C’est la guerre qui est un crime
La guerre a ses règles. Il n’y est pas interdit de tuer autrui. Éliminer un maximum d’ennemis est même l’objectif avoué de toute armée qui se respecte. Mais depuis que la violence s’est érigée en ressort de l’humanité – c’est-à-dire depuis des temps immémoriaux – les combattants ont cependant cherché à codifier leurs batailles, à moraliser leurs exactions.
Publié le 23-05-2022 à 18h23 - Mis à jour le 23-05-2022 à 18h36
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Ces louables intentions n’ont pas réduit les boucheries. Au temps de la chevalerie, l’usage de l’arbalète fut jugé déloyal. Cela n’empêcha pas que l’arme du Diable cause des ravages dans les rangs des armées, comme les gaz mortels, les mines antipersonnel ou les bombes à fragmentation de nos jours. La moralité guerrière a ses limites. Celles de l’efficacité.
Quelques règles, pourtant, font la quasi-unanimité des belligérants: en temps de guerre, on n’exécute pas les soldats prisonniers, et on ne vise pas délibérément les civils. Là encore, cette frontière entre la barbarie et ce que d’aucuns nommeraient « l’art militaire » n’a jamais mis fin aux bombardements aveugles des villes, aux mises à sac, aux pillages, aux exécutions, aux viols comme armes de terreur de populations sans défense.
Ces règles existent pourtant. Elles ont été coulées dans le bronze de textes internationaux, signés par une majorité de pays du monde « civilisé ». Il est des ironies de l’histoire que ce soit justement au sortir de la guerre de Crimée qu’en 1864 fut paraphée la Convention de Genève obligeant à soigner les blessés sans distinction de nationalité. Il n’est pas inutile non plus de rappeler qu’aucune grande Nation, que ce soit la Russie, la Chine ou les États-Unis, n’a accepté de signer la charte de la Cour pénale internationale. Les puissants de notre terre restent très réticents à ce que soient jugés leurs propres soldats.
Des combattants, pourtant, se retrouvent un jour face à leurs juges. Comme ce sergent russe de 21 ans. Une tête de gamin, crâne rasé, cinquante kilos uniforme mouillé.Ni la gueule ni la carrure d’un exécuteur des basses œuvres, d’une machine à occire, et pas les galons d’un chef de guerre.Un exécutant égaré dans l’immonde, broyé dans un conflit que d’autres ont initié, avant de l’y inviter. Ceux-là jamais ne seront jugés, sinon par l’Histoire.C’est pourtant la guerre, en elle-même, qui est le crime.