Tubize : Yassine étudiait à l’IPES, il étudie aujourd’hui à Berkeley
Le Tubizien Yassine El Maimouni, 20 ans, a reçu le prix de la Vocation de la Fondation Marcel Bleustein-Blanchet. Une aide précieuse.
Publié le 26-01-2023 à 19h09 - Mis à jour le 26-01-2023 à 19h10
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Son parcours est pour ainsi dire unique. Après avoir suivi une scolarité complète à l’IPES Tubize, Yassine El Maimouni a intégré la prestigieuse école de Sciences Po Paris, puis l’université de Berkeley, aux États-Unis, grâce à une bourse. En plus de ses compétences et de sa faculté à travailler, le jeune homme de 20 ans se veut très ambitieux. Sans jamais oublier d’où il vient. Entretien depuis San Francisco, Californie.
Yassine El Maimouni, vous avez reçu le prix de la Vocation de la Fondation Marcel Bleustein-Blanchet. De quoi s’agit-il exactement ?
C’est un prix qui récompense vingt étudiants français, entre 18 et 30 ans. Divers mécènes sélectionnent chacun un candidat, qui reçoit une aide de 10 000 € pour son parcours académique et ce qu’il projette de faire à l’avenir.
Et pourquoi l’avez-vous reçue, vous ?
J’étudiais à Sciences Po Paris, donc c’est ce qui m’a permis d’être repris. Puis, je ne viens pas d’un milieu des plus favorisés, cela a joué en ma faveur, je crois.
Vous êtes originaire de Tubize.
Je suis né à Tourcoing, d’un père Belge et d’une mère qui venait du Nord de la France. J’ai toujours vécu en Belgique, jusqu’à mes 18 ans. J’ai fait toute ma scolarité à Tubize, entre l’école Francisco Ferrer (primaire) et l’IPES (secondaire).
Ensuite, Sciences Po Paris…
J’ai tenté le concours d’abord. Pendant ma 5e et ma 6e secondaire, je me suis préparé et je l’ai réussi.
La différence doit être grande.
En fait, il n’y a pas de plus gros contraste, sans exagération. Rien que le concours, c’est déjà le jour et la nuit. En Belgique, on ne nous prépare pas à ce genre de concours. Il n’y a pas cet esprit de compétition, de classement. Ce n’est pas très belge.
Qu’est-ce qui vous a le plus marqué en arrivant à Berkeley ?
Cette ambition. C’est d’ailleurs pour ça que j’ai quitté la Belgique. Je n’ai pas l’impression qu’il y ait un cadre éducatif qui stimule les étudiants. La compétition n’est pas saine en toutes circonstances. Mais en France, en Grande-Bretagne ou aux États-Unis, il y a davantage cette stimulation, avec les prix et distinctions. Les étudiants visent les sommets.
Quels ont été les plus gros obstacles ?
Il y a eu le souci de la langue. 50 % des étudiants sont étrangers et je ne maîtrisais pas au mieux l’anglais. Ce n’était pas la spécialité de l’IPES. Il y avait aussi beaucoup de stress, tant pour le concours que pour les cours. Je me suis retrouvé face à des gens qui venaient du lycée Louis Le Grand ou des lycées français de Shanghai et New York, les plus prestigieux au monde.
Vous avez donc reçu cette bourse, avec le prix de la Vocation 2022. Qu’est-ce que ça change pour vous ?
Sciences Po donne la possibilité à certains étudiants d’intégrer le programme d’universités partenaires. Ce n’est pas un Erasmus, car c’est diplômant. J’ai postulé pour Berkeley et j’y réalise ma 3e année de bachelier en ce moment. Cette bourse me permet de financer cette année d’études, car c’est la ville la plus chère des États-Unis. Que ce soit pour l’immobilier ou tous les produits de consommation. Mais c’était l’opportunité d’une vie.
Expliquez-nous votre objectif de carrière.
Ce serait de passer les concours de la fonction publique. Son nom a changé, ce n’est plus l’ENA mais l’Institut national du service public (INSP, en France). Après mon bachelier, je vais suivre un double master, entre Sciences Po et HEC Paris (Haute école de commerce), en trois ans. Ensuite, le but est d’être haut fonctionnaire et de m’engager en politique, si ça m’intéresse toujours.
Socialement, ce n’est pas trop dur de fréquenter ce beau monde, quand on vient de Tubize ?
Je vous avoue que la première année à Sciences Po a été très difficile. D’abord, parce que l’environnement est très international et que mon anglais n’était pas assez bon. Puis, il y a cet esprit élitiste. C’est difficile de s’intégrer sans faire de gros efforts. J’ai rencontré des fils de ministres, français ou étrangers. Ils s’attendent à rencontrer des gens qui ont un capital social et financier similaire au leur. Cela implique aussi des dispositions oratoires, que je n’avais pas forcément en sortant de l’IPES.
C’est également le cas à Berkeley ?
C’est élitiste, mais beaucoup dans l’esprit américain d’être inclusif. À Sciences Po, je fais partie d’un programme très sélectif de 120 étudiants, avec un gros bagage historique et une réputation. Tous les présidents français sont passés par Sciences Po. Il faut aussi dire que tout le monde se connaît et peut se juger. Alors qu’à Berkeley, c’est une université de 40 000 personnes, on est nettement plus anonyme.