Les dernières paroles du sage Paul Simon
À 81 ans, Paul Simon n’a plus rien à prouver. Mais il lui fallait peut-être une ultime œuvre pour mettre un point final à une carrière incroyable.
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Publié le 20-05-2023 à 08h00
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Il l’avait juré haut et fort lors de sa dernière tournée en 2018, Paul Simon raccrochait la guitare. À 76 ans, il en avait assez du rythme des tournées et la mort de son guitariste adoré, Vincent Nguini, quelques mois auparavant, lui avait donné un sacré coup au moral.
C’est donc très serein qu’il avait dit au revoir à son public, notamment lors d’un concert épique à Forest National. Un au revoir et non un adieu parce que s’il mettait un terme aux tournées, Paul Simon promettait toutefois de continuer à faire de la musique, d’expérimenter et, qui sait, de sortir un disque de temps à autre.
La pièce manquante ?
Et ce disque, il est là ! Sorti hier, Seven Psalms va bien au-delà du simple album: conçu à partir d’une vision dans un rêve, il pourrait bien être la pièce manquante et définitive à une carrière phénoménale. "Le 15 janvier 2019, j’ai fait un rêve qui disait: “Tu travailles sur un morceau qui s’appelle Seven Psalms”. Ce rêve était si intense que je me suis levé et je l’ai écrit. Mais je n’avais aucune idée de ce que cela signifiait. Petit à petit, les informations sont arrivées…", expliquait-il il y a quelques semaines dans un communiqué annonçant l’arrivée de l’album.
Certains artistes vieillissants ou malades trouvent dans l’écriture un moyen de boucler une longue boucle. Mais cet ultime disque arrive parfois avec un peu de retard. On se souvient par exemple du mystérieux et presque prémonitoire Black Star de David Bowie, sorti le jour du 69e anniversaire de l’artiste et seulement 48 heures avant sa mort.
Paul Simon, lui, a on l’espère, largement anticipé ses derniers jours mais, avec Seven Psalms, il dévoile la fragilité, les espérances et cette part de noirceur qui parfois se cachent en nous.
La spiritualité a toujours occupé une part importante de l’œuvre de Simon. Que ce soit avec Bridge over Troubled Water ou Mother and Child Reunion (sur l’album Paul Simon) ou plus récemment avec l’album So Beautiful or So What, Paul Simon a souvent exploré son rapport à Dieu et à l’au-delà. Mais cette fois, il n’use plus de métaphores et semble vouloir regarder son destin en face. Notamment sur l’émouvante dernière partie de ce long morceau de 33 minutes, Wait, qu’il entame par un "Wait, I’m not ready, I’m just packing my gear. My hand is steady, my mind is clear", ("Attends, je ne suis pas prêt, je suis en train d’empaqueter mes affaires. Ma main est sûre, mon esprit est clair").
Dernières confessions
Difficile d’imaginer, à la fin de l’écoute de ce Seven Psalms que Paul Simon signera un autre disque: l’artiste semble y coucher ses dernières confessions et appréhender la fin de sa carrière avec la sérénité qui sied au devoir accompli.
Bouleversant, drôle parfois, toujours lumineusement mis en musique même si la voix tremble parfois un peu, ce Seven Psalms a tout de l’œuvre testamentaire voire funèbre. Comme un point final venant signer l’une des carrières les plus riches et créatives de ses soixante dernières années.
"Seven Psalms", Sony.