Fosses-la-Ville : à Le Roux, un jeune soldat de la Mémoire d’août 1914
Une page s’est tournée au sein du Comité du Souvenir de Le Roux. Son président-fondateur, Daniel Tilmant, 68 ans, a cédé le flambeau à son petits-fils, Martin Chapelle. À presque 18 ans, ce jeune Taminois est motivé à poursuivre la tâche de relayer la mémoire des tragiques combats de la Sambre, en août 1914.
- Publié le 11-08-2023 à 08h28
- Mis à jour le 30-08-2023 à 13h23
:fill(000000)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/MANLYUHK2VCFPEOORNO2UKB7WY.jpg)
Bon sang ne peut mentir. Martin Chapelle, qui aura 18 ans en février, est le nouveau président du Comité du Souvenir de Le Roux, fondé par son grand-père, Daniel Tilmant. Ce dernier, pour raison de santé, s’est résolu, au printemps dernier, à lui céder le flambeau de la Mémoire des sanglants combats du 22 août 1914.
C’était il y a plus de 100 ans. Les troupes déferlantes de l’armée allemande, dotées d’armes d’une puissance de feu inégalée, franchissent la Sambre. Dans leur costume bleu et pantalon rouge, les jeunes Normands et Bretons envoyés par trains entiers sur cette ligne de front pour leur opposer une résistance y sont sauvagement mitraillés. La violence du choc dégénère en boucherie immonde.
"Je n’oublierai jamais que des jeunes hommes, à peine plus âgés que moi, se sont levés un matin pour prendre un fusil et partir défendre des couleurs et des valeurs, et mourir pour elles", souligne le nouveau président. Pour ça, même si l’homme a commis depuis bien pires horreurs, ces victimes ne peuvent être oubliées, explique-t-il. Les tragédies ne peuvent pas se faire concurrence même si, tôt ou tard, les commémorations s’éteindront d’elles-mêmes, les nouvelles chassant les anciennes.
En tout cas, avec Martin Chapelle, biberonné à la ferveur d’honorer la mémoire, par devoir, le Souvenir du sacrifice de tant de jeunes vies éventrées sur la Sambre semble assuré. Jugez-en. À peine était-il né, en février 2006, que son grand-père, quelques mois plus tard, le faisait parrain d’une tombe d’un de ces valeureux soldats. Et pas n’importe qui: le sous-lieutenant Georges Cotelle, qui a donné son nom à un monument et à une rue de Le Roux.
La peur de l’horreur
Martin a donc été sensibilisé très tôt aux sordides capacités de l’espèce humaine à s’entre-tuer, par bêtise, vengeance ou désir de conquête.
Daniel Tilmant parle d’un jeune homme très mûr pour son âge, à qui il a communiqué le virus d’une mémoire du pire à perpétuer, avec l’espoir qu’elle éclaire le présent pour que la "bête" humaine ne sorte plus de son trou. C’est loin d’être gagné.
Son petit-fils, il l’a emmené sur les traces de ces suicides européens, du musée de Waterloo (son préféré) à Verdun, en passant par le mémorial de Caen et les plages normandes du Débarquement.
"J’habite à Tamines – une des sept villes martyres de Belgique – et chaque fois que je passe à côté de l’église Saint-Martin, je pense à ces centaines d’innocents (383 personnes) qui ont été fusillées le 22 août 1914. Que de générations anéanties par la folie humaine. Que de noms effacés. Tout ça m’a marqué", confie-t-il.
Le jeune Martin accède à la présidence du comité l’année d’un anniversaire: le centenaire de l’aménagement du premier cimetière de la Belle-Motte. Ce jardin des morts pas comme les autres, où le silence est pesant, a été inauguré le dimanche 19 août 1923. Par des cortèges rehaussés de galons à trois et quatre étoiles, français et belges.
L’hommage aux morts du 20 août prochain ne dérogera pas à la tradition: un discours fort, au moins dix dépôts de fleurs et un intense moment de recueillement voire de suspension, où seuls les arbres ramageront. Dans ce cadre solennel, le jeune président s’était déjà exprimé en 2019, au nom de la jeunesse. Il avait 13 ans. "J’avais envie de vous dire combien j’ai peur de cette horreur que l’on appelle la guerre. Et j’aime cette phrase qui dit que la violence est le dernier refuge de la bêtise."



