Macha Méril en affinités avec Colette
L'auteur du «Blé en herbe» est célébrée par la comédienne dans un nouveau volume de la collection «Sur les pas de», joliment illustré par Philippe Lorin.
Publié le 30-06-2007 à 06h00
L'une a vu le jour en 1873 dans un village bourguignon, St-Sauveur-en -Puisaye. L'autre, près de sept décennies plus tard au Maroc, de parents émigrés de Russie. L'une est une écrivaine qui s'est risquée sans grand succès sur les scènes de théâtre. L'autre, une comédienne qui a aussi publié une dizaine de romans (Les mots des hommes), chroniques (Patati Patata), souvenirs (Biographie d'un sexe ordinaire, Si je vous disais) ou livres de cuisine (Joyeuses pâtes, Moi, j'en riz!). L'une et l'autre se sont «trouvées» au milieu des années 80 pour un feuilleton où Macha Méril interprétait Colette de 25 à 73 ans.
Comment avez-vous découvert Colette?
J'ai été bercée par les dictées scolaires puisées dans ses livres. Elle était de ces écrivains dont on vantait le beau français et la variété de vocabulaire. Et puis, à côté de cela, il y avait ses livres «interdits», comme La Libertine, que lisaient en cachette les adolescentes. Mais j'ai surtout des réelles affinités avec Colette elle-même, par le fait, déjà, de l'avoir interprétée à l'écran. Et ce livre était pour moi l'occasion de la remercier de tout ce qu'elle m'a apporté.
Comment avez-vous travaillé ce rôle?
Je me suis énormément documentée tout en relisant son oeuvre. Personne ne parle en effet mieux d'elle que Colette elle-même. Elle a inventé l'autofiction, s'inspirant exclusivement de sa vie personnelle. Elle m'émeut encore aujourd'hui quand j'en lis quelques pages.
C'est très prenant, poignant, surtout ses livres de la dernière période, quand elle était immobilisée par la maladie. La vocation de l'écrivain est de nous faire découvrir des mondes nouveaux. Elle écrit sur des détails, de toutes petites choses, des sentiments cachés qui nous parlent et nous touchent, ce qui ne correspondait pas à l'écriture de l'époque.
Vous êtes touchée par les lieux évoqués, pourtant différents de ceux que vous avez connus enfant.
Elle a magnifié, à travers son écriture féminine, tout ce qu'elle a vu et vécu. Le petit village de St-Sauveur, par exemple, n'a rien d'exceptionnel, pas plus que sa maison très quelconque. Elle a créé une ambiance, ses amis aimaient venir chez elle car ce n'était pas comme chez les autres. Elle a embelli sa vie et celle des gens autour d'elle, ce qui est, je crois, le premier talent féminin.
Vous prenez la défense de Willy, son premier mari, qu'on a beaucoup critiqué.
Elle lui doit beaucoup. Toute sa vie, elle n'a parlé que de cette période-là, et notamment de la débauche parisienne. Ce n'est qu'après qu'elle a eu une vie rangée.
C'est une femme libre qui brise des tabous
Elle allait vers où elle pensait trouver du bonheur et du plaisir, sans s'encombrer de moralisme ou de convenances sociales. Mais si sa liberté a été un exemple pour les féministes, elle n'en a pourtant pas été une. Elle ne se préoccupait pas du tout de la condition de la femme. En ce sens, par son individualisme, elle est assez moderne.
Macha Méril, «Sur les pas de Colette», Presses de la Renaissance, 95 pages, 25