Endroits méconnus de l'UCL: les Archives ou les couloirs de la mémoire
Les Archives de l’UCL conservent tout ce que produit l’université et qui présente un intérêt. Ce qui en fait des mètres linéaires de documents.
Publié le 22-07-2016 à 06h00
«Un homme sans mémoire est un homme sans vie. Un peuple sans mémoire est un peuple sans avenir.» Cette citation du maréchal français Foch vaut aussi pour des institutions comme l'UCL, à Louvain-la-Neuve. L'université dispose d'un service qui est le gardien de sa mémoire: les Archives de l'UCL.
1. Ses missions principales Les Archives de l'UCL conservent tout ce qui est produit par l'université et ses membres et qui a un intérêt patrimonial, scientifique ou historique. Elles aident aussi les services, facultés et autres à gérer leurs archives vivantes.
2. Les documents «Les archives sont des documents produits ou réunis par une personne ou une institution. Ces documents ont une utilité première, souvent légale, gestionnaire ou administrative, qui s'estompe avec le temps», explique Aurore François, la directrice des Archives.
Et Cathy Schoukens, qui s'occupe des archives administratives, d'intervenir: «Je suis en 1re ligne pour aider les secrétariats à gérer les archives vivantes, dire ce qu'ils peuvent jeter ou doivent conserver, quand et comment. Nous avons un calendrier de conservation de tous les types de document (PV d'une réunion, contrat de travail, délibération…) qu'on peut rencontrer.»
Les Archives tentent d'harmoniser les pratiques tout en tenant compte des besoins de chaque service. «C'est aussi par intérêt: une fois qu'on recevra les documents, ils seront déjà bien classés», fait valoir la directrice.
Car la valeur primaire du document, ce pour quoi il a été créé, s'estompe. «On évalue alors sa valeur patrimoniale, historique ou scientifique pour voir s'il vaut la peine d'être gardé. Ce qui fait parfois débat. S'il n'est pas détruit, une nouvelle aventure commence.»
3. La conservation Cette aventure durera jusqu'à la nuit des temps. C'est l'objectif. Les documents sont mis dans des chemises spéciales, puis dans des boîtes anti-acides offrant une certaine résistance à l'eau et au feu. Il faut s'assurer qu'ils se sentent bien. «Le milieu doit être le plus stable possible, notamment question température et humidité. Le plus dangereux, ce sont les brusques variations», commente Véronique Fillieux.
Les documents, surtout ceux d'origine organique comme les parchemins faits en peau, réagissent. D'autres s'autodétruisent, comme ce parchemin avec un passage du Coran et qui a plus de 1 000 ans. Il est rongé par sa propre encre. «On tente de stabiliser les documents et de ralentir les processus. Ce n'est pas toujours évident car plusieurs experts peuvent proposer des traitements différents. On agit en étant le moins invasif possible. C'est le challenge: ce document du Xe siècle est arrivé jusqu'à nous et il faut se montrer à la hauteur de nos prédécesseurs pour le transmettre aux générations futures», continue Véronique Fillieux.
Pour les documents les plus fragiles, des campagnes de numérisation sont menées. C’est une question de sauvegarde mais aussi d’accès au public.
4. La connaissance Car les archives ne doivent pas rester entreposées pour l'éternité. Il faut les valoriser via des colloques, des expositions et les rendre accessibles à la recherche. Quand nous y avons été, deux chercheurs français étaient présents dans la salle de lecture. Raphaël Coipel s'intéressait au chapitre de Sainte-Aldegonde dont une partie des archives se trouve à l'UCL tandis que Julie Huet voulait voir si le campus de Caen – premier campus construit après la Seconde Guerre mondiale en France – avait eu une influence architecturale sur la construction de Louvain-la-Neuve.
5.La formation Enfin, les Archives de l'UCL servent à la formation des archivistes et historiens. «Elles permettent aux étudiants d'être confrontés à la réalité», indique Aurore François.
Faire face au défi du numérique
«Le numérique, c'est le défi du moment. L'université reste une grande productrice de papiers, mais on assiste à la dématérialisation de certains documents», relève Aurore François, la directrice des Archives de l'UCL.
Les documents numériques amènent leurs contraintes. Les disquettes, molles ou non, ne sont plus utilisées, les CD-Rom se font désormais discrets et se dégradent après quelques années seulement…
Les supports évoluent donc. La solution? La conservation sur des serveurs. «Il faut qu'ils soient bien entretenus. Idéalement, les disques durs doivent être changés tous les cinq ans», précise Nicolas Delpierre.
Les formats changent aussi. «On préfère les formats dits ouverts, ceux dont on connaît les spécifications, car leur lisibilité offre de meilleures garanties dans le temps. Pour les images, on préfère le TIFF au JPEG, pour éviter les problèmes liés à la compression.»
La donne est nouvelle «mais finalement, ce n'est pas la première révolution technique à laquelle doivent faire face les archivistes», sourit Aurore François.

Les étudiants faisaient relier leurs notes
Les Archives de l’UCL concernent nombre de documents ou d’objets en lien avec l’université et qui ont une valeur patrimoniale, historique ou scientifique.
Voici quelques exemples.
Les Archives disposent d'une belle collection de cours où l'on peut trouver un cours de logique du XVIIe siècle rédigé en latin ou encore un cours de construction des machines du XIXe siècle qui est constitué des notes de cours d'un étudiant de l'époque. «C'était une pratique courante. Une fois le cours terminé, ils faisaient relier leurs notes», raconte Nicolas Delpierre.
Et Aurore François, directrice des Archives, de poursuivre: «Un an avant l'éméritat d'un professeur, on va le trouver pour obtenir ses cours, ses notes, son travail.»
Cette collection de cours est importante pour les biographes, par exemple, qui peuvent se plonger dans les cours qu'une personne a suivis. «Car ils ont contribué à façonner sa pensée», précise la directrice. «Cela permet aussi de voir comment on enseignait à une époque et ce qui était enseigné», souligne Nicolas Delpierre.
Les Archives disposent aussi de belles correspondances de professeurs, par exemple les quelques lettres entre le philosophe Alphonse De Waelhens (1911-1981) et René Magritte au sujet de la lumière ou des plaques sur verre du professeur Arthur Van Gehuchten (1861-1914) qui photographiait ses patients atteints de troubles neurologiques à des fins d'enseignement et de recherche. «C'est intéressant pour retracer le travail scientifique et l'histoire de l'université mais aussi pour étudier les maladies dans la longue durée», avance Françoise Hiraux.
Les Archives protègent en outre de nombreux documents sur le transfert de l’UCL sur le site qui allait devenir Louvain-la-Neuve, ainsi que des maquettes d’architectes ou encore des documents de réflexion autour de ce nouveau projet universitaire.
Les Archives conservent également des fonds privés de personnes ou institutions qui ont eu un lien avec l’UCL, à l’image de celles du cardinal Mercier, qui a officié comme professeur.
La vie estudiantine archivée aussi
Les Archives concernent bien sûr les étudiants et la vie estudiantine, folklorique ou plus sérieuse. Les photos notamment des promotions – on peut y déceler la présence de plus en plus d’étudiantes, désormais majoritaires, mais aussi y percevoir de véritables cultures différentes selon les facultés – leurs feuilles de chou, leurs affiches, leurs tracts… Comme cette affiche de sensibilisation à la santé faite par des étudiants en médecine en 1930 et qui est sponsorisée par… un cigarettier.
Et si vous êtes passé par l’UCL, sachez, sachez que l’université en garde une trace, notamment via les dossiers d’inscription.