INTERVIEW | Julien Doré, l’homme libre
«aimée», le 5e album de Julien Doré est devenu n°1 dès sa sortie. Mais là n’est pas l’essentiel.
Publié le 10-09-2020 à 18h55
/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/FBWOIYW6TVBZ3DFAVOTLL32EOM.jpg)
Julien Doré peut placer le mot cacahuète dans une chanson romantique et y intégrer les aboiements de ses chiens Simone et Jean-Marc. Il peut se moquer de lui-même, vous coller des refrains tenaces en tête. Tout ça, sans radiner sur la poésie et en distillant un message écologiste et féministe dans son album. Rien que ça. aimée, tout en minuscules, son album préféré, le plus osé, dit-il.
Sur Facebook, vous dites que c’est votre album préféré. Mais les artistes disent toujours ça: leur dernier album, c’est le meilleur…
C’est vrai que ça serait étrange de dire celui-ci, je ne l’aime pas. Mais celui-là, je l’aime beaucoup parce que j’ai changé ma manière de fonctionner. J’ai voulu prendre le temps, ouvrir grand les fenêtres pour faire entrer de l’air frais sur ce que j’avais déjà fait. J’ai pris une liberté totale sur la musique, les textes. C’est pour ça que cet album me fait autant de bien. Parce que j’ai réussi à ne pas m’endormir sur ce que j’avais fait.
Une liberté que vous n’auriez pas osée plus tôt?
C’est l’aboutissement de plein de choses. De mon déménagement (il a quitté Paris pour retourner dans les Cévennes, sa région natale, NDLR), de deux ans et demi de silence total. Cette mise à distance m’a fait beaucoup de bien. Ce regard que j’ai sur le monde, je l’ai depuis longtemps, mais la capacité à en faire des chansons, il a fallu tout ça.
Ce regard que j’ai sur le monde, je l’ai depuis longtemps, mais la capacité à en faire des chansons, il a fallu tout ça.
Aimée, c’est le prénom de votre grand-mère. Alors pourquoi insister sur le fait d’écrire le titre, «aimée» en minuscules?
L’album était fini bien avant le confinement, mais je n’avais pas de titre. Et puis le prénom de ma grand-mère qui va bientôt avoir 100 ans m’est apparu à l’écrit. Ma grand-mère que je ne pouvais pas voir. J’ai voulu lui rendre hommage, à elle et à son parcours de militante. Et puis «aimée», c’est un mot de notre langue qu’on voit souvent à l’impératif, à l’infinitif, comme un verbe. Moi je le voyais comme une phrase, comme tout ce qui pouvait être «aimée»… ma grand-mère, ma mère, la nature, l’enfance, la poésie… mais aussi la bière ou la pizza. J’ai rempli plusieurs pages.

Comment a réagi votre grand-mère?
Oh vous savez dans les Cévennes… et globalement dans ma famille, on est très pudiques. Elle a dit beaucoup de choses avec les yeux.
Même quand elle a vu la photo de son petit-fils tout nu dans l’album?
(rire) Je lui ai montré le montage que j’avais fait pour la présentation de l’album parce qu’il y a une photo d’elle avec ses camarades, qu’elle m’avait offerte. Et juste après, dans la vidéo, il y avait l’autocollant de moi tout nu. Je crois qu’elle m’a vu suffisamment quand j’étais petit. Et puis, elle connaît l’humour de son petit-fils…
Julien Doré, «Aimée», Sony. Le 16 octobre 2021 à Forest National et le 21 janvier 2022 à la Rockhal (Luxembourg).