Au CHRSM d’Auvelais la tournée minérale sert de terrain de sensibilisation: la première goutte d’alcool est toxique
L’alcool, surconsommé en Belgique et pourtant gravement toxique. Un fléau qui avance masqué. Mardi, à l’hôpital d’Auvelais, des soignants ont alerté sur les risques de ravage que cette substance banalisée fait courir à la santé publique.
Publié le 07-02-2023 à 22h45
:focal(545x371.5:555x361.5)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/B4LVMI2RJZAO5AHY2TSC7PWW44.jpg)
En libre accessibilité partout, et à profusion. Coulant abondamment et tous azimuts, des réceptions mondaines aux sauteries populaires dans les salles des villages où chacun veut mettre sa tournée. Pétillant dans les coupes ou faisant glouglou dans les verres à vin, au restaurant et en famille.
Où que l’on soit, l’alcool est partie prenante dans la vie d’une multitude de Belges. Et les occasions de trinquer pour un tas de bonnes et heureuses raisons sont légion au royaume de la bière et de la convivialité.
Et pourtant. Attention. Danger mortel en cas d’abus. Une petite musique de prévention archiconnue, libellée sous les publicités, mais dans les faits supplantée voire ignorée par les habitudes de consommation et par ce sens légendaire de la fête au pays wallon.
Mardi matin, à Auvelais, au centre hospitalier Sambre et Meuse (CHRSM), site Sambre, un comité d’accueil composé de blouses blanches a jeté un gros froid sur la propension des Belges à remplir les godets à la chaîne et à picoler jusqu’à plus soif. Et, à ce petit jeu viril et encanaillant qui fait bien rire tout le monde, les Namurois ne sont pas les derniers.
Alors que la Tournée minérale (un mois sans alcool pour se remettre des festins hivernaux) est lancée, les visiteurs sont invités à mesurer leur consommation d’alcool. Est-elle dans les clous ou critique ?
Bon, pas de bol. Au seuil de l’hôpital, personne ne boit, ou alors si modérément que l’exercice est jugé inutile. Une minorité s’applique à faire le test, et à se faire peur.
Assis à une table, un médecin psychiatre, le Dr Adrien Renson, remet les pendules à l’heure et douche l’idée reçue selon laquelle boire son petit verre de vin par jour – ce noble breuvage tiré de mère nature – ne ferait pas de tort à la santé. Ou s’il en fait, alors là, c’est moins qu’un Coca. Faux.
Pourquoi boit-on ?
"L’alcool est dangereusement addictif et toxique", contredit le spécialiste, que l’on boive modérément ou excessivement. Une p’tite coupe de champagne pour se réjouir d’une victoire sur l’adversité ou d’un succès enivrant ? "Il ne faut pas le diaboliser mais surtout pas le banaliser. Et il faut savoir qu’une petite toxicité est toujours là, dès la première goutte."
"Oui, toxique, et à tous les niveaux. Terriblement dommageable à l’organisme", renchérit Dyna Delle Vigne, coordinatrice de l’unité psychologique de l’hôpital d’Auvelais et du centre Zéphyr, service sambrevillois d’aide et de soins spécialisés en assuétudes.
En fait, pardon déjà d’être rabat-joie, l’alcool n’est bon pour rien, sinon au gosier qui l’avale. À minima très mauvais pour le triptyque vital que sont le cœur, le foie et le cerveau, où il affecte la mémoire et attise des troubles cognitifs.
Sa responsabilité est par ailleurs scientifiquement avérée dans la survenance de vilains cancers. L’alcool frappe indistinctement le pancréas, le foie, les intestins. Il démultiplie les risques de maladie cardiovasculaires et digestives.
Face à ces constats irréfutables sur sa dangerosité, et dans le contexte d’une société qui l’accepte socialement et qui a même tendance à le célébrer, parce que c’est culturel, les soignants et les psychologues interrogent les gens confessant boire, beaucoup, ou juste un peu.
Il y a en effet des questions à se poser: "Pourquoi boit-on ? Dans quel but et à quelle fréquence ?" Pour ressentir ces effets euphorisants et désinhibant, ou de façon neutre, sans y mettre de l’émotion ?
Des réponses à ces questions découlent ou non un risque d’addiction ou d’alcolo-dépendance. Il faut être vigilant. L’alcool banalisé, qui décline une infinité de goûts et de millésimes, partout disponible en grande quantité, est traître. Raison pour laquelle il pose un réel problème de santé publique et aussi, répété mille fois, de sécurité routière. Sans compter que l’on, a plus ou moins, tous connu dans son entourage une personne ayant tristement sombré dans ce piège, dépéri avant l’heure et succombé trop jeune, d’une longue et pénible maladie.