Fosses: le coup au cœur Eklectik de la jeunesse
Comment se porte la jeunesse ? Ce n’est ni le paradis ni l’enfer. Deux acteurs de terrain ont dressé l’état des lieux et listé les solutions trouvées pour pallier les ressentis négatifs. Parmi toutes, une emblématique ayant reçu un coup de cœur européen: l’organisation du festival de musique Eklectik.
- Publié le 18-04-2023 à 21h46
- Mis à jour le 18-04-2023 à 21h59
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Être jeune, dixit deux dictons, c’est un art, une fraction de folie. Dans quel contexte la jeunesse fossoise pratique-t-elle cet art et, surtout, le cadre de vie et les moyens alloués sont-ils à la hauteur des aspirations de ces adultes de demain ?
C’est à ces questions que deux travailleurs de terrain de l’AMO Basse-Sambre - (service d’Aide en Milieu Ouvert) – ont tenté d’apporter des réponses, dans le cadre des actions réalisées au sein de la plate-forme communale dédiée à la jeunesse.
Plusieurs acteurs croisent leur champ d’action au sein de celle-ci, dont les écoles et le centre culturel.
Marie Bortolin et Estéban Lebron-Ruiz ont livré lundi soir dans l’enceinte du conseil communal l’état des lieux. Leur exposé des constats observés, des actions entreprises et des perspectives futures a occupé la majeure partie du conseil.
Les constats: ce qui coince ou ce qui pourrait être amélioré ?
L’énumération des ressentis est tous azimuts. La mobilité, une problématique sur laquelle la plateforme n’a évidemment aucune prise. Plus surprenant, les jeunes épinglent un sentiment d’insécurité dans le centre de Fosses et même… des violences policières, un constat certes en régression. Le climat serait apaisé, la police a fait preuve de souplesse pendant la crise sanitaire. "J’ai personnellement assisté à une intervention très limite sur un mineur", explique le travailleur de rue.
La jeunesse fossoise déplore aussi un manque d’espaces d’expression, un accès aux études supérieures malaisé, des violences en milieu scolaire, tel le harcèlement, mais aussi familiales. Enfin, une montée de l'homophobie. Le tableau n’est pas rose mais pas noir pour autant. Des lignes bougent.
Ils ressentent le besoin d’être mieux encadrés, par des animateurs positifs, et le manque de jobs étudiants. "L’opération Été Solidaire, explique le travailleur de terrain, a le mérite d’exister mais c’est insuffisant". Dans ce registre, priorité aux jeunes qui n’ont jamais eu de jobs. L'opération sera évidemment reconduite cet été.
La bulle d’air
Le service AMO, qui se partage entre trois territoires (Fosses, Jemeppe et Sambreville), fait tout ce qu’il peut pour mettre en place des remèdes et des solutions, en partenariat avec l’école et la ville à travers son centre culturel.
Contre le harcèlement, l’école a mis en place une cellule, "Bulle d’air" afin de former des sentinelles auprès desquelles les victimes pourront aller déposer ces pressions intolérables, puis être suivies individuellement.
Le phénomène est à ce point préoccupant que les arts du spectacle et du cirque ont même été sollicités, par l’École des devoirs, pour mener des actions de prévention contre le harcèlement scolaire. Dont le spectacle "Brut de décoffrage".
Un événement inédit a cassé la baraque, d’autant plus remarquable qu’il a été mis en œuvre par un comité de jeunes âgés de 16 à 19 ans: l’organisation d’un festival inédit à l’Espace Jijé, Eklectik, car diffusant un melting-pot de bonnes musiques. Dans une vidéo projetée, Cyriel, Alexandre, Cassandra et Gauthier témoignent d’une seule et même voix: "Il n’y a rien à Fosses pour nous. On a voulu révolutionner ce triste constat", et, partant, prendre en main leur destin. La révolution a cartonné puisque Eklectik a été désigné coup de cœur Jeunesse à l’occasion de l’Année Européenne de la Jeunesse 2022. "Ce sont des jeunes qui se sont engagés, dans la programmation comme dans la promotion de ce festival fédérateur. Et ce n’est pas rien. C’est du boulot. Nous les avons juste accompagnés. L’expérience les a valorisés", explique aux élus Estéban Lebron-Ruiz.
Ce premier succès appelait une seconde édition du festival Eklectik, en octobre, certes à la voilure réduite.
Le mot de la fin: "L’AMO ne les assiste pas mais co-construit avec eux. On ne fait rien à leur place", complète-t-il, fort d’une expérience de 7-8 ans le secteur.
Pour la minorité, tant Marjoline Dubois (PS) que Céline Casteels (Écolo) interrogent sur la nécessité ou pas pour ces jeunes de disposer d’un local public rien que pour eux, d’une maison de jeunes. Mais pour quoi faire ? "Leur mettre un local à disposition et après basta, c’est non. Il faut les accompagner et créer une avec eux une relation de confiance", conclut le travailleur de rue.
Une dernière initiative, en attendant mieux ? L’été prochain, un chapiteau de cirque sera planté dans le jardin de la Résidence Dejaifve (une maison de repos) afin d’y organiser des activités multigénérationnelles. D’où pourra toujours jaillir une éventuelle fraction de folie.