Pascal Smet voit le bout du tunnel: «Injuste que les Bruxellois passent pour des klets à cause du trafic»
De retour, Pascal Smet fait le point sur ses dossiers 2017. Remis d’une pneumonie grave, le Ministre bruxellois de la Mobilité (sp.a) s’avoue «triste» des attaques subies pendant sa convalescence. Et rend quelques coups.
Publié le 16-01-2017 à 13h57
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Louise, Schuman, Roosevelt, tunnels... L’année 2017 de Pascal Smet s’annonce gratinée. Mais le socialiste flamand semble «prêt à travailler pour Bruxelles». Le Ministre de la Mobilité et des Travaux publics (sp.a) revient aux affaires après une pneumonie carabinée qui l’a maintenu loin du ring politique pendant de longues semaines. Moment que certains adversaires du MR ont choisi pour tenter l’uppercut.
Mais Smet n’est pas KO. Conscient qu’il a «sans doute trop travaillé pour la première fois de sa vie» en 2016, ce défenseur du vélo et de l’autopartage relève le gant pour les défis qui l’attendent. L’homme le dit d’entrée: il refuse de tendre la joue aux autres régions pour qui les Bruxellois «passent trop souvent pour des klets alors qu’une partie des problèmes du trafic viennent d’ailleurs». Et rend déjà quelques coups vers le coin bleu...
Sur les grands chantiers 2017: «ne plus passer pour des klets»

Pascal Smet ne fait pas de mystère: «en 2017, on va avoir beaucoup de chantiers». Les travaux du tunnel Porte de Hal ou du complexe Reyers, l'attribution du marché du tunnel Léopold II à l'été, la " semi-piétonnisation " de la chaussée d'Ixelles, le réaménagement de Schuman (lire ci-dessous), le relooking du haut de la ville sur Waterloo et Toison d'Or, la piste cyclable sur le boulevard Poincaré, sur l'avenue Roosevelt ou sur le Général Jacques, les trams 9 et 94, le parking de transit à étages de 1200 places au Ceria sont autant de dossiers qui émailleront le trafic bruxellois cette année.

Face à ces chantiers devant lesquels les files risquent de s’allonger, le Ministre ne veut plus «que les Bruxellois passent pour des klets» en Flandre et en Wallonie. «Qui sait, en dehors de Bruxelles, qu’on crée un parc Porte de Ninove?», demande-t-il? Le socialiste compte donc nommer un bureau de com’ pour plusieurs années. «L’affichage des chantiers n’est pas optimal. Je ne réinvente pas la roue mais je veux un slogan unique et des grandes affiches sur les chantiers, où les utilisateurs comprennent ce que deviendront ces carrefours après les travaux».
De plus, Smet reconnaît que «la signalisation des chantiers doit être améliorée. Il faut analyser les datas, connaître les flux de voitures, et envisager les chantiers globalement sur tout un quartier». Pour s’aider, Smet planifie «des feux intelligents qui réagissent au trafic réel sur Charles Quint ou Léopold II», ainsi que «des caméras qui verbalisent les voitures qui bloquent les carrefours».
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Sur les attaques du MR: «Ça m’a rendu triste»

Pendant son absence, Pascal Smet a essuyé plusieurs attaques «ad hominem». Si le politicien accepte les différences d’opinions dans le jeu politique, il estime ici que certains «n’ont pas respecté ma condition de malade».
L’homme ne fait pas de mystère et cite Vincent De Wolf et Didier Reynders dans le dossier du rond-point Schuman, ainsi que la Ville de Bruxelles dans le dossier du rond-point Louise. Smet ne digère pas. «Tu ne choisis pas la maladie. Profiter du moment où un adversaire n’est pas capable de répondre à une attaque politique, mais aussi personnelle, je trouve que c’est le bas du bas humainement. Je ne connais rien au foot, mais je sais qu’on ne tacle pas en dehors du terrain».
Gardera-t-il une rancœur? «Je continuerai à travailler avec tout le monde, mais ça m’a rendu triste. Et le MR qui canarde depuis la Ville dès que le moindre problème se présente, ça doit arrêter. Je suis très clair.»
Sur le «tout à la voiture»: «le Bruxellois pas 100% responsable»

«Bien sûr, je comprends qu’on ait des opinions différentes avec le MR sur la place de la voiture en ville. Eux aussi voient le changement de mentalité qui s’opère». Et Smet de filer la métaphore du football. «En 2017, le match est clair: pendant 50 ans, De Wolf, Reynders ou Ampe ont voulu le “tout à la voiture” pour Bruxelles. Ils ont donné les boulevards et les places à la voiture. Pas aux navetteurs ou aux Bruxellois, mais à la voiture».

