Fishbach passe à l’offensive
"Avec les yeux", second album pour la Française Fishbach, révèle une plume intemporelle et unique en son genre.
Publié le 16-03-2022 à 06h00
Avec une élégance infinie, Fishbach revient cinq ans après des débuts prometteurs. Avec les yeux, son second album ondule sur des sonorités un peu vintage, proches des années 80, une période qu'elle affectionne particulièrement. "J'écoute des musiques de toutes les époques mais c'est vrai que la musique des années 80-90 me parle beaucoup, explique-t-elle. Il y a une forme d'audace dans cette période: les mecs pétaient des câbles, c'était la fin des Trente glorieuses et les gens voulaient profiter, ils voulaient s'amuser. C'est cette insouciance et cette joie que j'ai voulu retrouver dans cet album."
L'adolescente rebelle qui exultait sa colère dans le punk continue d'utiliser la musique comme une thérapie. "Ça me permet d'envoyer les messages que je ne peux pas envoyer autrement. Il y a des choses que je ne peux pas expliquer dans la vie alors je le fais avec des chansons."
Cultivant le mystère de son personnage, Fishbach prolonge le suspense jusque dans ses textes ambivalents. "J'adore les paradoxes et je pense que l'humain est un paradoxe. Les artistes ont cette chance: tous les soirs, on chante nos troubles intérieurs, on étale nos sentiments… Qui peut faire ça au boulot? Personne! Mais pour garder une part de mystère, comme vous dites, je joue sur les mots. Mes textes ont volontairement plusieurs lectures. À part Dans un fou rire, où j'avais besoin de dire quelque chose de très concret sur notre rapport aux écrans qui m'agace, mes autres textes sont plus flous."
Sans limites
Musicalement parlant, Fishbach ne s'interdit rien. "Peut-être bien que je ferai un morceau country, un jour ou encore mieux: du zouk! (rires)"
Entre mélodies pop (Démodé, De l'instinct) et funkys (Masque d'or) ou solos de guitare bien crasseux (Nocturne), elle s'amuse et semble butiner de-ci de-là et ne faire que ce qui lui plaît. "J'adore les cordes des guitares. D'ailleurs la voix c'est une autre corde et j'aime l'utiliser comme une guitare électrique. Et c'est le truc le plus sexy et le plus féminin qui soit. C'est une femme fatale. Elle est jouée par des mecs avec des gros bras mais c'étaient quand même des mecs avec des cheveux longs, des talons et du maquillage…"
D'ailleurs sa voix est un atout de taille avec laquelle elle joue à l'infini. "Au début, je hurlais fort parce que mon comparse de l'époque jouait de la batterie assez fort et il fallait qu'on m'entende mais plus les années passent et plus je cherche la nuance et la douceur."
Ses textes forcément personnels déploient pourtant une force universelle grâce notamment au jeu qu'elle introduit dans chaque ligne de ses textes. "Ce disque est beaucoup moins amoureux que le premier qui d'ailleurs ne s'appelait pas À ta merci pour rien! Là il y a plus d'introspection, c'est plus un dialogue avec moi-même. C'est lié à mon âge: à ta merci je l'ai écrit entre mes 20 et mes 25 ans. Aujourd'hui, j'ai 30 ans et c'est le moment du premier bilan."
En concert à l’AB, le 25/03