André a porté la civière pour la 60e fois (vidéo)
La crise sanitaire n’a pas empêché les Bouillonnais de fêter Saint-Éloi, comme ils le font depuis 142 ans.
Publié le 28-11-2021 à 19h39
"Lorsque je frappe du marteau le matin sur l'enclume et pour l'étau je laisse le cabaret. Alors je suis tout guilleret et quand la forge fume, je chante en travaillant pour oublier tous mes tourments…" Ce chant entonné par tous les participants, les musiciens de l'harmonie, les spectateurs sur le parvis de l'église à l'issue de la messe de la Saint-Éloi, c'est un peu la madeleine de Proust de tous les bouillonnais.
Les souvenirs et anecdotes sont ravivés d’autant plus vite que rien, ou alors si peu, n’a changé dans ce patrimoine folklorique de la cité ducale depuis des décennies: les célèbres pyramides de pains bénits, les sarraus bleus, foulards rouges, casquettes noires, l’harmonie locale présente à chaque édition depuis des décennies. Sans doute des éléments qui assurent sa pérennité à la manifestation. Seuls signes de modernité, les plastiques pour protéger les pains des intempéries, les masques pour les raisons que l’on sait et les gsm greffés aux doigts de certains participants.
Merci Claire
Avant de pouvoir chanter, les sociétaires de la Saint-Éloi ont du pain, pas seulement bénit, sur la planche. Dès potron-minet, ils préparent civières, paniers et autres hottes, découpent les rouillots et, covid oblige, emballe les morceaux qui seront distribués à la fin de la messe. A 9 h 45, départ du premier cortège avec cette année une halte près de la maison de repos pour saluer et dire merci à Claire Hanus (90 ans), présidente d’honneur et qui fut pendant de longues années l’une des chevilles ouvrières de l’événement.
Place ensuite à la messe dédiée au saint fêté, animée par la chorale paroissiale et l’harmonie, pendant laquelle les prêtres évoluent entre civières, enclume, statues et autres symboles.
Bouillonnais dans l’âme
Si à une époque les civières étaient portées par les "boutiquîs" (NDLR: À l’époque on n’allait pas à l’usine mais à la boutique et les ouvriers étaient des boutiquîs), dont la majorité venait de la Ferronnerie Bouillonnaise, aujourd’hui le rôle est assuré par qui veut le faire. C’est ainsi qu’une civière est portée par la confrérie Godefroy, une autre par les pompiers et une troisième par la confrérie du Jambon sec de Charleville-Mézières.
Quant aux autres, aux brancards, on reconnaît au milieu des figures bouillonnaises d’autres originaires de la ville mas aujourd’hui habitant sous d’autres cieux. Pour certains, venir faire la Saint-Éloi c’est sans doute la seule opportunité de revenir dans sa ville d’origine.
Comme quoi, en paraphrasant une chanson grivoise: "Non, non, non, non Saint-Éloi n'est pas mort, il est toujours dans un coin de la mémoire et de l'âme de tout Bouillonnais, de près ou de loin".