Yann Moix, entre réalité et fiction: ce qu'on pense de son nouveau roman
Au-delà de la polémique qui a accompagné sa sortie, que dire d’«Orléans», le nouveau roman de l’ancien chroniqueur de Laurent Ruquier?
Publié le 12-09-2019 à 07h29
Sur la couverture, en dessous du titre, figure le mot «roman». Mais dans quelle mesure Orléans en est-il un? On sait qu'en France, un livre, même largement autobiographique, est quasi automatiquement affublé de ce terme. Parce qu'il est supposé faire mieux vendre. Et c'est une façon pour l'auteur de se dédouaner, arguant le fait que «tout n'est pas totalement vrai».
Qu'en est-il du nouveau livre de Yann Moix? Si les faits rapportés sont conformes à ce qu'il a vécu enfant, les Thénardier font figure d'enfants de chœur à côté de ses parents. Dès la maternelle, soit à 5 ans, rentrant seul à pied de l'école (?), pour avoir «fait choir par mégarde» un pot de yaourt, il est traîné par les cheveux et laissé dans la cour à moitié nu par sa mère qui le «hait ». Une autre fois, en sixième (l'âge de la sixième primaire), son père, qui refuse qu'il dessine, après avoir mis sa chambre à sac, le «cingle» à coups de lasso électrique. Et à sa mère, inquiète qu'il puisse le «tuer», il répond: «Et alors? C'est bien ce que tu veux, non?»
Toute la première partie (intitulée Dedans) est de cette eau-là. Ce ne sont que violence, hargne, humiliation (il a la tête plongée dans les toilettes après le passage de son père, ou est abandonné seul dans la forêt la nuit), sans la moindre compassion ni tendresse. On se demande comment l'enfant a pu survivre à tout cela. Mais si c'était une fiction? Un indice est l'absence de son frère cadet, qui conteste ce récit, déclarant que c'est au contraire Yann qui le martyrisait.
Sinon, l'auteur parle de ses découvertes de Gide, Péguy, Sartre ou Céline. Et, dans la deuxième partie du roman (Dehors), il se souvient de sa vie scolaire, de ses apprentissages, de ses camarades de classe ou des filles dont il fut amoureux. Il raconte aussi ses débuts de «graphomane» et ses premières tentatives littéraires, portant sur toutes ces années un regard presque philosophique.
Yann Moix, «Orléans», Grasset, 262 p., 21€