Le Brussels Beer Project brasse à Dansaert: «Le Belge doit boire autre chose que ses blondes et ses brunes»
Le Brussels Beer Project inaugure son QG de la rue Dansaert. Avec cette brasserie en bord de canal, le projet brassicole collaboratif devient pleinement bruxellois. Et s’offre trois créations pour fêter ça. On a rencontré Yves, le maître brasseur chargé de dénicher des recettes toujours plus surprenantes.
Publié le 20-10-2015 à 18h30
:focal(545x347.5:555x337.5)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/O3BNKNAPV5CUNLGHDWLJKVJJVY.jpg)
Le Brussels Beer Project a eu le don de séduire depuis son arrivée à Bruxelles en 2013. Mais aussi d’énerver. À mots à peine couverts, une polémique est même née au sein du monde des microbrasseurs reprochant à l’initiative participative de Sébastien Morvan et Olivier de Brauwere de se prétendre bruxelloise alors qu’ils déléguaient la production à Bier Anders, dans le Limbourg.

Les critiques devront redescendre d'un ton. Le Beer Project inaugure en effet son QG de la rue Dansaert avec trois nouvelles créations éphémères brassées en bord de Canal. Et devient donc de facto la 4e brasserie bruxelloise après Cantillon, La Senne et En Stoemelings. Vous pourrez goûter ces nouvelles étiquettes fluorescentes dès ce 24 octobre, lors de la soirée festive baptisant les 500m2 du Beer Project.
En plus d’une salle de brassage à 150.000€, l’espace convie les visiteurs à tester une vingtaine de recettes éphémères par an dans un bar de dégustation. Chaque année, l’une d’entre elles intégrera la gamme commercialisée du Beer Project, toujours brassée à plus grande échelle chez Anders. On discute le coup avec Yves Leboeuf, nouvelle recrue de l’équipe bruxelloise, responsable des recettes et assoiffé de découvertes.

«La brasserie traditionnelle reste un peu trop frileuse»
Yves Leboeuf, à 29 ans, vous êtes maître brasseur du Brussels Beer Project. Décrivez-nous les 3 premières créations de cette nouvelle brasserie.
Il y a d’abord la Bloody Pumpkin, une bière automnale américaine infusée au potiron. D’habitude, elle est épicée à le girofle ou à la cannelle mais nous avons choisi de nous passer d’épices pour accentuer le côté toasté, biscuité. Ensuite il y a la Bohème, qui rend hommage aux pils tchèques. C’est une bière de soif qui vient piquer au niveau des houblons, trois variétés nobles de l’ancienne grande Bohème: le Saaz de République Tchèque, le Styrian Golding slovène et le Hersbrucker munichois. Enfin, il y a la Chove Chuva, un stout amer très onctueux, comme une mousse au chocolat, relevé de fève tonka apportant un côté vanillé. Un vrai dessert.

Maître brasseur, ça veut dire quoi?
Je travaille avec l’ingénieur brasseur de la brasserie, Antoine, qui gère davantage le processus technologique pour assurer la standardisation et la qualité. Il se base sur des tableaux Excel pour la couleur, le degré d’alcool... Mine de rien, on ne fait plus de la petite cuvée maison mais des brassins de milliers de litres. De mon côté, je réfléchis davantage à la transmission du goût dans la bière, via les malts et houblons à utiliser.
D’où vient l’inspiration?
De partout, de mes voyages, de mes dégustations. J’étais à l’hôtel il y a peu et, au petit-déjeuner, une association étonnante de deux produits m’a donné une idée encore plus étonnante. Je voyage depuis 6 ans pour goûter des bières. Et puis ma formation vient aussi de mes expériences chez Chouffe, qui m’a beaucoup appris en termes de standardisation, et de la Brasserie des Franches Montagnes, en Suisse, incollable concernant l’assemblage en barriques.

L’idée est aussi de dynamiser un peu le monde brassicole belge?
Disons que pour un pays qui se prétend au sommet mondial de la bière, je trouve que la brasserie traditionnelle reste un peu trop frileuse. Elle joue sur les blondes, les ambrées et les brunes, autour de 8 degrés, sans varier les houblons. J’en ai un peu marre: il faut que le Belge boive autre chose. Faire découvrir, c’est notre job.
Votre boulot vous oblige à boire beaucoup?
Quand je travaille, je ne bois rien ou presque. Évidemment, il faut déguster chaque phase de la production, mais rien d’impressionnant. En vacances par contre je visite 7 à 8 brasseries par voyage, ce qui donne une cinquantaine de bières. Surtout, j’initie mes amis à la dégustation de bières plus variées, comme les IPA ou les stouts.
Y a-t-il une bière que vous rêvez de brasser?
Un gros imperial stout vieilli en fûts de cognac, un vrai pétrole très épais, très café. Mais le projet ici me permet de toute façon de bosser sans aucune restriction. On a 15 malts et 20 houblons différents à disposition et je peux décider le matin ce que je brasse. D’ailleurs on vient de mettre une IPA aux arômes très floraux dans des barriques de vin qui lui donneront une deuxième dimension. Ça aussi, je voulais le faire!
+ La salle de dégustation du Brussels Beer Project, rue Dansaert 188 à 1000 Bruxelles, sera ouverte les jeudis, vendredis et samedis de 14h à 22h à partir du 31/10. Inauguration ce samedi 24/10 entre 15h et 21h.
+ Jusqu’au 30/11, un concours lancé sur mybeerproject.be invite les amateurs à créer leur recette, leur style, leur étiquette... La meilleure proposition sera brassée avec le vainqueur
