Interview: le rappeur JeanJass a sorti son deuxième album solo
Sur Doudoune en été sorti vendredi 17 juin 2022, le rappeur carolo nous propose dix titres, fait sans pression et qui synthétise l’ADN authentique de l’artiste.
Publié le 23-06-2022 à 10h00 - Mis à jour le 23-06-2022 à 10h09
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Rappeur, compositeur et animateur d’une émission sur le cannabis, à 34 ans JeanJass est un artiste aux nombreuses casquettes. Avec le rappeur bruxellois Caballero , il forme un duo expert en punchlines, incontournable de la scène rap francophone de ces dernières années. Vendredi 17 juin, Jassim de son vrai nom, a sorti son deuxième projet solo Doudoune en été . Entre son amour des belles images, du rap et du cannabis, sa paternité récente et son affection pour les festivals, nous avons échangé avec JeanJass autour de son album et de son actualité. Rencontre.
Dans quel contexte trouvez-vous l’inspiration pour écrire?
J’écris partout, je suis très inspiré par les transports. J’ai beaucoup écrit dans les trains quand je vivais entre Charleroi et Bruxelles mais j’ai la chance de ne jamais connaître de pannes, du coup je pratique. C’est comme une gymnastique, c’est comme le sport, j’en fais un peu tous les jours. J’écris sur téléphone mais j’écris aussi beaucoup de tête, je fais des quatre mesures dans ma tête, quand ils sont clairs je les couche sur téléphone. Je peux aussi enregistrer des notes vocales partout où je suis.
Vous êtes à la production de la plupart des morceaux sur l’album, c’était une volonté de votre part de le faire quasiment tout seul?
Ça s’est fait de manière assez naturelle, je reviens petit à petit à quelque chose de plus personnel dans ma musique. Au début je ne rappais quasiment que sur mes instrus puis au fil de mon parcours j’ai commencé à rencontrer des tas de compositeurs extrêmement doués et c’est ma curiosité qui m’a poussé à travailler avec eux. Je pense que dans la musique que je fais en solo, la meilleure manière de la rendre unique c’est de partir de ce que je fais moi. Toutes les personnes impliquées sont des gens que je connais, avec qui j’ai créé des liens. Par exemple la prod de Eazy Dew, le morceau qui s’appelle Gratuitement , c’est une instru que j’ai dans mon ordi depuis 4 ou 5 ans. Je l’ai toujours trouvée intéressante et puis un jour je suis retombé dessus et ça m’a inspiré ce truc. Il y a très peu de recettes dans ma manière de faire, c’est très au feeling.
Comment s’est fait le casting des rappeurs invités sur le projet?
Youssoupha, je le connaissais bien sûr de réputation mais je ne le connaissais pas personnellement et j’avais envie d’avoir un rappeur comme lui qui pour moi a marqué une époque. C’est une des plus belles plumes du rap français à mes yeux.
Jazzy Bazz on se connaît depuis quelques années et on fait partie de la même génération, Nous avons déjà croisé le micro de nombreuses fois et il était temps de proposer quelque chose de plus qualitatif, de moins “freestyle”, j’en avais envie.
Fuku c’est un rappeur de ma ville, un jeune que je trouve extrêmement talentueux et qui j’espère va être le prochain gros nom de Charleroi.
Et Tuerie je suis vraiment tombé amoureux de son projet qui s’appelle Bleu Gospel . On ne s’est pas encore rencontrés en vrai mais on se parle énormément vu qu’il est papa aussi, on a beaucoup de sujets en commun. C’est marrant parce qu’on dirait des gens qui se connaissent bien, on a fait un morceau un peu niche, un peu particulier. C’est la magie d’internet, c’est facile, on peut faire les choses très rapidement.
Pourquoi avoir choisi ce titre Doudoune en été?

J’aime les belles images et j’aime beaucoup ce côté paradoxal. Mon premier groupe s’appelait Exodarap (anacyclique de paradoxe, N.D.L.R.) , c’est quelque chose qui m’a toujours parlé. L’expression Doudoune en été, je la trouve stylée et facile à retenir. Ça m’a donné cette idée de Cover que j’ai fait avec Raegular, dont je suis très fier. Et je suis moi-même un gros collectionneur de doudounes, donc ça fait partie de tout le truc “je veux faire quelque chose qui me ressemble”. La planète Terre elle-même a décidé d’assurer ma promotion avec les températures de vendredi.
