Hétérochromie
Ce que ça raconte
Publié le 31-10-2017 à 18h00
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Le portrait d’une jeune femme, seule dans un Paris pas très sympathique. Paula, de retour d’un long voyage, et d’une histoire d’amour qui aura duré dix ans, est confrontée à une sorte d’isolement.Sans logement ni travail, Paula a la frousse, elle est paumée, mais dégourdie. Petit à petit, d’hôtels miteux et squats foireux en coups de chance, de rejets en rencontres, elle prend goût à cette vie solitaire, se libère. Et toujours, à travers ce drôle de chemin, se caractérise par sa franchise et sa singularité.
Ce qu’on en pense
Caméra d'or à Cannes, ouverture du FIFF 2017, Jeune femme est le premier film de Léonor Serraille. Malgré une mise en scène assez classique, le film parvient à exploser grâce aux femmes qui l'ont construit, à commencer par la réalisatrice, Léonor Serraille, et son actrice, Lætitia Dosch. Paula a les yeux vairons: une coloration différente des deux iris que l'on appelle «hétérochromie», mot venu du grec et qui marque l'idée d'une différence de forme, ou de nature. Paula est différente oui, et ses nuances dépassent largement le fait que l'un de ses yeux est marron, et l'autre bleu. Elle est, disons, «excentrique» (trop diront «folle»).
Bien qu’académique dans la forme, il y a dans ce film une liberté bien réelle, tirée du rôle sans barrière de Lætitia Dosh. Paula ne se soucie pas de ce qui est approprié ou non, et se montre très franche avec les personnes qu’elle rencontre. À cet égard, le film montre comment la jeune génération, souvent pauvre, peut être amenée à se débrouiller avec les moyens du bord pour être heureuse, tisser des liens.
Voilà un film qui sert à la fois de l’humour, de l’insolence, de l’outrance et du burlesque. Pas que fuir le conformisme soit la meilleure manière de réaliser un film, mais cela provoque au moins de la joie et une certaine agitation revigorante. Ça fait du bien, parfois, un peu de désordre!
La scène qui touche
Paula n'est pas juste une marginale, elle bouscule les codes, comme en démontre cette très belle scène alors que la jeune femme est en consultation chez le médecin. Quand la doctoresse lui demande si elle a quelqu'un a qui parler, Paula répond: «Oui, tenez vous par exemple, je suis sûre que vous pourriez vous ouvrir un peu si on poussait la discussion plus loin.» Par sa franchise, elle déstabilise son interlocutrice qui, jusque-là, sonnait comme une brochure.
Comédie dramatique de Léonor Serraille. Avec Lætitia Dosch, Grégoire Monsaingeon et Souleymane Seye Ndiaye. Durée: 1 h 37.