Une spectaculaire Young Lady
1865. Dans l’Angleterre rurale et austère, Lady Macbeth se morfond jusqu’à connaître une vive passion. Un film porté par le talent incroyable d’une jeune actrice.
Publié le 11-04-2017 à 15h57
C'est un mariage arrangé, comme souvent au XIXe siècle, une époque pas toujours joyeuse pour les jeunes filles. Katherine est malheureuse avec son mari bien plus âgé qu'elle et d'une ignominie sans nom. Comme frappée de narcolepsie, elle vit sans allant. Elle a besoin d'air! Lors d'une absence prolongée du Lord son époux, Katherine retrouve sa vivacité et tombe passionnément amoureuse d'un palefrenier. «Ne vous ennuyez-vous pas Katherine?» lui demande-t-il. De cette question naît un amour impossible pour lequel la jeune fille d'à peine 18 ans va commettre l'irréparable. Au fur et à mesure du récit, l'innocente devient amorale, monstrueuse même.
L’effet Lolita
Adapté du roman Lady Macbeth du district de Mtsensk de Nikolaï Leskov (lequel s'était inspiré du Lady MacBeth de Shakespeare) , le premier film de William Oldroyd est étonnant par sa modernité: la mise en scène est ciselée, le jeu de l'actrice principale est incroyable, le ton est cynique ou drôlement incongru.
Tourné dans la campagne sauvage des Îles Britanniques, le paysage de Lady MacBeth est en accord avec la solitude de son héroïne. D'apparence paisible, le film raconte en filigrane un bouillonnement intérieur et, d'une violence sourde, déploie progressivement une rage contenue.
Oldroy vient du théâtre et faire découvrir cette œuvre par la psychologie de son personnage est forcément un exercice difficile au cinéma, le résultat cependant est élégant et juste. Ce qu’a voulu rendre le réalisateur est l’expression de l’aliénation. Celle d’une femme restée trop longtemps enfermée, au propre comme au figuré. La libération de son corps, par les promenades et le sexe, va provoquer chez elle une certaine folie que le spectateur observe tout en continuant à ressentir de la sympathie pour elle. C’est l’effet «Lolita» de Nabokov – repris par Stanley Kubrick – qui assure l’empathie du lecteur pour un personnage vicieux.
Tout cela est possible parce que dès le début on compatit au sort de la protagoniste, tellement jeune et mariée sans amour, voire achetée. Son regard nonchalant posé lors du dernier plan vous poursuit longtemps. Mais qui est cette actrice née en 1996 dont nul ne connaissait, ni le visage, ni le nom? «Parfois les gens me prennent pour un homme à cause de ma voix, mais ça ne me dérange pas » écrit-elle sur son profil Instagram. William Oldroy a vu juste: cette comédienne joue à merveille la rébellion à l'époque de la soumission des femmes dans une société rurale où toute passion était proscrite. Son interprétation est spectaculaire.
Romance dramatique de William Oldroyd. Avec Florence Pugh, Cosmo Jarvis et Paul Hilton. Durée: 1 h 29.