Éviter de semer la graine

En Belgique, un homme a tué sa (son ex)compagne en moyenne tous les 12 jours, ces 5 dernières années. Mais avant d’en arriver là, il y a la violence quotidienne. La gifle, l’insulte, le rapport non consenti. Celle qui se passe derrière les rideaux, parfois sous les yeux des enfants. Celle qui, une fois passée la porte, le trottoir atteint, sera souvent difficilement identifiable. La honte pousse à maintenir le secret. Et le déni de l’auteur à se conforter dans ses actes. Et puis, la violence conjugale n’est pas affaire de classe sociale, d’âge, de milieu professionnel. Mais comment en arrive-t-on à battre la femme que l’on aime ou prétend aimer ? Car oui, si l’on conjugue souvent la problématique au masculin, c’est parce qu’il y a davantage de femmes victimes. Mathieu Palain, un journaliste français, est allé à la rencontre d’hommes condamnés pour violence conjugale. La question n’est pas tant de savoir quelle situation a mené à l’acte violent. Mais comment l’endiguer. " La petite graine de la violence, elle pousse, et je pense que cette graine est en moi depuis longtemps, elle fait partie de ce que m’ont transmis mes parents " , dit l’un d’eux. Car cette graine a souvent été plantée il y a longtemps, lorsqu’enfant, il a vu son père frapper sa mère, lui crier dessus. La violence est devenue la norme. Mais la société permet aussi à ces hommes d’être violents, selon Mathieu Palain. Via les stéréotypes de genre dans lesquels on enferme encore – moins heureusement – les petits garçons et les petites filles. En gros, un garçon, ça ne pleure pas, c’est dur. La domination masculine fait d’ailleurs partie de leur système de justification. Les choses évoluent (lentement) et des mouvements comme MeToo sont passés par là. S’il faut protéger toujours plus les victimes, les aider, notamment à porter plainte, et faire en sorte qu’elles soient prises au sérieux, s’il faut considérer la violence conjugale dans sa globalité, il faut alors aussi s’intéresser aux auteurs. Les laisser avec leur rancœur, leur justification banale, ne fera que les inciter à recommencer. Mettre des mots, les responsabiliser face à l’acte est essentiel. C’est le travail de l’ASBL Praxis, par exemple, qui diminue le risque de récidive. Mais prévenir est primordial. Et ça se joue dès la maternelle: revoir notre système d’éducation, plaide l’un. Déconstruire les choses dès le début, plaide l’autre. Pour faire de l’égalité une réalité et non plus un objectif. Car si l’on peut toujours tenter de couper la graine qui a poussé, que fait-on des racines ? Il serait bien plus simple d’éviter de la semer cette graine.

Éviter de semer la graine
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