« Ça n’a pas plu à ma famille »
Le 5e album de Mika est le résultat d’une profonde remise en question. Et ça l’a libéré. Rencontre.
Publié le 04-10-2019 à 06h00
Sur My Name is Michael Holbrook, son cinquième album, Mika a choisi de clamer son nom, celui de sa carte d'identité, celui qu'il n'aime pas. Pour mieux se réapproprier celui qu'il a choisi et qui le représente comme artiste. «J'ai mené une réflexion assez intense et assez dure sur ma propre carrière, sur mon travail artistique. Je sentais qu'il y avait un besoin de remettre les choses un peu en ligne. Ma vie, mon écriture, ma voix, la perception de l'artiste, Mika…» Il dit qu'il savait que ça allait être long et difficile.
Il a passé un an sans rien écrire. Pas à cause d'un blocage, mais parce que «c'était trop important, je ne pouvais pas le faire superficiellement». C'était pour lui, la seule condition pour pouvoir écrire un album qui serait à la fois « touchant, personnel, unique, crédible pour pouvoir ouvrir la porte pour les prochaines… dix, vingt années de carrière».
Et puis, il y a eu Tiny Love qui ouvre l'album. Une chanson qui parle de confiance en soi. «Quand on a confiance en soi, on se comporte différemment, avec plus de tolérance, avec plus d'honnêteté, on se confronte à des sujets difficiles parce qu'on se sent valorisé.» Et ça change tout. Il dit qu'il s'est engagé émotionnellement et intellectuellement beaucoup plus, «parce que je me suis permis de le faire».
Il a voulu un album qui parle en temps réel de la vie, pas du passé. «J'ai perdu cinq personnes autour de moi, dont certaines qui étaient très, très proches. Quand le passé commence à s'écrouler et quand ce que tu considères comme ce qui te tient s'en va, tu dois assumer ta propre personne. C'était le moment de le faire. Je me dis que si je n'avais pas commencé ce processus il y a deux ans, maintenant je serais dans la merde.»
Des histoires personnelles douloureuses livrées sur un disque, ça n'a pas plu à sa famille qui l'a très mal pris: «Mon frère ne m'a plus parlé pendant des semaines. Ma sœur Paloma ne réagissait pas. Chaque fois que je disais «alors on en parle de cette chanson?», elle tournait les talons.»
En plus des chansons, il y a une longue interview dans Paris Match où il parle sans tabou de la maladie de sa mère, atteinte d'un cancer du cerveau. «C'est la femme qui m'a construit, je voulais la mettre en avant, vers la lumière. Pourquoi on fait toujours des trucs comme ça quand c'est trop tard? C'est quoi cette fausse pudeur? Quand ma famille a vu l'ensemble, ils ont réalisé que je le faisais vraiment avec une bonne intention… même s'ils ont mis quelques mois à comprendre. Je suis fier d'avoir fait ça, de parler de ça. Parce que c'est ça qu'on doit faire comme songwriter.»
Plus, mais moins
Et pourtant, quelque chose de joyeux se dégage de cet album. Et sur scène: «Ça danse, c'est fou!»
Il a gardé les décors géants, les lumières et enlevé le reste: les danseuses, les confettis, les écrans… «J'ai réalisé que je n'avais pas besoin de danseurs pour danser et que ça cassait le mur entre le public et moi. Maintenant, je danse comme eux. Je raconte à travers mon corps, je transpire, je suis imparfait. C'est encore plus intense, ça explose! J'avais dessiné un autre show. J'ai tout enlevé, c'était nécessaire. On a tout recommencé: dans mon équipe, ils étaient furieux! Mais je ne suis pas bête, j'ai un camion entier de lumières, plus de 150, c'est beaucoup pour une tournée. Pour moi les lumières sont extrêmement importantes. Elles doivent danser, comme la musique.»
Universal. En concert le 14 décembre à Forest national.