Cédric Sire: "Écrire, c’est une obsession"
Le 10e livre de Cédric Sire sonde l’âme humaine et le darkweb à la recherche de nos obsessions les plus inavouables…
Publié le 06-12-2021 à 06h00
Estel est une ancienne championne de boxe reconvertie en agent de sécurité. Les poings en avant, la rage qu’elle contient difficilement, elle finit toujours par travailler pour des salauds, malgré elle.
Elle est l'héroïne de La Saignée, thriller horrifique qui plonge tout de suite le lecteur dans l'ambiance. Il est question de darkweb, les méandres secrets d'Internet où, contre des bitcoins, quelques élus peuvent assister en direct à des séances de torture. Mais aussi d'un cyber-enquêteur obsessionnel, d'un patron de boîte de nuit pas net, d'un écrivain harcelé par des féministes, d'étranges disparitions, de manipulation…
Un pur divertissement
"J'ai mis beaucoup de moi dans ce livre. C'est certainement celui dont je suis le plus fier. Il soulève des questions de société. Tous ces personnages ont du mal à trouver leur place dans une société clivante. Avec les réseaux sociaux, c'est pour ou contre, il n'y a pas de place pour la nuance. Estel a du mal dans une société qui ne lui donne comme modèle que des féministes ou des bimbos, elle refuse d'être une caricature, elle ne trouve pas sa place." Il interroge aussi sur ce qui fait de nous une victime ou un bourreau. Ou un voyeur, "comme tous les lecteurs de romans policiers, moi le premier".
À ses détracteurs qui disent que ses livres sont violents, il répond: "J'évite les scènes de violence frontale. Je suis plutôt dans la suggestion, je prends le lecteur par la main et son imagination fait le reste. Et puis malgré les horreurs que je raconte, il y a toujours de l'espoir. Les épreuves rendent les personnages meilleurs, ils se comprennent mieux, ça permet aussi au lecteur de se questionner, de relativiser. Mon seul but est de divertir le lecteur. Ce n'est pas sérieux, mais je le fais sérieusement."
Un jogging inspirant
Estel est née en lui comme une évidence: "J'étais parti courir à l'aube, exactement là où elle court. J'avais l'impression qu'elle était à côté de moi, je l'imaginais avoir fini sa nuit de travail. Je me suis senti proche d'elle. Le personnage s'est étoffé au fur et à mesure des 40 minutes de course et quand je suis rentré, j'avais 80% des grandes lignes. Pas le darkweb, ça, c'est venu après, mais je savais que j'allais passer dix mois, un an de ma vie à écrire cette histoire. Écrire, c'est une obsession, j'attends d'avoir une envie dévorante."
Pour nourrir son obsession, il a passé pas mal de temps à parler avec des policiers spécialistes en cybercriminalité. "Le darkweb, je n'y connaissais rien. J'écris des histoires purement romanesques, mais j'ai besoin que ça soit crédible."
Cédric Sire, «La Saignée», Fayard Noir, 557p.