"Si t'as pas fait le tour du Mont-Blanc au pas de course, t'as rien fait !"
Elle court, elle court, la maladie du jogging (et l'épidémie de trail). Autour de nous, ils sont toujours plus nombreux à courir de plus en plus souvent, et de plus en plus longtemps...
Publié le 08-04-2016 à 10h14
:focal(755x432.5:765x422.5)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/GKULPYRUEZF6LECGESG5HZ65HI.jpg)
Bon, reprenons par le début. Autrefois, c'était quoiêtre sportif ? C'était avoir un short, une paire de baskets en état (voire des sandales de gym), et une foisou deux par semaine, on sortait courir trois kilomètres avec le chien.
Avec ça, onpassait pourquelqu'un qui entretient consciencieusement sa condition physique, même si on fumait une clope avant et une après.
A l'époque, le type qui courait les "20 km de Bruxelles", c'était quasiment un héros, connu et respecté dans son quartier.
C'était un rêve d'arriverà un jour courirces mythiques"20 km", un Graal, une étape dans la vie, l'aboutissement de mois d'efforts. On disait sur un ton admiratif: "tu te rends compte, Machin, il va faire les 20km de Bruxelles".
Puis,on ne sait pasvraiment pourquoi, le jogging s'est emballé, c'est devenu un phénomène de masse,ettoutlemonde s'estmisà courir et courir encore..
Et tout le monde s'est équipé, en prime. Aujourd'hui vous vous présentezà un jogging avec un short, un bête t-shirt "I love New-York" et les sandales de gym, etvous avez l'impression d'être un clochard égaré dans une soirée branchouille.
Aujourd'hui, les "20 kmde Bruxelles", c'est devenu l'équivalent des 3kilomètres avec le clebs d'autrefois.Une promenade collective.Unesorte de marche Adeps un peu rapide, mais sans le bâton et les écussons sur le training. Tout le monde lesfait, même le Roi Philippe, quasi sans entraînement.
Et les conversations évoluent :"Tu cours toi?" - "Non, non...enfin, si, j'ai faituneou deuxfois les 20 km de Bruxelles, mais bon...".Hé oui !Ca ne fait même plus de vous un sportif connu et respecté par votre entourage.
Et le jogging est devenu un mode de vie. Quirythme et conditionnetoute la semaine de ses adeptes. "Vous faites quoisamedisoir, les gars ? - Rien, repos, ona les foulées del'Ourthedimanche matin".
"Tiens, Machin a perdu 1215 caloriessur son heure de table"
Sur les réseaux sociaux, d'ailleurs, on peut suivre ses amis qui courent et dont la performance s'inscrit en direct via diverses "applis". Tiens, Machin est en train de courir 15 kilomètres pendant son heure de table. Et, wow !Il a perdu 1203 calories ! Et vous, avec votre grossandwiche en main, vous vous sentez gras et coupable.
On court pour entrenir sa forme et affiner sa silhouette certes, mais aussi pour des tas d'autres raisons.Courir génère dans l'organisme, paraît-il, des substances qui font du bien. Ca aide à combattre le stress, la déprime et même àremonter la pente après unerupture. Le jogging, c'est moins cher qu'un psy.
Cela dit,lejogginglui même est en passe d'être démodé, remplacé par un nouveau phénomène de société dénommé le "trail". Le trail, c'est unevariété de jogging mais plus forestier ou montagnard, plus long, sur des chemins plus escarpés.
Et une fois qu'on met le pied dansle trail, onbascule dans uneautre dimension. Dans le trail en effet,20 kilomètres, c'est la distance "bambin", la course "junior", lechallenge"premiers pas" !Les vrais "trailers", eux,montent jusqu'à 100voire200kilomètres. Il n'y a plus de limite !
De sorte que les références ont changé. Aujourd'hui, tes pas vraiment un sportif si tu n'as pasfait l'"ultra trail"du Mont-Blanc en "ultra-endurance" :168 km en une étapeet 9600 mètres de dénivelé.
Et qui fait ça ? NonpasBatman, Superman voire Ultraman, non ce sont vos collègues de bureau. Vous les saluez le mercredisoir,sur le parking du boulot, comme si de rien n'était, et deux jours plus tard, vous les voyezsur Facebook en plein effort dans un décor de montagne,escaladantleur troisième col de la matinée.
J'ai un collègue, ila carrément participé àun ultra-trail dans le désert !Il m'a dit après coup :"mais c'était pas si dur, tu sais, c'était juste 40 km par jour".
Taxe au kilomètre ?
Bref, en observant les"barrages filtrants"cette semaine, je me suis dit : "tiens, et si on créaitaussi une taxe au kilomètre pour les joggeurs".
Après tout, vu leur nombre et leur endurance, il est permis de penser qu'ilsusent un peu le tarmac et les chemins forestiers, et qu'il y a un coût pour la collectivité.
Une simplepuce à la godasse et la factureapparaîtrait directement à la fin de la course, entre le dénivelé et les calories brûlées.
Bon, je me doute bien que ce ne serait pasune mesure très populaire et qu'aucun politicien ne va s'y risquer. Mais puisqu'on cherche désespérément à remplir les caisses...