Hugo Clément: «On n’est pas une sorte de dieu au dessus du vivant»
Dans son nouveau livre, Hugo Clément remet l’humain à sa place: parmi les autres animaux.
Publié le 30-12-2022 à 19h00
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L’humain a besoin des autres espèces pour survivre et manque parfois d’humilité (et de connaissance) pour s’en souvenir. Hugo Clément propose une piqûre de rappel dans Les lapins ne mangent pas de carottes. Le journaliste qui est le visage de l’émission Sur le Front (France Télévisions) signe son troisième livre, toujours engagé en faveur de la défense de l’environnement. "On est des animaux, rien de plus qu’une espèce au milieu des autres. Et une espèce très jeune: 300 000 ans, les requins c’est 400 millions d’années. On est des primates, on a tendance à l’oublier. On n’est pas une sorte de dieu au-dessus du vivant qui arrivera à trouver des solutions grâce à la technologie, ça c’est une pure vue de l’esprit. On est complètement dépendants de notre environnement, des écosystèmes et des autres espèces et donc c’est fondamental de retrouver ce rapport à la nature, et de comprendre qu’on fait partie de cette nature. On doit avoir notre place dedans et respecter celle des autres: c’est comme ça que fonctionne le vivant. L’écosystème ne peut pas fonctionner avec une seule espèce qui écrase les autres et qui détruit tout".
Il s’emploie ici à démontrer qu’on connaît finalement mal les autres espèces qui nous entourent. Il assume la subjectivité, mais insiste sur la rigueur de son propos extrêmement bien documenté. "Ce qui compte, c’est de maîtriser cette subjectivité là pour qu’elle n’empiète pas sur l’honnêteté et la véracité des faits. Ca n’empêche pas de les analyser et de donner son avis parfois. La frontière à ne pas franchir, c’est modifier la réalité pour la faire correspondre à ce qu’on pense. Ce que je fais, c’est certes du journalisme engagé, donc par nature subjectif, mais honnête et très solide sur le factuel et la véracité de ce qu’on raconte."
Un livre pour un public déjà engagé et convaincu ? Oui. Mais pas que. Un livre, ça se raconte, ça se partage, ça se prête. De quoi toucher un plus large public qui ne le connaît pas encore. C’est pour ça aussi qu’il aime participer à des conférences, des rencontres, des dédicaces.
Lors des rencontres avec le public, Hugo Clément raconte qu’on lui demande souvent "alors, qu’est-ce qu’on peut faire, concrètement ?" Il donne quelques pistes à la fin de son livre, comme le fait de s’engager dans des associations environnementales, "pour faire masse" et leur donner plus de poids. "Il faut passer à l’étape collective de l’action pour que les décideurs économiques et politiques qui ont le pouvoir de prendre vraiment des décisions ambitieuses et maintenant, pas dans dix ans soient poussés à les prendre. Et pour ça, eux ont plus de responsabilités que nous".
Mais il est aussi très lucide: chacun n’a pas la même énergie ni le même poids dans cette lutte. "On ne peut pas demander les mêmes actions environnementales à des gens qui n’ont peut-être pas de quoi payer le loyer ou qui galèrent à acheter à bouffer à leurs enfants, qu’à la partie la plus aisée de la société qui a elle peut-être plus les moyens de se remettre en question plus rapidement. J’essaie de ne pas mettre tout le monde à la même échelle de responsabilité parce que c’est injuste". Ca n’empêche pas que chacun peut agir, en commençant à acheter moins de viande et de poisson, par exemple. "Autant acheter des légumes bios ça coûte cher, autant réduire la part de produits animaux c’est plutôt une façon de réduire le budget. Ou acheter moins souvent de la viande, mais de la viande de qualité." Vous ne lui ferez pas dire que tout le monde doit devenir végétarien ou vegan. Par contre, "C’est surtout important que des millions de gens réduisent de manière importante leur consommation de viande parce que c’est ça qui va avoir un effet de masse, macro économique sur l’industrie. Qui va baisser l’impact sur l’environnement, baisser la souffrance animale, baisser le coût environnemental de l’élevage intensif. C’est ça le cœur du combat".
Hugo Clément, «Les lapins ne mangent pas de carottes», Fayard, 220p.