. Les groupes Tata et Mittal contrôlent de nos jours la moitié de la sidérurgie mondiale et gagnent beaucoup d'argent. Personne n'est parfait.