Série d'été| Dans la réserve précieuse de l’UCL (photos)
Température et taux d’humidité contrôlés, accès limités: la réserve précieuse se veut être un havre de paix pour les ouvrages anciens.
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Publié le 03-07-2014 à 08h47
Des carrelages aux couleurs ternes, des murs jaune pâle, des rayons métalliques gris… La salle située dans les sous-sols du collège Albert Descamps à Louvain-la-Neuve ne paye pas de mine. Pourtant, elle abrite la réserve précieuse de l’UCL.
S'y côtoient des manuscrits japonais du XIIIe siècle, des incunables européens, ces ouvrages du début de l'imprimerie, dont un Liber chronicarum appelé aussi Chronique de Nuremberg de 1493 avec 1809 gravures sur bois ou une Biblia latina (Bible latine) imprimée à Venise en 1476 par Nicolas Jenson où l'on peut voir des caractères romains considérés comme parfaits ou encore cet Atlas d'anatomie du bœuf, datant du XIXe siècle, avec des aquarelles uniques d'Edmond Tschaggeny, reconnu trésor de la Communauté française…
Dans cette réserve, classés par siècle et par taille, quelque 15 000 volumes pour le fonds européen dont 200 incunables et une grosse partie d’ouvrages du XVIIe ainsi qu’un important fonds asiatique composé de 13 700 volumes japonais, 7 600 chinois et des manuscrits tibétains.
Une surveillance constante
La réserve précieuse s'est installée dans les années 90 dans ce local dont ce n'était pas la vocation d'accueillir des ouvrages anciens. Mais Émilie Vilcot, adjointe du bibliothécaire en chef et responsable de la réserve patrimoniale de l'UCL dont fait partie la réserve précieuse, précise que les «ouvrages ne sont pas malheureux ici». Cette réserve va bientôt s'étendre: une seconde salle attend des travaux au niveau de la ventilation. Elle accueillera les ouvrages des XVIII et XIXes siècles tandis que la salle actuelle se consacrera aux ouvrages les plus anciens.
Là où le bât blesse, c'est au niveau de la réserve générale où sévissent insectes, infiltrations d'eau et moisissures… «Cela rend la vie difficile, mais on s'en sort bien. C'est un quatre étoiles chez moi par rapport à certaines réserves que j'ai visitées.»
Revenons dans la réserve précieuse où la température et le taux d'humidité sont relevés deux fois par semaine. «L'idéal est une température entre 18 et 20 C° et un taux d'humidité entre 50 et 60%. Mais le plus important, c'est que ces conditions soient stables.»
Mise en quarantaine
L’un des pires ennemis? La poussière. En fonction des conditions atmosphériques, elle peut susciter d’autres problèmes comme l’apparition de micro-organismes. Tous les ans, les ouvrages sont donc dépoussiérés et les étagères aspirées.
D'ailleurs, les livres n'entrent pas comme ils veulent dans la réserve. Après avoir été nettoyés, ils sont mis en quarantaine deux ou trois mois pour voir notamment si des insectes ou des champignons ne s'y développent pas. Ensuite ils sont aspirés, page par page, et mis à plat dans la réserve pour que le matériau s'adapte aux conditions de la salle. «Le parchemin, par exemple, bouge en fonction du taux d'humidité. Il vaut donc mieux voir comment il évolue avant de le mettre en rayon.»
Une fois aux côtés d'autres vénérables ouvrages, ils leur restent à attendre qu'un chercheur s'y intéresse. En 2013, Émilie Vilcot a reçu une soixantaine de demandes de consultation et en a accepté une cinquantaine. «J'évalue leur pertinence car les consultations entraînent un risque d'abîmer les ouvrages.» La responsable, si elle n'oblige pas de porter des gants, imposera de bien se laver les mains.
Et de conclure: «Nous allons nous lancer dans une politique de restauration plus active. On va aussi entamer en septembre la numérisation de certains ouvrages du fonds japonais pour le faire connaître. Car il faut faire vivre cette réserve précieuse. Les ouvrages ne sont pas là pour faire dodo pendant des siècles…»