Disparition de Marcel Amont: "C’est quelqu’un que je n’ai jamais vu ne pas sourire ou être gentil avec les gens", dit Jacques Mercier
Animateur de multiples émissions à la RTBF entre 1963 et 2008, Jacques Mercier était tout indiqué pour nous parler de Marcel Amont, qu’il a reçu quelques fois à la RTBF.
Publié le 09-03-2023 à 12h52 - Mis à jour le 09-03-2023 à 15h55
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"Mais le premier souvenir que j’ai de lui, c’est au music-hall à Mouscron, lorsque j’étais adolescent ou jeune adulte. Les artistes français y venaient car le patron de la salle gérait également une grande salle à Lille. Je trouvais cela passionnant. C’était le music-hall d’avant, où il y avait plein d’autres numéros qui se succédaient. Et lui, ce n’était pas l’artiste avec sa guitare dans un halo de lumière, il devait bouger, il se déguisait… Il faisait rire tout le monde avec Le Mexicain , il s’en donnait à cœur joie."
La preuve dans cet extrait du JT de la RTB retrouvé par la Sonuma, où il est interrogé avant son spectacle à l’Ancienne Belgique.
Si aujourd’hui on retient les trois gros succès de sa carrière – Bleu, blanc, blond (1959), Un Mexicain (1959) ou Le chapeau de Mireille (1974), "seule chanson que Brassens a écrite pour quelqu’un d’autre" – Marcel Amont avait un répertoire riche de plus de 850 chansons, parmi lesquelles figuraient aussi quelques reprises comme L’eau vive (de Guy Béart), Marinella (de Tino Rossi), Le plus beau tango du monde (Alibert et Mireille Ponsard)… Mais il avait également de très jolis textes personnels.
"Entre mes 13 et 18 ans, j’ai écrit tous les jours ce que je vivais dans un cahier, indique Jacques Mercier. Et Marcel Amont était l’un des chanteurs dont je réécrivais les textes. J’avais fait ça pour Bleu, blanc, blond (NDLR: adaptation de True, true happiness de Johnny Tillotson) et aussi pour Les bleuets d’azur sortie en 1960. C’étaient des chansons douces sentimentales qui me plaisaient beaucoup, sans doute plus qu’Un Mexicain ou Escamillo que l’on voyait à la télé dans l’émission 36 chandelles chez Jean Nohain. Une autre chanson de son répertoire qui m’a beaucoup frappé, car elle était fort originale, c’était Monsieur le commissaire principal, où il scandait les paroles, ce qui fait un peu penser au rap d’aujourd’hui. Cela n’a pas été un tube, mais c’était bien."
Marcel Amont était de la génération d’Annie Cordy, Charles Aznavour, Bourvil ou encore Line Renaud qui savaient autant chanter que jouer la comédie ou danser. Il affichait toujours un optimisme à toute épreuve et une énergie incroyable malgré son âge plus que respectable. "C’est quelqu’un que je n’ai jamais vu ne pas sourire ou être gentil avec les gens. C’était vrai sur scène ou lors des interviews mais aussi dans la vie de tous les jours. Quand je le recevais, on parlait souvent de jazz ensemble. Et quand moi ou un autre abordions sa bonne humeur, il répondait que c’était parce qu’il était né un 1er avril. Cela l’amusait beaucoup."
Comme Hugues Aufray, dont il était l’aîné de quatre mois, Marcel Amont est toujours resté très actif. Lors d’une récente interview dans L’invité sur TV5Monde, il disait vouloir chanter jusqu’à l’âge de 100 ans. Il avait été à l’affiche de la tournée Âge tendre, la tournée des idoles entre 2008 et 2010 ainsi qu’en 2016 et 2017 pour le dixième anniversaire.
Il écrivait régulièrement – il avait publié son 10e livre Mirlitontaines et chansons oubliées et un premier roman, Adieu la belle Marguerite, en 2021 – et était aussi actif sur les réseaux sociaux, donnant régulièrement de ses nouvelles sur Facebook. Il militait aussi contre le jeunisme ambiant.
"Je ne peux que souscrire, rit Jacques Mercier. Forcément, les modes changent, les styles changent, les mœurs… Mais ce n’est pas une raison pour mettre de côté ceux qui ont fait une carrière et qui peuvent continuer. Marcel Amont avait gardé une âme de gamin. Je me souviens d’une émission en télé qu’animait Jean-Pierre Hautier où l’on repassait des extraits de chacun où l’on repassait mes éternels fous rires avec Armelle et il pleurait de rire. Il restait très ouvert, très attentif…"
Contrairement à Annie Cordy ou Line Renaud, Marcle Amont n’a pas su rester dans la lumière. "Je crois qu’il était très typé music-hall, gags… Ses chansons douces étaient considérées comme sentimentales, avec du violon… Il aurait fallu qu’il change complètement de style. Gilbert Bécaud (NDLR: son aîné de deux ans) a lui aussi disparu dans les années 80. Si on n’évolue pas dans le temps, c’est difficile. Ou alors on fait comme Adamo, qui a maintenu son cap envers et contre tout. Dès ses débuts, il était à contre-courant et il fait sa carrière là-dessus."