Eve Beuvens, la géographie intérieure d'une pianiste
Eve Beuvens sort un album solo tout en atmosphère, intimiste et mystérieux où se révèle une sensibilité d’une grande finesse. Entretien.
- Publié le 11-09-2021 à 06h00
Aucun effluve de notes, de passage virtuose, tout l'art d'Eve Beuvens réside en sa capacité à transmettre des émotions par la délicatesse, la finesse de son toucher qui nous plonge dans son univers à la fois simple et imagé. Des images que les titres des compositions inspirent, et que la pianiste laisse à l'appréciation de l'auditeur sur un titre: You Own Title to this Song.
Ce solo est né en Gaume lors du festival 2019 où Jean-Pierre Bissot vous avait proposé cette formule. Comment a-t-elle évolué sur l’album?
Sur le disque, on s’engage vers quelque chose d’assez mystérieux. Lors du concert, j’avais inséré plus de standards, j’avais tablé sur des contrastes plus forts. Sur les huit morceaux que comporte le disque, trois sont nouveaux, les cinq autres, je les avais déjà pour le concert au Gaume.
Dans quel esprit vous êtes-vous lancée dans cette formule du solo?
Assez introspectif, je dirais. En termes de démarche et d’esthétique, c’est évidemment un album plus personnel que ce que j’ai fait avant, c’est un solo, plus profond. En général, j’aime que les choses se suggèrent d’elle-même plutôt que de les imposer.
Peut-on parler d’album concept?
J’ai cherché une unité, une cohérence en termes de structures et de couleurs, quelque chose qui soit à la fois organique et contrasté. J’ai plus fonctionné comme un artisan ou comme un cuisinier qui élabore son menu en goûtant ses plats l’un après l’autre.
Comment naissent les compositions?
Rain Drops Moving on a Window, Phagocyte et Auditorium de Ténérife ont été composés à partir d'impros que j'avais faites après des séances de méditation desquelles avaient jailli certaines images. Rain Drops Moving on a Window, par exemple, c'est le souvenir d'un voyage en train un jour de pluie avec les gouttes qui glissent sur la vitre qui bougent, qui s'éloignent puis se rejoignent.
Il y a deux reprises, une d’Ellington et l’autre de Dolly Parton.
En fait, la version de Caravan est née d'une improvisation qui à un moment donné devient le thème d'Ellington, l'idée de départ n'était pas de la jouer, ça s'est imposé de soi-même. Quant à Jolene, j'ai été inspirée par la version d'une chanteuse norvégienne, Susanna and the Magical Orchestra. J'en ai fait quelque chose qui tourne un peu autour d'Avro Pärt.
Vous donnez deux concerts pour la sortie du disque.
Je vais jouer à Bozar le 22 septembre et le 29 au Delta à Namur avec une danseuse et un quatuor à cordes en invités. Bozar m’a proposé d’élaborer quelque chose de différent du programme du disque. J’ai donc décidé d’arranger certains morceaux pour les cordes et d’ajouter du mouvement en invitant une danseuse.
«Inner Geography», IGLOO Rec. Concerts à Bozar le 22 (tél: 025078200) et au Delta à Namur le 29 (tél: 081776773)