Depeche Mode : black spirit
Sur «Spirit», Depeche Mode s’inquiète de la tournure du monde. Et avec James Ford aux manettes, ils sortent un album oppressant et sombre.
Publié le 17-03-2017 à 05h00
Pas de concessions. Pour son quatorzième album studio, Depeche Mode hisse le drapeau noir, symbole de mort mais aussi de rébellion. Ce n'est pas pour rien si le single qui a lancé cet album s'intitule Where's the Revolution? Le trio anglais tape d'emblée sur le clou sur Going Backwards («Reculer») avec cette strophe: «Nous pouvons tout suivre avec les satellites, voir tout en clair, voir les hommes mourir en temps réel, mais nous n'avons rien à l'intérieur, nous ne sentons rien à l'intérieur.»
«On demande au monde où est passée l'idée révolutionnaire d'un esprit commun à tous? avance le, chanteur Dave Gahan dans une interview accordée aux Inrockuptibles. On devrait davantage explorer l'idée de rassemblement plutôt que celle de division. On vit dans un monde guidé par l'idée d'être plus fort ou plus riche que son prochain. Comme si séparer les autres était un but à atteindre.»
Spirit est donc un disque dense, sombre, oppressant parfois, qui fait définitivement oublier les mélodies pop des années 80 et 90. Cela fait d'ailleurs quelques albums que le groupe britannique n'est plus dans ce trip. Mais Spirit ajoute une couche de plus.
On doit le son de ce 14e album à James Ford, batteur des Last Shadows Puppets et membre du groupe electro Simian Mobile Disco. Il a aussi bossé avec les Arctic Monkeys.
«Il était en haut de ma liste, précise Dave Gahan, toujours dans la même interview. Il nous fallait à tous de nouveaux challenges avant que ça devienne ennuyeux. Quand je fais un album, je ne veux pas avoir la sensation de partir au travail.»
La voix de Dave Gahan est toujours aussi hypnotique. Puissante sur les plages phares, elle devient émouvante sur un morceau incantatoire comme Eternal. Hypnotique, c'est l'adjectif que l'on utiliserait aussi pour Cover me, morceau du milieu d'album coécrit par Gahan justement, et qui se termine par une longue mélopée synthétique. L'un des bijoux de cet album qui se termine sur Fail, titre qui ne respire pas la joie de vivre – «Nos âmes sont corrompues, nos esprits sont dérangés, nos consciences sont en faillite…» – chanté par Martin Gore, qui a écrit huit des douze chansons de Spirit. On se réjouit déjà de les voir à Anvers le 9 mai.
Depeche Mode, «Spirit», Sony Music. La version Deluxe contient 5 remixes.