Bruxelles : SmartMove, qui a déjà coûté 25 millions, est mis au frigo
En 2023, 12 millions seront investis dans le cadre de la réforme de la fiscalité automobile.
Publié le 20-02-2023 à 21h20
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Adopté fin 2020, SmartMove avait été annoncé pour 2022. Nous sommes en 2023 et le dossier reste, politiquement, au point mort. L’idée d’implémenter cette taxation kilométrique intelligente sous cette mandature a bel et bien été enterrée. Le PS est catégorique sur la question : "Pour nous, ce projet n’a plus de raison d’être et on est passé à autre chose", résume Ridouane Chahid, chef de groupe PS au Parlement bruxellois.
Face à ce veto socialiste, le ministre Gatz et les Verts ont peu de force de frappe et se sont résignés à mettre leurs ambitions de réforme de la fiscalité automobile au frigo… du moins pour cette mandature. Du côté du ministre régional des Finances, on nous assure que "le projet n’est nullement au congélateur, même si le système que nos équipes sont en train de développer et de tester ne sera pas opérationnel sous cette législature".
Avancer, ou perdre le subside européen
Car si le projet est politiquement à l’arrêt, il ne cesse, financièrement et techniquement, d’avancer. On apprend, en réponse à une récente question du député Luc Vancauwenberge (PTB, opposition) à Sven Gatz, que, "à ce jour, 25 millions d’euros ont été dépensés pour les études, le développement de l’application, l’achat de licences, les kiosques, la communication, le module CRM, etc.". À cela s’ajoutent près de 8,8 millions pour "l’extension du réseau de caméras ANPR", ces mêmes caméras qui servent également à contrôler la zone de basses émissions (LEZ).
Pour 2023, 12,5 millions ont été budgétés pour SmartMove. Mais pourquoi investir massivement dans un projet dont la réalisation est devenue clairement hypothétique ? Pour ne pas laisser filer les deniers européens, rappelle le cabinet Gatz. Le projet global a été en effet évalué à 68 millions d’euros, mais peut compter sur un apport européen de 51 millions.
Écolo veut avancer seul, le PS freine
"La condition permettant à la Région de bénéficier d’un fonds européen à hauteur de 51 millions nécessitait le lancement du projet “app” pour la fin du 2e trimestre 2022." Une application effectivement lancée et déjà expérimentée par 1 140 testeurs.
Les équipes de Sven Gatz sont dès lors occupées à créer une solution clé sur porte pour le prochain gouvernement. "Après les périodes de confinement, les navetteurs perdent de nouveau trop de temps dans les embouteillages, aussi ceux qui prennent les transports en commun. Donc, la question n’est pas de savoir si une taxe intelligente par kilomètre parcouru remplacera un jour les taxes de circulation existantes mais bien quand."
Une barrière souvent évoquée par les opposants au projet : la nécessité d’un accord global entre toutes les Régions, sous peine de devoir surtaxer les navetteurs du nord et du sud du pays. La Flandre a ouvert une porte à une réforme de la fiscalité auto, mais la Wallonie freine toujours des quatre fers. Autant dire que les chances d’un deal national sont, à l’heure actuelle, infimes.
Mais, à Bruxelles, les Verts se disent prêts à faire cavalier seul si les autres Régions refusent d’embrayer. "On ne va pas pouvoir attendre indéfiniment", indiquait samedi la députée Marie Lecocq (Écolo) dans les colonnes de La Capitale.
Chez DéFI, le sujet est souvent esquivé
Une position qui est loin de faire l’unanimité dans la ville-région. Chez Défi, le sujet est souvent esquivé. Au PS, qui avait pour rappel avalisé le projet avant de se rétracter, pas question d’implémenter la taxe sans "correctifs sociaux". "Vertement opposé à une taxation supplémentaire", le MR, principal parti d’opposition, ne se dit prêt à réformer que dans un cadre national s’il revenait au pouvoir. "L’argent dépensé dans SmartMove pour des caméras ANPR et une application n’était pas une priorité pour Bruxelles et l’application développée fait doublon avec le MaaS de la STIB", critique David Leisterh (MR).
Une chose est sûre : la question constituera un point central des futures négociations bruxelloises en 2024. Où il faudra trancher si l’actuelle mise au congélateur de SmartMove prend la voie de la décongélation ou d’un renvoi définitif à la poubelle…