À la découverte des vignobles secrets de Venise
Ancienne capitale d’un empire maritime et commercial, Venise fut, après Constantinople, le plus grand port du Moyen Âge. Riche de multiples îlots, sa lagune cache quelques vignobles improbables pouvant être engloutis à chaque instant. Découverte.
Publié le 31-12-2022 à 08h00
À l’abri des regards mais accessible à tous, le monastère des Carmes Déchaux est situé le long du Grand Canal de Venise, à 300 mètres de la gare principale qui déverse chaque année plus de trente millions de voyageurs dans l’ancienne cité des Doges. Installés ici depuis 1633, les religieux se rendirent célèbres grâce à leur "eau de mélisse" élaborée à base de la plante homonyme cultivée dans leur grand jardin et qui soulagerait certains troubles digestifs ou hépatiques.
Il y a peu de temps encore, plus de 145 000 bouteilles de ce précieux breuvage étaient vendues par les carmes et carmélites déchaussés, mais ce nombre est tombé à 12 000 aujourd’hui et seuls une dizaine de moines vivent encore ici.
La mélisse n’est pas le seul revenu issu de ce "giardino mistico" construit en sept parties évoquant chacune un élément de la prédication de Sainte-Thérèse d’Avila. Outre les éléments traditionnels du jardin vénitien, l’ensemble est dessiné selon un motif géométrique typique des jardins de la Renaissance et se termine sur la "porte d’eau" donnant sur le canal.
Un vin rare… et pas cher
Planté entre le potager et le verger, un petit vignoble sert de conservatoire de variétés rares ou oubliées de raisins (par ex. le Marzemino, la Malvasia ou le Raboso) et permet à la communauté de produire un millier de bouteilles de vin par assemblage de toutes les variétés présentes ici: 700 bouteilles de blanc (la cuvée Ad Mensam) et 300 de rouge (Pandium).
Ne disposant pas des infrastructures techniques nécessaires, les raisins sont emmenés après la vendange dans un lieu hors de la ville. Les deux vins sont vendus à 15 euros chacun en bouteille de 75 cl, mais uniquement sur place et dans quelques restaurants locaux.
Non loin de là, dans le quartier de Castello, Marco Ziani, fils du Doge Pietro, possédait au XIIIe siècle, le vignoble le plus étendu de la ville. À sa mort en 1257, il fut cédé par testament aux frères de l’Ordre des Franciscains (de la branche des Observants) qui s’y installèrent et édifièrent l’église San Francesco della Vigna (saint François de la vigne). L’église existe toujours, il est difficile de savoir si la parcelle est encore entretenue. Une vue aérienne trouvée sur le web pourrait le laisser croire, mais sans confirmation aucune.