L’Échappée belge part à la découverte du Grand-Est
Toul, Pont-à-Mousson, Uckange, Metz, Épinal… «L’Échappée belge» de ce week-end a pédalé de la Lorraine aux Vosges, en suivant la Voie bleue.
Publié le 01-09-2021 à 09h00
Personne ne s'est jamais dit: «Tiens, cette année, si on allait en vacances dans le Grand Est de la France?» Le Sud, oui. Le Sud-Ouest aussi. Le Nord? Pour ses plages et ses ambiances, on y fait parfois un tour. Mais le Grand-Est, c'est quoi, en fait? Tout d'abord une entité administrative française résultant de la fusion (assez récente, et controversée) des anciennes régions Alsace, Champagne-Ardenne et Lorraine. Sa plus grande ville est Strasbourg qui est aussi son chef-lieu. Elle regroupe toute une série de départements dont la Meuse, les Ardennes, la Meurthe-et-Moselle, la Marne, la Haute-Marne et les Vosges.
Un spleen de province profonde
Voilà pour l’organisation territoriale. De façon plus abstraite, le Grand-Est, c’est aussi, lorsque nous partons en vacances vers le Midi, toute cette région que traverse l’autoroute où nous ne nous arrêtons jamais. Pourtant, Pont-à-Mousson ou Épinal, on se dit depuis longtemps qu’on devrait y passer un jour. Mais sans jamais passer à l’acte.
Pour sa troisième Échappée belge de l'été, Adrien Joveneau, ses invitées et son équipe s'en sont allés justement explorer cette région frontalière un peu méconnue. Pas la région la plus «bling bling» de France, en vérité. Dans les villes et les villages de ce Grand-Est règne souvent un spleen de province profonde. Avec une certaine tristesse dans l'architecture des maisons. Tout cela en prenant comme fil rouge la bien connue Voie bleue, laquelle est en réalité une voie… verte, soit 700 km praticables à vélo, reliant Luxembourg à Lyon, le long de cours d'eau comme la Moselle, le canal des Vosges et la Saône.
De Schengen à Bains-les-Bains
L’émission démarre d’ailleurs au Grand-Duché, dans les vignes de Schengen, bourgade célèbre pour les accords européens à qui elle a donné son nom. Elle va nous emmener jusqu’aux alentours d’Épinal, via Metz et Nancy, deux cités renommées, mais aussi les bourgades moins courues comme Toul, Pont-à-Mousson ou Bains-les-Bains, aux atmosphères bien particulières. On y croisera des personnages singuliers comme Philippe Brocherez de Gueldre, dandy souriant qui est aussi l’historien de Pont-à-Mousson, Jean Larché, ancien métallo d’Uckange et qui continue à y accueillir les touristes, partageant la légende des lieux. Ce couple étonnant, aux allures de retraités bohèmes, qui a pourtant rénové une ancienne usine et ses dépendances dénommées Manufacture royale. Ou encore l’ineffable Denis Duchêne, ce cow-boy aux pieds nus qui a créé la Ferme aventure et ses logements insolites.

2.Pont-à-Mousson
Au cœur de la Lorraine et du département de Meurthe-et-Moselle, s’étale Pont-à-Mousson, que peuplent 25 000 Mussipontains. Souvent exposée aux combats en raison de son caractère frontalier, elle vaut le détour par ses berges (cyclables), les arcades de sa grand-place triangulaire, son abbaye des Prémontrés et son curieux Musée au fil du papier garni d’objets et de mobiliers décorés de papier mâché ou de carton bouilli.

3.Uckange
Que faire des vestiges de la sidérurgie? À Uckange, vallée de la Fensch, le maire a plaidé pour conserver l’U4, majestueuse cathédrale de fer qui est le dernier des six hauts-fourneaux de l’endroit. Il s’est éteint en 1991 et, depuis 2007, des passerelles le rendent accessible aux visiteurs. On y joue des spectacles. D’anciens ouvriers, comme Jean Larché, sont devenus guides et mémoire de l’endroit.

4.Sierck-les-Bains
À Sierck-les-Bains, on est au cœur du pays des Trois Frontières, entre France, Allemagne et Luxembourg. Quelques rues pentues suivies de volées d’escaliers mènent au fier château des ducs de Lorraine, qui date du XIe siècle, souvent assiégé mais imprenable et qui a gardé toutes ses structures. Son sommet, écrin de pierres et de verdure, offre des panoramas sublimes sur les méandres de la Moselle.

5.Fontenoy
Lieu jadis stratégique au cœur des Vosges (près de Bains-les-Bains), Fontenoy-le-Château, que traverse un canal et domine un donjon en rénovation, offre le spectacle presque angoissant d’une ville à demi-fantôme. Dans la grand-rue silencieuse, beaucoup de maisons vides et de boutiques fermées à jamais. Subsistent une épicerie, un café, une médiathèque… La France si profonde qu’elle en devient déserte.

