«Sale nègre»: une affaire de racisme au service des Travaux
Oui ou non, un contremaître ff a-t-il tenu des propos racistes? L’autorité communale de Tournai va devoir trancher.
Publié le 04-06-2019 à 09h09
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S'ils sont avérés, les propos qui nous ont été rapportés auraient déjà fait scandale dans les années soixante. Parce qu'ici, il ne s'agit pas d'interprétation ou de sensibilité excessive, voire d'humour incompris, etc. «On va le faire décruauder, il sera à genoux ce sale nègre»…
C’est tellement énorme qu’on ne veut pas y croire. On est dans l’expression d’un racisme, ou bien d’un autre temps, ou bien «décomplexé». Le racisme d’un autre temps ? Celui d’une époque où les gens n’avaient pas encore pris conscience de l’invraisemblable ineptie du racisme. Le racisme décomplexé? Celui d’aujourd’hui qui balaie des décennies d’éducation au respect de la différence…
Incroyable donc. Et plus encore dans la bouche d’un chef censé guider ses subalternes. Et pourtant, ces mots inqualifiables, ils seraient plusieurs à les avoir entendus.
«Sale nègre»
La scène s’est déroulée «aux Mouettes», rue d’Amiens à Tournai, à l’heure où l’on répartit le travail. Un contremaître ff aurait tenu ce discours à des chefs d’équipes, abasourdis. La personne visée, un Tournaisien d’origine congolaise, se trouvant à côté du bureau, porte ouverte, a entendu aussi…
Choqué, l’ouvrier s’en est ouvert à ses responsables syndicaux. Plainte a été déposée auprès de la police. Les faits ont également été signalés à l’autorité communale.
L’audition des témoins ce mardi
Il nous revient que lorsque la CGSP a voulu connaître les tenants et les aboutissants de cette affaire, des témoins ont validé la version de la victime, même si le contremaître ff la conteste.
Pour l’heure, le contremaître ff et l’ouvrier ont été auditionnés. Chacun campe sur sa position: il l’a dit/je ne l’ai pas dit.
Le syndicat insiste donc pour que la Ville (comprenez le directeur général et la DRH à tout le moins) procède à une audition des témoins et tire les conséquences de cette affaire. C’est pour ce mardi, semble-t-il.
Et ensuite? On voit assez mal comment il pourrait ne pas y avoir de sanction, dans un sens ou dans l’autre. Car il n’y a que deux manières d’envisager les choses: soit, c’est du racisme caractérisé, soit c’est une cabale visant à faire tomber un contremaître ff qui, hors de cette affaire, a la réputation d’être assez clivant.
Racisme ou cabale: c’est l’un ou l’autre, sauf à imaginer que rien ne soit prouvé ni dans un sens, ni dans l’autre.
Le bourgmestre: je ne couvre rien du tout
Lors d'une récente présentation au personnel de la réorganisation du service mise sur pied par le nouvel ingénieur de la Ville, le bourgmestre Paul-Olivier Delannois a fait allusion à la situation vécue aux Travaux: «quelles que soient les circonstances, si de tels propos ont été proférés, ils sont intolérables», a-t-il dit en substance.
M. Delannois se refuse à tout commentaire, l'affaire étant en cours et relevant de l'administration pour l'instant. On peut simplement dire qu'il connaît personnellement les deux hommes. De là à trouver une voie médiane? «Je récuse totalement l'idée que certains répandent, et qui voudrait que je cherche à passer l'affaire sous silence. Je réfléchis d'ailleurs à la suite que je donnerai à ce type d'accusations.»
Ajoutons enfin qu'il est contre-productif d'avoir barbouillé de «raciste» la voiture du contremaître ff. À ce propos, M. Delannois commente: «J'ai la conviction que ce n'est pas l'ouvrier qui a fait ça. Ce sont des gens qui instrumentalisent sa cause»