Mettet : Yves Delforge retrace 40 ans de vie politique
Yves Delforge (un Engagé) a commencé à faire de la politique il y a 40 ans. Il y a goûté, a aimé et n’a pas envie de raccrocher. Portrait.
- Publié le 09-12-2022 à 06h08
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Quarante ans de vie politique, ça se célèbre. De conseiller communal en majorité absolue à conseiller dans la minorité, d’échevin à bourgmestre, Yves Delforge, à bientôt 65 ans, a tout connu du spectre des émotions politiques. 40 ans à arpenter sa douce campagne et à voir évoluer sa commune rurale aux premières loges. Une longévité au chiffre rond qui invite ce coureur de fond à s’arrêter, pour regarder le chemin parcouru, jauger la complexification des choses mais aussi se projeter. Rien ne prédestinait ce Biesmois de formation scientifique à exercer des responsabilités publiques. On est venu le chercher, rappelle-t-il. Il a goûté à l’adrénaline d’une campagne électorale, à la joie de voir aboutir des projets, et a été pris dans l’engrenage. Depuis un an, il a lancé sa commune sur la voie ambitieuse de la transition énergétique. Un chantier érigé en priorité absolue. Sa volonté de prémunir Mettet contre la précarité énergétique lui donne l’envie d’une nouvelle joute électorale, en 2024.
Rencontre dans la salle des mariages. Il nous reçoit là où il est un jour entré pour s’asseoir et prêter serment. Il avait 24 ans.
Vous vous rappelez le contexte de votre première élection ?
Comme si c’était hier. Un candidat de la liste Intérêts Communaux menée par Le Dr Joseph Wauthy (le bourgmestre en titre) s’était désisté. Un dimanche, j’étais à la piscine (de Biesme) et le docteur m’a interpellé: écoute petit (24 ans, donc), tu vas venir sur la liste avec nous. Et j’y suis allé. Sans cet appel, je ne me serais pas présenté. Gradué en chimie et microbiologie, j’avais un emploi. J’étais certes capitaine de l’équipe de foot, engagé dans l’associatif, mais je n’aurais jamais eu l’intention de me présenter.
Et vous avez contracté le virus ?
Je me suis tout de suite senti redevable vis-à-vis des 692 citoyens (son 1er score) qui m’avaient accordé leur confiance. En grande partie des gens de Biesme, mon village.
Qu’est-ce qui a changé, en 40 ans de vie politique ?
Tout a changé, du fait des réformes administratives, et des "affaires", qui obligent à lancer des marchés publics pour tout. Du temps de Joseph Wauthy, si un bus tombait en panne, il allait aussitôt acheter un autre bus, accompagné d’un connaisseur. C’était comme ça pour tout. On travaillait avec les entreprises du cru. Je ne dis pas qu’il ne faut pas faire de marchés publics mais la loi nous oblige à choisir la société la moins disante (la moins chère). Ce qui est vicieux avec les marchés publics, c’est que des sociétés, pour avoir des marchés, cassent parfois les prix puis volent en faillite.
À l’époque, le conseil se réunissait tous les 3 mois, avec parfois 100 points à voter, dont les plus importants passaient à la fin (rires).
À vous entendre, tout est plus compliqué en 2022 ?
Oui, tout. La bureaucratie est inimaginable et le bourgmestre doit assumer des responsabilités plus importantes. Il doit gérer une commune mais aussi une zone de police et une zone de secours aux coûts de fonctionnement exorbitants. C’est compliqué et en même temps très riche en relations humaines.
Mettet a aussi gagné des habitants. De moins de 10 000 quand j’ai débuté à environ 13 500 aujourd’hui.
Quel est le plus beau souvenir de votre vie politique ?
Ma réélection comme bourgmestre, en 2018. En 6 ans, je suis passé de 1054 à 2124 voix. Personne n’a jamais fait autant de voix. J’y ai vu un encouragement à poursuivre, à travailler sur le long terme.
Votre plus mauvais souvenir ?
Les confinements. L’obligation d’appliquer des décisions sur lesquelles on n’était pas forcément d’accord. Un sentiment d’impuissance aussi.
Vous avez un rêve pour Mettet ? Une grande idée ?
Oui. Que Mettet gagne en autonomie sur le plan énergétique sans plus dépendre des soubresauts de la géopolitique mondiale. Qu’elle soit à la pointe. Que les citoyens n’aient plus à payer des factures d’électricité et de mazout astronomiques. Qu’on puisse leur revendre une énergie produite localement à un prix imbattable. Nous avons des projets qui seront révélés lors du débat sur le budget 2023, le 22 décembre. La transition énergétique, c’est mon ambition pour Mettet,
Budgétairement, on vous sent pourtant déjà au bord du vide ?
On y arrivera. Notre gestion commence à porter des fruits. Les communes qui n’anticiperont pas devront fusionner pour réduire leurs coûts.
L’art de faire de la politique a-t-il évolué ?
Pas fondamentalement. Il y a toujours des trahisons, des coups bas, du cinéma. On se parlait peut-être plus ouvertement avant, on se chamaillait mais on se respectait. Cette législature est marquée par un niveau de haine jamais atteint que je ne comprends pas. Quant aux citoyens, ils sont de plus en plus exigeants. Les réseaux sociaux permettent à tout le monde d’avoir un avis sur tout. Je suis pour la liberté d’expression mais, sur Facebook, la critique est trop facile. On ne peut pas y passer son temps à se justifier. J’ai la chance (et la carapace) de pouvoir passer au-dessus.
Votre sentiment dominant après 40 ans de vie politique ?
Je suis un politique heureux. Un citoyen parmi les citoyens que tout le monde appelle par son prénom. Je peux me présenter partout, je suis toujours bien reçu.
En 2024, stop ou encore ?
Encore. J’aime les gens, j’aime ma commune et les défis à relever pour la hisser plus haut.
Le Dr Wauthy a finalement eu raison de vous le demander ?
(Rires). Oui, je crois. En tout cas, je ne regrette rien. Sans le Dr Wauthy, je n’y serais pas allé par moi-même. Je ne connaissais rien à la politique, mais j’ai appris et j’y ai pris goût. C’était sans doute mon destin, mais le Docteur Wauthy l’avait vu avant moi.