Au Train Hostel, revivez les longues nuits en wagons-couchettes
Vous y dormirez dans d’authentiques wagons-couchettes: les 200 lits du Train Hostel, à deux pas du futur musée SNCB de la gare de Schaerbeek, s’ouvrent en septembre. Un voyage dans le temps en sac de couchage.
Publié le 19-08-2015 à 08h48
Le drôle d’oiseau de tôle bleue s’est posé sur un toit de Schaerbeek depuis plus d’un an. Installation furieusement vernienne, la machine suspendue sur la terrasse de cette maison de maître dessine dans l’œil du passant la vision d’une avenue Georges Rodenbach uchronique, où les trains décolleraient tels des hélicoptères pachydermiques.

Ce wagon T5 de la SNCB crissait encore sur les rails d’Europe jusqu’à la fin des années 2000. Aujourd’hui, son billet entre 160 et 180€ offre la nuit dans la seule suite du Train Hostel. L’auberge conceptuelle ouvrira le 26 septembre, dans la foulée du Train World, fameux musée que la SNCB couve à deux pas, dans la gare de Schaerbeek. Il compte 200 lits, dont certains dans deux vrais wagons-couchettes à 19€ le voyage, au confort rudimentaire mais au parfum d’aventure. On y dormira à la dure, dans son sac de couchage. «Ces voitures de 28 et 30 tonnes ont été placées à la grue, avant que l’arrière du bâtiment soit rendu inaccessible par le musée», s’enthousiasme Gaël Van de Werve, chef de la réception. «Pour supporter ce poids, une dalle de béton renforce le plafond du 2e étage ».
Actif dans l’immobilier résidentiel, Nicolas Kervyn, propriétaire, voulait «donner un coup de pied dans le monde de l’hôtellerie. D’où ce concept ludique et démocratique pour que les familles puissent s’offrir un petit extra sans pour autant bouffer des spaghettis pendant une semaine ».
Malles de cuir et tablettes
Le Bruxellois achète l’immeuble en 2011. Il veut s’y «distinguer de l’auberge de jeunesse baba cool, du 4 étoiles formaté par ordinateur et de l’hôtel Formule 1 ». Il apprend que le musée de la SNCB, « vrai Monstre du Loch Ness», va ouvrir à côté. Il contacte le dessinateur François Schuiten, en charge de la scénographie du Train World. L’artiste monte en marche. Le train devient le thème central de l’hôtel. Budget: «entre 3,5 et 4 millions d’euros».
De brocanteurs en antiquaires, le patron rassemble un bric-à-brac lié au rail. À un mois de l’ouverture, plans, maquettes, malles de cuir et plaques d’émail muent les lieux en gare steampunk, quelque part entre Le Tour du Monde en 80 Jours, Amélie Poulain et Mr Hublot. Plus insolite encore, rideaux de l’armée récupérés, miroirs encadrés de vitres de wagons, lourds coffres à batteries en guise d’armoire, tablettes ferroviaires, fusibles transformés en patères et téléphones muraux à cornets de cuivre donnent leur patine aux murs, pourtant flambant neufs. On y entend presque le cliquetis des roues ferrées. Et les annonces bilingues.
Le voyage vous tente? N’ayez crainte: la cuisine ne turbine pas au charbon. Micro-ondes et pompes à bières vous y attendent, comme au wagon-restaurant.
+ Lits entre 19 et 25€ en dortoirs. Ouverture le 26 septembre, www.trainhostel.be
«On va tourner la vapeur
dans le quartier»
Nicolas Kervyn, vous êtes le patron du Train Hostel: le monde du rail, c'est un peu un heureux hasard?
C'est vrai. D'autant que j'ai davantage la passion du bateau que celle du train. Mais il faut reconnaître que c'est un objet amusant. C'est aussi un hommage à toute l'époque industrielle: on valorise assez peu la Belgique, mais elle a excellé dans le monde ferroviaire. Surtout, je trouve que les longs voyages en train favorisent l'aspect humain. Les voyageurs viennent de tous les horizons et, le temps aidant, les langues se délient, on parle et on partage.
Les couchettes de l'hôtel pourraient permettre un échange similaire: à vous entendre, on peut vous deviner quelque peu nostalgique d'une époque où le low cost n'existait pas.
Le low cost qui sacrifie tout à la notion de prix, c'est dommage. De mon côté, je valorise la notion de confort et de qualité de vie. Le créneau sur lequel on table est atypique: une expérience de qualité sans contraintes financières.
Si Schaerbeek compter de nouveau pour les Bruxellois, il faut avoue que son image reste quelque peu perfectible aux yeux des Belges. Il faut du culot pour y installer un hôtel...
Il y a 5 ans, je connaissais à peine Schaerbeek. Comme beaucoup, j'imaginais le pire. Aujourd'hui, je suis conquis. Juste en face de la gare, la rue Huart Hamoir, d'une telle largeur et formidablement arborée, est magnifique. Des rues comme ça, j'en ai pas vu beaucoup. Pourtant j'ai voyagé. On a pu aussi compter sur une vraie collaboration avec les autorités urbanistiques schaerbeekoises qui cherchent à valoriser le patrimoine. Je pense qu'on est en mesure de renverser la vapeur face à la paupérisation: on va développer un pôle touristico-ferroviaire dans ce quartier.