Vaccin nasal: l’espoir d’éviter les transmissions
Lors de l’audition des experts à la Chambre, mercredi, il a été question du vaccin nasal, plus efficace pour éviter les contagions. Où en est la recherche?
Publié le 28-01-2022 à 06h00
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"Il faut faire attention aux effets d'annonce, dans le secteur pharmaceutique comme ailleurs", tempère Michel Goldman, professeur d'immunologie à l'ULB. Tout prometteur qu'il soit, le vaccin nasal anti-Covid n'est pas encore prêt à débarquer sur le marché. Sur les quelque 200 vaccins en développement, une petite dizaine seulement ciblent directement les voies nasales. Certains sont en phase d'essais cliniques, et donc testés sur l'homme, notamment en France par LoValTech, société créée à cette fin et qui estime qu'elle pourrait commercialiser son vaccin fin 2023, début 2024.
L'horizon est lointain, mais il est encourageant, car il pourrait changer la donne face à la pandémie de Covid. "On y met beaucoup d'espoir pour pallier les vaccins actuels qui, s'ils sont efficaces pour éviter les formes graves de la maladie, empêchent très mal la transmission. On a effectivement besoin de vaccins qui induisent des barrières au niveau des muqueuses", souligne Michel Goldman.
Être vacciné, en effet, à l’heure actuelle, ne signifie en rien que l’on ne peut pas contaminer d’autres personnes. Les masques, le gel hydroalcoolique, la distanciation sociale, les contacts réduits avec les aînés et les plus fragiles… tout cela garde son utilité. La différence du vaccin nasal c’est que, en ciblant directement la "porte d’entrée" du coronavirus respiratoire, il l’empêche de s’y multiplier, et serait, lui, capable de bloquer la transmission virale. Une efficacité validée dans les essais précliniques sur les animaux, affirme l’équipe de l’UMR INRAE-Université de Tours qui, dès 2020, a initié et conduit les recherches menant à la création récente de LoValTech pour la production.
Trop tôt pour Omicron
"Les tests précliniques menés en laboratoire démontrent l'efficacité du vaccin candidat après deux immunisations par voie nasale espacées de 3 semaines, tant en termes de réponse immunitaire précoce du virus original que de ses variants, bloquant tout risque de contamination par un individu vacciné", expliquaient les chercheurs en septembre.
"Il est encore trop tôt pour se prononcer sur Omicron", explique aujourd'hui la directrice de LoValTech. Les essais se poursuivent en ce sens. Mais l'autre avantage du vaccin nasal développé par la biotech française, c'est que le spray n'intègre pas uniquement la protéine Spike utilisée dans tous les vaccins, mais d'autres protéines virales qui, contrairement à la Spike, ne sont pas soumises à des mutations qui nuiraient à son efficacité sur les variants à venir du SARS-CoV-2.
Le candidat vaccin suscite, disent les chercheurs, non seulement une immunité mucosale, mais aussi systémique, circulante, à la fois sous forme d’anticorps spécifiques et de lymphocytes T et B (immunité cellulaire).
Utilisé contre la grippe
Techniquement, le vaccin nasal serait administrable à l'aide d'un petit adaptateur placé au bout d'une seringue sans aiguilles. Mais d'autres formes de spray sont possibles. L'équipe française s'est basée sur l'expertise dans le développement d'un candidat vaccin destiné à protéger les singes de la toxoplasmose. Mais un vaccin nasal existe déjà pour l'être humain. Il s'agit d'un vaccin contre la grippe, à virus vivant atténué. "C'est à ma connaissance le seul approuvé mais je ne pense pas qu'il soit beaucoup utilisé en Belgique", explique Michel Goldman. Ce vaccin nasal est surtout destiné aux enfants (plus effrayés par une injection) mais en Belgique, pour la grippe, on ne vaccine guère que les enfants immunodéprimés ou qui risquent de développer des formes graves.
Contre le Covid, il reste donc "toute une série d'étapes à franchir, pour montrer que c'est efficace, qu'il n'y a pas d'effets secondaires", poursuit le professeur d'immunologie. "De grandes firmes se sont cassé les dents sur un vaccin Covid. Et puis il faudra voir quels seront les virus en circulation quand le vaccin sera disponible. C'est le problème qu'on a aujourd'hui. Nos vaccins ne sont pas bien adaptés au virus Omicron. L'explosion des contaminations le montre bien."
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