Le Brabant wallon devait-il se déclarer "en état d’urgence climatique" ? Un débat plus chaud que le climat
La Province en fait-elle assez pour lutter contre les dérèglements climatiques avec son plan Colibri ? Écolo ne le pense pas et propose son propre plan, rejeté par une majorité qui s’irrite des critiques qu’elle estime injustes.
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Publié le 21-02-2023 à 18h13 - Mis à jour le 21-02-2023 à 18h14
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Une fois n’est pas coutume, les débats du conseil provincial ont été animés, lors de la dernière séance, lorsque les conseillers se sont penchés sur la proposition de résolution déposée par le groupe Écolo et visant à reconnaître l’urgence climatique et à dégager 26 moyens, pour la Province, de lutter contre les dérèglements climatiques. Car les 32 fiches du plan Colibri présenté le 14 février ne sont pas suffisantes pour Écolo.
Passons directement à la conclusion du président du collège provincial, Tanguy Stuckens (MR), visiblement agacé après 70 minutes d’échanges: "C’est une forme d’escroquerie que de laisser penser que, par le vote d’un texte, demain tout ira mieux en Brabant wallon. On bosse, vous savez. À un moment, à donner des leçons, à apparaître comme des moralisateurs, vous poussez une telle caricature de l’institution provinciale et du travail que nous faisons que vous desservez la cause que vous prétendez défendre".
"Les leçons perpétuelles, ça devient gênant"
Un peu plus tôt, le député provincial Marc Bastin (MR) s’était plaint: "Les leçons perpétuelles, ça devient gênant. Oui, c’est froissant de se voir reprocher de ne pas travailler sur le multimodal, sur les inondations… Vous n’avez rien suivi (de nos actions, ces dernières années). Je n’ai plus envie de vous en faire l’inventaire tellement ça me fatigue. On préfère agir qu’écrire."
Le conseiller Cédric Verté (PS) a, lui aussi, défendu l’action du collège provincial qui "n’a pas attendu 2023 pour identifier l’urgence climatique".
Qu’avaient donc fait les écologistes pour provoquer l’ire de la majorité MR-PS ? Proposer au conseil provincial "de déclarer le Brabant Wallon en état d’urgence climatique et écologique et de reconnaître, tant l’accentuation des effets du changement climatique, l’effondrement des écosystèmes naturels, que leurs graves conséquences humanitaires, sociales et sanitaires". Cette déclaration était accompagnée de 26 actions à mettre en place dans le cadre d’un "plan climat" ( à lire sur le site de la Province).
"12% de réduction des émissions de gaz à effet de serre, c’est peu ambitieux"
Écolo demandait ce vote alors que la majorité venait de présenter son plan Colibri. "L’ambition du plan Colibri, c’est une baisse de 12% des émissions de gaz à effet de serre alors que l’ensemble des instances internationales prône une réduction de 55%, note le conseiller provincial Thierry Meunier (Écolo ). On trouve l’objectif (de la Province) peu ambitieux."
Les Verts proposent donc 26 actions pour un plan plus ambitieux: "La Province pourrait se donner pour ambition d’agir sur tout le territoire brabançon wallon en collaboration avec les Communes. Nos propositions d’action sont tout à fait concrètes. Nous avons proposé d’ouvrir la discussion pour amender cette proposition, pour la rendre peut-être moins maximaliste mais plus réaliste. Nous avons reçu une fin de non-recevoir. Nous sommes particulièrement déçus."
"Chaque fois que j’entends dire qu’on n’a pas besoin des écolos pour faire de l’écologie, c’est pour se justifier de ne pas avancer", soupirait Thierry Meunier.
"Les deux propositions ne nous semblent pas incompatibles"
Voisins des écolos sur les bancs de l’opposition, les Engagés et DéFI ont voté la proposition de résolution défendue par les Verts sans que cela suffise pour la valider.
Benjamin Goes (LE) émettait toutefois des réserves sur le timing: "Un document qui arrive très opportunément au moment de la présentation du fameux plan Colibri que nous attendions tous avec beaucoup d’impatience. Mais, parce qu’il est aujourd’hui urgent d’avancer et de saisir toutes les opportunités pour nous engager en faveur de l’environnement, nous soutiendrons à la fois le plan Colibri car il nous semble indispensable de soutenir cet engagement de la Province ; et la proposition de résolution déposée par le groupe Écolo, qui ne nous semble pas incompatible car il nous faut atteindre coûte que coûte tous nos objectifs en matière environnementale".
Luc D’Hondt (DéFI) regrettait, lui, qu’il ne soit pas possible que tous les partis puissent dialoguer sur ce type d’enjeux. Et c’est ce qu’il disait déjà à l’entame de ce débat.
À peine envolé, le colibri est déjà pris pour cible
Le plan Colibri de la Province du Brabant wallon va permettre à l’institution de réduire son empreinte carbone de 12%, promet le député provincial Marc Bastin qui assure le réalisme de l’objectif: "On aurait pu tronquer les chiffres et affirmer qu’on atteindra les 30%. Mais ça ne sera pas le cas. Par contre, on atteindra bien les 12%".
Faire mieux aurait été compliqué, estime le Wavrien: "Notre maîtrise sur le bilan carbone n’est pas entière puisque, d’après les règles de calcul que nous respectons, 70% de notre bilan carbone est généré par les salaires et les transferts. Donc on agit sur 30%. Notre volonté est bien de conscientiser les agents, de changer les mentalités."
Benjamin Goes (LE) a regretté que le plan Colibri arrive si tard: "Il aura fallu quatre longues années à la majorité MR-PS pour développer, peaufiner et finalement présenter son grand plan, annoncé en grande pompe lors de sa déclaration de politique provinciale, le 31 janvier 2019. Et dire qu’en 2016, nous vous avertissions déjà sur la volatilité des prix sur le marché de l’énergie, sur l’importance de diversifier nos sources d’approvisionnement et de développer des sources alternatives d’énergie dans nos communes."
Écolo se montrait encore plus critique à propos d’un plan que les Verts jugent trop peu ambitieux: "Vous auriez pu aller plus loin mais vous n’avez pas accepté le dialogue, a lancé Fabienne Petiberghein. On finit par se dire que notre proposition (de résolution) vous a permis de retrouver votre plan Colibri dans vos cartons. Malheureusement, ce colibri, vous l’avez déplumé tant et si fort qu’il ne peut décemment pas prendre son envol".