Sur Roberto Baggio vous dites être un "perdant magnifique", ça représente quoi pour vous?
Parfois les perdants magnifiques, on s’en rappelle plus encore que les gagnants, c’est le côté épique et tragique. Le film qui illustre le plus le perdant magnifique c’est L’impasse , c’est un classique de Brian de Palma et je suis fasciné par ce personnage. J’espère être magnifique mais j’espère ne pas être un perdant, (rires) ce sont les images que j’adore. Roberto Baggio, c’est un héros du romantisme footballistique. Moi je viens de Charleroi et c’est un peu l’Italie. La plupart de mes amis sont italiens, c’est pour ça que j’ai des trucs qui finissent comme Pippo Inzaghi ou Roberto Baggio.
Devenir papa a-t-il changé votre manière de travailler votre musique?
Moi je ne m’en rends pas compte mais c’est clair que mes journées tournent autour du bébé. Ça donne un énorme coup de boost dans le sens où il y a une bouche à nourrir. Tous les matins quand je me lève, il y a un petit être vivant qui me sourit, qui est heureux de me voir. Ça met ta jauge de motivation au maximum. Je n’ai pas fait un morceau sur ma fille et à part dire “je t’aime” pendant trois minutes, ce qui serait absolument nul et chiant, je ne saurai pas quoi dire.
Quels sont vos passe-temps quand vous n’êtes pas en train de faire de la musique?
Je suis passionné par les dinosaures, dès que je rentre je vais aller voir Jurassic World, même s’il est nul c’est pas grave. Je suis passionné de football et de bouffe aussi. J’adore cuisiner, je regarde des vidéos où les gens font des pâtes ou de la paella toute la journée. Après je suis quelqu’un de très curieux, il y a plein de choses qui m’intéressent. Montréal est une ville que j’adore par exemple, rien que d’écouter les gens parler, demander ce que veut dire telle expression. J’ai la chance de pouvoir voyager avec le rap donc je prends tout ce qu’il y a à prendre, tant que ça fonctionne je me régale.
Avec Caballero vous avez tourné en mai la saison 4 de votre émission sur le cannabis High et fines herbes. Quels sont vos objectifs avec ce projet?
L’objectif à chaque fois, quand on regarde l’évolution d’une saison à l’autre, c’est plus de budget, plus d’idées, plus d’invités… et plus de beuh aussi (rires) . C’était extrêmement drôle à faire. On a réussi à ramener des gens hors rap cette fois-ci, c’est une belle aventure. La plupart des gens qui m’arrêtent dans la rue c’est pour me parler de High et fines herbes, ça prend des proportions énormes. Le cannabis c’est autant quelque chose d’universel que la musique, il touche plein de couches de la population, Il n’y a pas que les fumeurs que ça intéresse. Beaucoup de non-fumeurs viennent dans notre émission.
C’est aussi une émission de cuisine, cette fois-ci on a invité un chef reconnu. C’est notre côté un peu épicurien, essayer de profiter des bonnes choses, et c’est surtout un prétexte pour faire de la musique, pour rencontrer des gens. C’est quelque chose qu’on prend beaucoup de plaisir à faire, on s’inspire de toutes nos notions d’humour qu’on adore, ça peut partir des Nuls, des Inconnus mais aussi des gens comme Key & Peele aux États Unis. C’est quelque chose qui je pense finira par nous dépasser. Je vais certainement finir en ambassadeur du cannabis, plus que rappeur, j’en mets ma main au feu. C’est comme le monde de l’oenologie, à partir d’un certain stade, tu ne rencontres que des gens passionnés. Le cannabis a ce côté sombre, un peu rabaissant, là c’est comme si tu voyais des gens parler de grands vins.
Vous serez sur la scène du festival Couleur Café à Bruxelles vendredi 24 juin. Pourquoi avoir choisi ce festival?
Pour moi c’est LE festival bruxellois. Mes parents se sont rencontrés à Bruxelles, ma mère est une pure Bruxelloise, donc même pour ma famille c’est cool de pouvoir jouer à Couleur Café. Ils sont tous très contents de venir et de manger des petits plats congolais. C’est un festival avec une âme, il y a toute une ambiance à Couleur Café que tu ne retrouves pas dans les autres festivals bruxellois. On doit faire des choix, là on fait Dour et Couleur Café. Ça aurait pu être les Ardentes aussi mais au niveau sentimental, c’est les deux avec lesquels il y a le plus de liens affectifs.