L’Iran, un miroir moral, déformant et cruel
L’Iran met la Belgique face à de fameux dilemmes moraux. Ce lundi, trois ressortissants iraniens n’ayant pas obtenu le statut de réfugié devaient être reconduits en Turquie, avant une possible expulsion vers leur pays d’origine. Mais voilà, ils ont fait savoir qu’ils ont participé aux manifestations antirégime qui secouent l’Iran depuis des mois, et qu’ils risquaient donc leur vie en cas d’expulsion.
Publié le 24-01-2023 à 07h25 - Mis à jour le 24-01-2023 à 07h27
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Parce qu’ils ont refusé de monter dans l’avion, qu’une poignée de soutiens ont protesté à l’aéroport de Zaventem et que les médias se sont fait l’écho des dangers qui pèsent sur eux, ces trois hommes n’ont finalement pas été expulsés.
Quelle que soit la véracité de leurs dires, il est clair qu’ils ne veulent pas retourner "au pays". Et il suffit d’ouvrir les journaux pour comprendre que la vie en Iran, particulièrement pour les jeunes ayant soif d’émancipation, n’est pas une perspective acceptable actuellement. Certains, là-bas, l’ont payé de leur vie, c’est un fait. Aussi, en ayant fui leur pays et parce que leur cas a été médiatisé, c’est comme si ces hommes avaient "parlé" contre le régime ; les renvoyer là-bas leur fait clairement courir un risque. Gageons que les autorités belges en ont conscience et n’iront pas au bout d’une logique légaliste qui serait absurde.
Cette situation n’est pas sans rappeler le dilemme moral impliquant le Belge Olivier Vandecasteele, détenu en Iran pour au moins 40 ans si l’on s’en réfère à la "justice" iranienne. Pourtant, cet humanitaire pourrait être, avec d’autres Occidentaux, libéré sur-le-champ. Pour cela, il faudrait l’échanger contre un affreux personnage, le diplomate iranien Assadolah Assadi, condamné à 20 ans de prison en Belgique, pour avoir fomenté un attentat de grande ampleur en France contre l’opposition iranienne. La loi le permet-elle ? Non. Et alors ? Nous sommes – littéralement – en temps de guerre. La véritable question est la suivante: combien vaut Assadolah Assadi aux yeux du régime iranien ? Et combien valent, à nos yeux, les Occidentaux (dont Vandecasteele) injustement emprisonnés dans les geôles iraniennes (il s’en trouverait une dizaine) ? Peut-on procéder à un échange et sauver des vies, au mépris de notre propre justice ? L’affaire des trois Iraniens qui n’ont pas été expulsés ce lundi répond simplement, sur le plan moral, à cette question cruelle.