6.Metz
Metz est moins renommée que Strasbourg ou Nancy. Et pourtant, avec sa cathédrale Saint-Étienne, son Temple neuf presque insulaire, sa vieille ville, ses jardins spacieux, ses petits restos sympas, son chocolatier Namur, et son centre Beaubourg bis ouvert en 2010, Metz offre matière à un city trip copieux. Ajoutons que sa gare est considérée comme la plus belle de France ( photo). Et on peut y débarquer avec son vélo.


Au départ, c'est une ancienne ferblanterie (usine de fer-blanc) du XVIIIe. En subsistent des entrepôts et quelques vestiges. C'est devenu un majestueux lieu d'habitation et de vacances avec château, chapelle, gîtes et chambres d'hôtes. Soixante personnes peuvent y cohabiter. Les maîtres d'œuvre? Martine et François, venus du monde des sports moteurs, qui ont racheté l'endroit voilà 17 ans et l'ont rénové patiemment. « On aime ça, les vieilles pierres. » Des décors naturels qui attirent les tournages, tels Indigènes (2006) avec Jamel et Samy Nacery ou la série Le Voyageur avec Éric Cantona. On oubliait: la maison des contremaîtres (1750) a vu naître Julie Victoire Daubié, qui fut la première bachelière de France. Une sacrée référence.

Pas loin d’Épinal, à La Chapelle-aux-Bois, se trouve la Ferme aventure, lieu qui semble aimanter les familles. Son créateur déboule, Denis Duchêne, cow-boy rigolard aux allures de patron de petit cirque. C’est lui qui, voilà 20 ans, a peu à peu transformé sa fermette en un lieu de tourisme très fréquenté. Il a d’abord construit le labyrinthe dans les maïs. Puis un deuxième… Et puis, il a aménagé tout un bois, dans l’idée saugrenue qu’on puisse s’y promener sans difficulté à pieds nus. Cette religion du «sans-souliers», il la pratique lui-même sans forcément l’imposer. Il a surtout développé le logement insolite: pyramides transparentes, cabanes, tipis indiens, yourte… L’esprit d’enfance hante les lieux.

Avec deux battantes
Pour cette Échappée belge dans le Grand Est français, Adrien Joveneau était accompagné non pas d'une, mais de deux invitées, pour des raisons d'agenda encombré. La première copilote de l'émission s'appelle Bérangère McNeese (au centre), mi-belge, mi-américaine, journaliste de formation devenue comédienne et aussi réalisatrice. Après deux courts «à l'arrache», elle a signé Matriochka, un court qui a cartonné, raflant notamment le magritte de la catégorie. Elle profite de cet état de grâce pour préparer un long-métrage tout en ayant, au passage, tourné trois épisodes de Baraki, série de la rentrée sur la RTBF, et offert sa voix à la Schtroumpfette dans la version US de la version animée.

Le large sourire de Céline Leroy (anorak fuchsia sur la photo), qui prend le relais ensuite, masque beaucoup de souffrances. À l'âge de tous les rêves (21 ans), on lui découvre (non sans mal) une spondylarthrite ankylosante, maladie inflammatoire touchant notamment la colonne et le bassin. Deux années avec corset plus tard, elle contredit l'avis du corps médical en s'investissant dans la course à pied, puis le vélo. Qu'elle pratique depuis en super-endurance, enchaînant les cyclo-sportives les plus folles (genre sept cols des Alpes en 48 heures ou la triple ascension du Ventoux). Soutenue par diverses associations et marques, cette infographiste récolte des fonds pour la recherche contre les maladies rhumatismales. «Tant que je peux, je vis à 200% », résume-t-elle. Prochain défi? Elle se verrait bien tenter 350 bornes de la Voie bleue en deux jours. Rien ne l'arrêtera.

Sur la Moselle
Que faire à Épinal? Voguer sur la Moselle est une option. Kayak, canoë, pédalo ou paddle, il y a le choix au club nautique situé au cœur de la petite cité, laquelle s’enorgueillit d’un champion de France de kayak, en catégorie slalom extrême (elle sera au menu des JO de Paris en 2024). Le touriste, lui, peut s’essayer à diverses descentes sportives (et encadrées) qui semblent porter des noms de bières spéciales: la Magnifique, la Sauvage ou la Patrimoine.

Moustache
Moustache? Quel rapport avec des vélos? C’est bel et bien une marque de bécanes, lancée voilà dix ans par de doux rêveurs et qui s’est imposée comme la Rolls du vélo électrique, exportant un engin sur deux tout en restant monté dans l’agglomération d’Épinal, au cœur des Vosges. Doux rêveurs et visionnaires chanceux puisque le tourisme à vélo n’a cessé de se développer et que le Covid a fait exploser les ventes de vélo à moteur (50 000 Moustache vendus en 2020). Détail cocasse: les modèles portent des appellations en forme de date. Sur la photo, on voit des Lundi 26.
