On a testé le resto La Petite Gayole à Thuillies
Une adresse colorée où un chef fait honneur au bien-manger, où une patronne nature et enjouée règne avec le sourire, où le décor raconte une Belgique d’autrefois.
Publié le 02-03-2023 à 08h00
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Marie et Simon déjeunent à la Petite Gayole, une de ces maisons chaleureuses où on commence par un Picon vin blanc, où on arrose le petit salé aux lentilles d’un pot lyonnais, où on finit avec un irish coffee coiffé d’une crème montée au fouet. C’est la table généreuse de François Dumont et Audrey Moretti, complices au travail comme à la ville. Il a étudié l’œnologie à Bordeaux mais est complètement autodidacte au fourneau. Il avait débuté avec des pierrades parce qu’il ne maîtrisait pas ses cuissons. Il est devenu chef pour plaire à celle qu’il aime et qui continue à l’inspirer, goûte et valide tous ses plats. Elle dirige le service, accorte et volubile, s’enquérant du bonheur de chacun. Elle fait la bise aux habitués, elle accueille les autres tout sourire.
Comme un bouchon lyonnais en Thudinie
Le chef fait honneur au bien-manger. Chez lui, l’amateur d’huîtres ou de belles pièces de bœuf trouvera son compte aussi bien que le friand de mijotés et de plats canailles. Coucou de Malines et sole meunière, mais aussi blanquette, andouillette et autres nostalgies, moelle et cervelle affreusement bonnes.
Marie et Simon sont installés face au bar, à côté du porte-manteau perroquet Thonet, en bois cintré et aux patères joliment courbées, qui incarne si bien l’univers du bistrot. De là, ils devinent déjà une partie de la décoration qu’ils iront voir de plus près tout à l’heure, un peu comme on visite une exposition.
Ce qui pourrait passer pour un bouchon lyonnais en Thudinie se révèle être une ode à une Belgitude d’autrefois, qui raconte l’Expo 58 et la Sabena des années du Congo, qui se souvient du temps où la bouteille de bière de ménage coûtait 10 centimes, le litre de genièvre Drapeau Rouge 1,6 franc. Dignes d’un musée, les lithographies du dessinateur-affichiste Léon Belloguet annoncent le carnaval de Binche ou les fêtes du 75e anniversaire de l’Indépendance.
Marie et Simon s’amusent à la lecture des trois douzaines d’aphorismes wallons reproduits sur les sets de table. Mindjons bén, nos mor’rons gras… Ou encore: I l-èst trop tard di sèrér l’gayole quand l’mouchon è-st-èvolè…
Eddy Merckx et Mon oncle Benjamin
Ils passent maintenant aux choses sérieuses. Pour elle: croquette de volaille et ris de veau sur une duxelles (hachis) de champignons, façon de réinventer la bouchée à la reine. Pour lui: chou farci de chair à saucisse, pied de porc et oignons rouges, sauce bien moutardée et crumble au parmesan. Elle a choisi le filet de bar, avec une sauce enrichie de crevettes grises. Il a opté pour le rognon grillé et flambé au péket, nappé d’un jus de veau aux baies de genévrier.
Le sabayon à l’Orval est un bel équilibre entre le sucre et l’amertume, avec une glace vanille pour en faire un chaud-froid. Le baba cuit dans la maison est garni d’une chantilly aux zestes d’orange et, pour faire bonne mesure, accompagné d’un petit verre de rhum.
Pour sûr, Marie et Simon refileront l’adresse aux amis, en les invitant à rechercher, dans la salle et les arrière-salles de cette brocante chic, la gayole, Eddy Merckx, Saint-Roch, le banc d’écolier, la Vache qui Rit, le billot de boucher et l’affiche de Mon Oncle Benjamin, ce film célébrant l’épicurisme joyeux tel qu’on le pratique justement ici.