M.C. Beaton, créatrice d’Agatha Raisin et reine du cosy mystery
Albin Michel publie une nouvelle série signée M.C. Beaton. Mais qui est vraiment la prolifique auteure écossaise disparue en 2019 et qui a remis le cosy mystery à la mode ?
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Publié le 10-05-2023 à 19h00
Cosy mystery ? Ce sont des romans policiers sans violence, mais avec un supplément d’humour très british et un enquêteur ou une enquêtrice amateur dans une communauté où tout le monde se connaît.
L’héritage d’Agatha Christie

C’est Agatha Christie qui a inventé le genre avec sa célèbre héroïne Miss Marple. Et puis il est complètement passé de mode. Jusqu’à ce qu’on découvre, avec sa traduction française, la série Agatha Raisin de M.C. Beaton. M.C. pour Marion Chesney, son vrai nom. Une excentrique et prolifique écrivaine d’origine écossaise décédée en 2019. Elle avait 83 ans.
On a découvert son travail en français grâce à une éditrice qui a eu le nez fin. En 2015, Anne Michel qui dirige le département étranger chez Albin Michel achète les droits pour la traduction de La Quiche fatale, le premier tome de la série Agatha Raisin écrit en 1992. "Je savais qu’une série allait sortir sur Sky en Grande-Bretagne. J’ai pris les deux premiers tomes en me disant que c’était pas pour moi. Et j’ai tellement aimé que j’ai lu un troisième sur ma liseuse, puis une quatrième… Je me suis dit, si ça me rend accro, ça peut plaire à d’autre gens. Je me suis fiée à mon intuition de lectrice." Bingo. En 2016, le premier volume paraît et Albin Michel en écoulera 250 000 exemplaires en tout. L’année suivante, la série britannique avec Ashley Jensen est diffusée sur France 3.
Depuis, Albin Michel a publié d’autres séries comme Hamish Mcbeth, les Chroniques de Bond Street, les Enquêtes de Lady Rose et vient d’en lancer une toute nouvelle le mois dernier, La Saison des débutantes… soit 60 volumes déjà traduits. Et il en reste encore plus à publier: M.C. Beaton a écrit plus de 130 livres.
"Je l’ai rencontrée en 2015, elle avait déjà une longue carrière aux États-Unis et au Royaume uni mais elle avait un vrai amour pour la France. Elle avait un appartement à Paris et un château dans le Cantal. Elle parlait un peu français. Pour elle, c’était merveilleux d’avoir ce succès en français." Elle la décrit comme une vieille dame très drôle, excentrique "mais pas pour amuser la galerie. Marion était profondément originale".

M.C.Beaton a eu mille vies avant d’écrire. Elle est née en 1936 à Glasgow. Elle devient libraire très jeune. Puis critique de théâtre. "Elle y est allée au culot en disant qu’elle avait déjà écrit", sourit Anne Michel. Et puis elle est devenue une critique renommée. Elle a travaillé pour la rubrique faits divers au Daily Mail, à Glasgow, puis à Londres. Avant de démissionner et de voyager avec son mari pour finalement s’installer aux États-Unis. Mais les jeunes parents ont besoin d’argent et Marion se met à écrire des romans. Elle commence par des romances, des histoires d’époque de la Régence, inspirées par Jane Austin. On est en 1979 et ça marche tout de suite. Elle se met ensuite à écrire des romans policiers avec le même succès. "Elle était faite pour être écrivain ! Mais elle est toujours restée très modeste parce qu’elle faisait vraiment ça pour gagner sa vie".
Valeurs actuelles
Mais qu’est-ce qui fait que ce genre qui pourrait paraître gentiment désuet fonctionne si bien ? Il y a ces personnages de femmes hors normes et très libres. Et puis "Il y a un truc de l’enfance pour moi qui ai grandi avec Agatha Christie, poursuit Anne Michel. Des fois, on n’a envie de lire des choses légères, pas toujours des thrillers durs et sombres. En même temps, c’est drôle et intelligent. Ce ne sont pas des romans sans consistance. Pour ses romans sur la Régence ou la période édouardienne, elle travaillait énormément, elle faisait beaucoup de recherches pour que ça soit réaliste."
M.C. Beaton, "La Saison des débutantes. Vol 1: Felicity l’intrépide" et "Vol 2: Fiona la rebelle."
Best seller du département étranger chez Albin Michel
La traduction française a tout de suite marché assure Anne Michel. Le premier a particulièrement explosé les scores. Maintenant chaque volume s’écoule à 45-50 000 exemplaires. "Mais ça reste constant, l’intérêt du public ne faiblit pas. Elle est toujours première des ventes, même au numéro 32", se réjouit l’éditrice. Et vu le nombre de livre différents, M.C. Beaton est une des auteurs traduits qui vend le plus chez Albin Michel en nombre d’exemplaires cumulés, autour des deux millions en tout. Pour se faire une idée, un Stephen King, c’est 120-150 000.
Et ça ne va pas s’arrêter. L’éditeur français a publié tous les Agatha Raisin mais est à peine à la moitié de la série Hamish Mcbeth qu’elle va continuer à faire paraître au rythme de 4 par an.
Et il en paraît encore de nouveaux en anglais. Ils sont signés R.W. Green "c’est un auteur et éditeur avec lequel elle a travaillé pour publier les derniers Agatha Raisin avant sa mort. Ils ont écrit Au galop ensemble, par exemple. Elle lui a transmis toutes les ficelles de son univers". Maintenant, c’est lui qui les écrit seul, déjà quatre de chacune de ces deux séries phare.