Le Juif Arabe [CRITIQUE BD] – Des origines qui divisent
Dans un style sans fioritures, Asaf Hanuka raconte l’histoire de sa famille, issue d’une double culture juive et arabe. Et qui remonte à l’époque où les deux peuples vivaient, ensemble, sur ce qui sera ensuite Israël.
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- Publié le 20-07-2023 à 08h00
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STEINKIS | Asaf Hanuka, 96 p., 20 €

Un meurtre, ce n’est pas forcément le meilleur moyen de resserrer les liens d’une famille. Et pourtant, il s’agit bel et bien du point de départ du Juif arabe, un roman graphique étonnant dans lequel Asaf Hanuka, auteur israélien, remonte aux origines de la sienne.

Raconté sur plusieurs époques, il trouve son “épicentre” à Tibériade. Où son arrière-grand-père Abraham recueillit, en 1929, son futur beau-fils, Saul, venu à dos d’âne depuis le Kurdistan. C’est là qu’il épousera sa fille, Léah. Et c’est là aussi que, sept ans plus tard, le même Abraham sera assassiné par Ben-Tsion, un jeune gamin d’origine arabe qu’il avait recueilli en secret, et qui avait été gagné par un radicalisme ambiant.
C’est, du moins, ce que raconte la légende familiale, qu’a donc interrogée Asaf Hanuka pour écrire un récit qu’il a voulu sans fioritures graphiques, au service de son sujet. Parce que la réalité, on s’en rend compte assez rapidement, est plus complexe qu’il n’y paraît : les versions varient selon les points de vue. Un imbroglio qui se veut assez symbolique, finalement, de la confusion qui règne, aujourd’hui, autour de la question israélo-palestinienne.
C’est notre pays et on n’en a pas d’autre
Au-delà de cet embrouillamini familial, Le juif arabe permet même d’en démêler quelques fils. “Cette histoire, confiait l’auteur à Télérama début juillet, n’a rien à voir avec ce qu’on apprenait au lycée en Israël, à savoir que dans le désert où l’on a construit l’État d’Israël il n’y avait rien.”
Son album vient prouver le contraire. Montre, au risque de choquer les esprits les plus étroits, que les cultures juive et arabe y étaient inextricablement mélangées – et qu’il n’y a pas de raison qu’elles ne puissent pas continuer à l’être – bien avant la création de l’État d’Israël, en 1948.
Son arrière-grand-père, le fameux Abraham, était ainsi un juif de culture arabe. Un héritage que ses propres parents ont longtemps renié. “Une forme de reniement”, dit-il, au service de la cause sioniste. Car, comme le raconte son père malade au détour d’une planche : “C’est notre pays et on n’en a pas d’autre.”