Smet, supporter de l’autopartage, reprend alors un de ses leitmotivs. «Je ne suis pas contre la voiture. Mais avec le gouvernement Vervoort II, on ne mise plus sur ce “ tout à la voiture ”. On veut des vraies places ou on ne gare plus n’importe comment. C’est pour ça que j’ai fait Flagey. C’est pour ça qu’on fera Toison d’Or et boulevard de Waterloo, la place du Miroir à Jette, le rond-point Schuman... Pourquoi les gens vont-ils à Namur, Louvain-la-Neuve, Gand, Anvers ou Malines? Pas parce qu’ils ne payent que 5€ pour se parquer, mais parce que ces villes sont plus agréables pour se promener. Même dans le sud de l’Europe, où la voiture est si forte, on “ piétonnise ”. Regardez Madrid ou Milan!»
«Pour agir sur le trafic, on doit envisager la fiscalité»
Le Ministre sp.a répond ensuite plus directement à Didier Reynders, aujourd’hui Ministre fédéral en charge de Beliris, après plusieurs années aux Finances. «Il me déçoit. Car il sait très bien que le problème vient des 213.000 voitures individuelles qui entrent chaque jour à Bruxelles avec une seule personne au volant. Il suffit de voir les jours de vacances: le trafic va mieux. Cette affluence, combinée à cette Petite Ceinture qui n’a pas été conçue pour absorber un tel nombre de voitures, fait que ça coince au moindre problème. Une panne rue Belliard et les files remontent jusqu’à Koekelberg! Pour agir sur ce problème, on doit envisager la fiscalité. Reynders aurait pu, mais je ne l’ai jamais attaqué là-dessus».
Smet estime que les Bruxellois ne doivent pas porter toute la responsabilité de l’engorgement. «Vivre à la campagne car l’air y est plus sain et le cadastre moins cher, c’est dans l’ADN des Belges depuis 100 ans. Aller au travail en voiture aussi». Le socialiste rappelle donc qu’il est partisan d’un «Tinder de l’autopartage» ainsi que d’une bande d’autoroute réservée au covoiturage, et que les «parkings payants dans les gares ne sont pas entre ses mains». Surtout, il martèle qu’«on ne retrouvera pas la fluidité automobile en rajoutant des bandes».
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Sur le réaménagement de Schuman: «la plus laide place du monde»

La Région doit réaménager le rond-point Schuman. Les travaux sont prévus pour 2017. Ils doivent notamment “ piétonniser ” l’axe Schuman-parc du Cinquantenaire de la rue de la Loi et limiter les traversées automobiles aux courbes entre avenue de Cortenbergh et rue de la Loi et entre rue Froissart et avenue d’Auderghem.
«Cette place est la plus filmée du monde. C’est aussi la plus moche du monde. Et c’est l’image de la Belgique. C’est pour ça qu’on va réaménager», tance Smet. Pendant son congé, Reynders et De Wolf ont cependant épinglé un «manque de concertation» dans ce dossier. «Ils m’accusent de ne pas consulter. C’est faux. On a rencontré riverains, service de sécurité, ambassades, institutions européennes, Ville de Bruxelles. Avec le Gouvernement, nous avons approuvé un concours d’architecture, une seconde étude de mobilité est commandée. Els Ampe [échevine Open Vld de la Mobilité à la Ville de Bruxelles] voudrait une passerelle piétonne surplombant le rond-point. Mais ça aussi, c’est du passé».
Par voie de presse, Reynders a menacé de couper le robinet de Beliris dans ce projet. Ce à quoi Rudi Vervoort a répliqué en commission infrastructures que la Région pourrait financer seule ce relooking, tout en assénant que «ce chantage est inacceptable». Pascal Smet regrette l’escalade: «si Reynders a un problème avec Schuman, qu’il m’appelle».
Sur le rond-point Louise: «POUR la voiture»

«Mon seul but à Louise, c’était d’améliorer la fluidité automobile. On avait décidé de faire un test. La Ville, Ixelles et Saint-Gilles étaient OK. Il devait commencer pendant la fermeture du tunnel et durer jusqu’en février. Un des problèmes, c’est que le matériel utilisé était moche. Les commerçants m’ont demandé de l’améliorer. Et Bruxelles Mobilité a trop bien travaillé, donnant l’impression d’un aménagement définitif. Au lieu de me téléphoner, la Ville a réagi dans la presse, alors qu’ils étaient 100% au courant».
Encore une fois, sur ce qu’il considère comme «un détail», Pascal Smet regrette le climat de suspicion que certains cherchent à créer. «Si Mayeur a un problème avec Louise, qu’il me téléphone. Ils veulent me faire passer pour un anti-voiture. Or, l’aménagement à Louise était POUR la voiture. Un bureau externe devait étudier ses conséquences. La Ville le savait. Ensuite, chacun validerait les options à favoriser. Je vais à la gym là-bas: je sais qu’il y avait plus de klaxons après avoir dégagé l’aménagement temporaire qu’avant».
De quoi ouvrir une porte à la simplification des institutions bruxelloises? «Dans une autre ville, tu n’as pas ce problème. À Bruxelles, tout le monde est compétent mais personne n’est responsable. Ce théâtre politique qui ralentit tout, les gens en ont marre». Et Smet de plaider pour «un seul responsable bruxellois pour la Mobilité et l’Urbanisme», rejoignant ici son adversaire politique du MR Boris Dilliès.
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