Ses crashes, ses drames, “Enquêtes” : le policier le plus connu de Belgique, Bertrand Caroy, à cœur ouvert
Le Premier inspecteur Bertrand Caroy a sorti ce mercredi 10 mai 2023 son autobiographie, “Dans l’angle mort”, dans laquelle il dévoile les coulisses d’une profession parfois mal comprise, ainsi que les drames qui l’ont ébranlé.
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Publié le 13-05-2023 à 04h00 - Mis à jour le 13-05-2023 à 08h35
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Il a toujours souhaité porter l’uniforme. Petit déjà, Bertrand Caroy prenait pour habitude d’enfiler la veste, le ceinturon et le képi de son père pour le carnaval de l’école. Une anecdote parmi d’autres qu’il dévoile dans son autobiographie intitulée Dans l’angle mort (Kennes Éditions). Chez les Caroy, “on est garde champêtre, gendarme ou policier de père en fils”, dit-il.
Après plus de trois décennies en uniforme, le Premier inspecteur Bertrand Caroy (53 ans), responsable du service Circulation routière de la zone de police boraine, ne mâche pas ses mots. Avec le franc-parler qui le caractérise, il aborde son enfance, ses drames (comme la mort de son frère, percuté et tué par un chauffard ivre), son métier de policier et les interventions dont il n’est pas sorti indemne. À la suite d’un accident, sa vie a changé. ” Je n’arrive plus à être passager” d’un véhicule aujourd’hui, insiste-t-il.
La Brasserie du Borinage jugée coupable dans le conflit qui l’opposait à Bertrand CaroyBertrand Caroy, pour quelle raison avez-vous décidé de publier cette biographie officielle, avec le journaliste Pierre Danvoye ?
En réalité, cela faisait déjà un moment que j’avais l’idée d’écrire un livre pour pouvoir expliquer au grand public pourquoi j’étais aussi impliqué dans la sécurité routière et dans mon travail de policier. Je voulais qu’on comprenne la personne que je suis. Celui qu’on voit à la télévision chaque mardi soir dans l’émission Enquêtes ou celui qu’on rencontre dans le privé, ce ne sont pas deux personnes différentes. Je suis le même. Je souhaitais donc qu’on puisse savoir qui je suis vraiment, mon parcours professionnel ou encore les drames que j’ai pu traverser. Et un jour, j’ai été contacté par une maison d’édition.
Vous parlez de drames extrêmement personnels. C’était important de rendre hommage à vos parents et à votre frère ?
Oui, tout à fait. Mes parents auraient été fiers de ce que j’ai pu réaliser comme carrière. Je trouvais important d’expliquer que la vie n’est pas toute rose, qu’elle ne fait pas de cadeaux.
Avec cette autobiographie, vous souhaitez aussi redorer l’image du policier, qui n’est pas là juste pour infliger des amendes ?
Tout à fait. J’ai énormément de respect pour ma profession. Je suis rentré dans la police par conviction. Le métier de policier n’est pas facile. Tous les policiers font bien leur boulot, mais le travail n’est pas évident. Mais après plus de trente ans de carrière, je viens toujours travailler avec le même amour du métier qu’au premier jour. Je ne me serais pas vu faire autre chose. Mais quand je vois à quoi la police est confrontée aujourd’hui, ce n’est pas évident. Le respect a un peu disparu au fil du temps. Il y a 30 ans, on avait du respect pour son instituteur, mais ça s’est perdu. C’est la même chose pour la police. Aujourd’hui, il est légion qu’on fasse un bras d’honneur à un véhicule de police. C’est dommage, parce que la police est là pour faire son travail, sauver des vies et n’est pas là pour se faire insulter et être confronté à ce genre de geste. Le citoyen doit comprendre que la police est là pour l’aider et n’est pas contre lui. La police, c’est une main tendue pour le citoyen. On n’est pas là pour lui prendre de l’argent mais pour l’aider. On doit travailler ensemble et pas l’un contre l’autre. D’ailleurs, quand on a des soucis, on est bien content de voir arriver les forces de l’ordre.
Les Orages de la vie : un épisode émouvant sur le passé douloureux de Bertrand CaroyVous semblez pessimiste quant à l’avenir de la police.
Comme je l’écris dans le livre, je ne suis pas trop optimiste pour l’avenir de la police. Pour plusieurs raisons. Il y a un important manque de moyens financiers pour acquérir du matériel, ainsi qu’un manque d’effectifs. Je ne parle pas de ma zone… […] La police fédérale est, elle, en sous-effectifs. La criminalité est en hausse et la police fédérale n’arrive plus à suivre. […]
À vos débuts, vous avez photographié les scènes de crime pour le pilier judiciaire, vous avez exercé comme motard escortant les VIP… Y a-t-il une autre fonction que vous auriez voulu exercer ?
Non. J’ai pu réaliser mon rêve d’enfant. Celui d’être motard. J’ai aussi pu faire de l’intervention.
Et vous êtes désormais l’un des visages de l’émission “Enquêtes”, chaque mardi soir sur RTL-TVI.
Je n’ai pas grandi avec l’obsession de devenir célèbre. Je n’imaginais pas devenir une star des réseaux sociaux. Je me serais parfaitement accommodé d’une vie dans l’ombre. Toutefois, je me suis retrouvé aux bons endroits, aux bons moments. On enregistre encore régulièrement pour pouvoir faire passer des messages très importants au public. Et on y arrive. D’ailleurs, les enfants et ados, qui sont les adultes de demain, viennent régulièrement me trouver pour faire un selfie. Cette émission permet de redorer l’image de la police et non celle de Bertrand Caroy. Je ne suis pas un meilleur policier qu’un autre.
”J’ai déjà lu que je faisais le malin à la télé…”
”Nous choisissons évidemment de diffuser (sur antenne, NDLR) le contrôle problématique, c’est celui-là qui va intéresser les téléspectateurs et nous permettre de faire passer un message”, écrit le Premier inspecteur. Les séquences sont donc choisies en fonction de leur intérêt éducatif. Certaines vidéos de ses interventions ont été vues par plus de 250 000 personnes sur YouTube. Sur Facebook, le groupe Fan Club de Bertrand Caroy totalise près de 55 000 membres. “J’ai déjà lu que je faisais le malin à la télé, que j’étais là pour verbaliser assidûment. J’imagine que certaines publications négatives ont été postées par des usagers que j’ai sanctionnés”, écrit Bertrand Caroy. Et parmi les anecdotes des escortes de personnalités qu’il a réalisées en tant que motard ? “Michel Fugain, les larmes aux yeux, m’a demandé de l’accompagner au restaurant après son concert.”
”L’émission a changé ma vie”, nous explique encore Bertrand Caroy.” Je peux aller à n’importe quel endroit, on sait qui je suis. Je n’ai plus vraiment de vie privée. Ce n’est pas dérangeant, mais avant cette médiatisation, je pouvais aller faire mes courses en 15 minutes, et aujourd’hui, j’ai besoin d’une heure. Parce que je réponds aux gens. Si je peux les aider, j’ai gagné. Je ne peux pas être le policier à la télévision qui fait passer un message et envoyer quelqu’un sur les roses dans le privé.”