Décès de François Hadji-Lazaro, fondateur du punk à textes avec les Garçons Bouchers
Le leader du groupe Pigalle et des Garçons bouchers, François Hadji-Lazaro, est décédé à 66 ans, après avoir marqué l’histoire de la scène alternative rock française.
Publié le 26-02-2023 à 20h19 - Mis à jour le 26-02-2023 à 20h35
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Le musicien François Hadji-Lazaro est décédé "samedi vers 23 h 55", a affirmé à l’AFP une responsable de sa maison de disques Universal France.
Le chanteur de Pigalle "avait des problèmes de santé depuis quelque temps" et est décédé à l’hôpital d’une septicémie, a précisé à l’AFP son proche collaborateur et saxophoniste, Stef Gotkovski, louant "un musicien hors pair, et très créatif."
Sa voix gouailleuse de titi parisien restera attachée pour le grand public au tube des années 1990, Dans la salle du bar-tabac de la rue des martyrs, chronique des rades de la capitale à une époque où, dans les bas-fonds de Paris, on peut encore "tout acheter tout vendre/le meilleur et le pire".
Instituteur puis chanteur
Gamin du XVe arrondissement, contaminé par la musique en écoutant Dylan, cet autodidacte à la carrure d’ogre au crâne lisse, chanteur multi-instrumentiste, parolier et compositeur, maîtrise la guitare, mais aussi le banjo, l’accordéon, le violon, la cornemuse, ou la vielle…
C’est évidemment dans les couloirs du métro que ce Parigot jusqu’au bout des ongles trouve son premier public. Il abandonne son métier d’instituteur pour se lancer dans la musique. Fréquentant les mêmes bars et trinquant avec d’autres fondateurs du punk à texte comme les Wampas, ou Bérurier Noir, il racontera sa vision nocturne de la capitale dans les chansons de son groupe Pigalle, mêlant guitares hurlantes et écriture soignée, sourire et spleen.

La pochette de l’album phare du groupe ( Regards affligés sur la morne et pitoyable existence de Benjamin Tremblay, personnage falot mais ô combien attachant, 1991) sera croquée par un autre amoureux de Paname, le dessinateur Tardi.
"Nous revendiquons nos racines françaises même si le rock fait partie de nos racines: on aurait tort de rougir de la chanson française", déclare en 1988 à l’AFP François Hadji-Lazaro, à propos de l’alliance de rock et de chanson réaliste qu’il prisait.
Il fondera également les Garçons Bouchers, auteur de l’anti-tube de l’été La Lambada on n’aime pas ça (1990) et d’une reprise punk de Viens voir les musiciens de Charles Aznavour.
Patron de label, avec Sttellla en vitrine
Son empreinte musicale va au-delà de ses propres chansons. En 1985, il fonde la maison Boucherie Productions, pour tenter d’arracher le rock alternatif à la marginalité, sans se compromettre pour autant avec le show-biz.
En 1988, après un concert à Montréal, il signe le groupe belge Sttellla. Après la sortie d’une compilation, la carrière du groupe bruxellois fondé par Jean-Luc Fonck et sa compagne Mimie va décoller. L’album L‘avenir est à ceux qui s’éléphanteau sorti en 90 reçoit un écho favorable en France. Mais le meilleur est encore à venir, avec le tube Torremolinos qui paraît en 1992 sur l’album Manneken pis not war/Faisez la mouche pas la guêpe.
Le label donnera sa chance à de nombreux groupes indépendants avant de déposer le bilan en 2001, non sans avoir produit une centaine d’albums et couvé les débuts d’artistes alors balbutiants comme la Mano Negra, dont il publiera en 1988 le premier simple ( La Zarzamora) et le premier album ( Patchanka).
Engagé à gauche, amateur de vin, François Hadji-Lazaro s’était aussi lié d’amitié avec l’intellectuel Roland Topor, sortant même un album François détexte Topor. Ses albums solos, plus récents, lorgnent plus du côté de la chanson rock.
Son physique de colosse à bretelles, crâne lisse et visage rond, a aussi tapé dans l’œil de réalisateurs, qui lui ont confié des seconds rôles ou de la figuration: il colle parfaitement à l’ambiance de La cité des enfants perdus de Jean-Pierre Jeunet, et apparaît notamment dans Le Pacte des Loups. Il a également composé des musiques de films.
François Hadji-Lazaro avait fini par rejoindre la major Universal. Ces dernières années, l’ancien instituteur, père de deux enfants, s’était mis à décoiffer le jeune public, avec des livre-disques et des spectacles, intitulés notamment Pouët (2016) et Atchoum (2018).