Pierre Perret bientôt en tournée en Belgique: «Je n’attendrai pas de tomber sur scène»
Pierre Perret passe à Charleroi et Bruxelles avec sa tournée « Mes adieux provisoires ». À 87 ans, il envisage de lever tout doucement le pied, tout en continuant à écrire.
Publié le 07-05-2022 à 07h00 - Mis à jour le 07-05-2022 à 08h42
L e s jolies colonies de vacances, La cage aux oiseaux, Tonton Cristobal, Lily, Le zizi, La femme grillagéeou encore la récente Les Confinis … Autant de morceaux du répertoire fourni de Pierre Perret que l’on devrait entendre lors de ses prochains concerts le samedi 11 juin à 20h au Palais des Beaux-Arts de Charleroi et le dimanche 12 juin à 16h au Cirque Royal, à Bruxelles.
Pierre, votre tournée s’appelle «Mes adieux provisoires». Pourquoi provisoires?
Et pourquoi pas! (rires) C’est une façon de dire ‘Faites gaffe, je vais bientôt arrêter!’ Je ne suis pas à trois mois ou à six mois près, mais dans cinq ans, je ne serai pas là et dans trois ans non plus probablement pour continuer à faire des tournées. La seule chose que je ferai tant qu’il restera un peu de jus dans mon citron, c’est de commettre encore des chansons. Mais plus de chanter aux quatre coins de France, de Belgique et de Navarre… Je fais donc un dernier ou un avant-dernier tour de piste.
Cela ne va pas vous manquer?
Mais non! Je n’attendrai pas de tomber sur scène. J’aime beaucoup le public, mais avant tout, j’aime écrire. Je suis maso au point d’aimer chercher le mot pendant des mois, voire des années parfois.
Justement, on sort d’une longue période un peu compliquée, où l’on a dû rester chez soi. Vous en avez profité pour écrire?
Exactement. Au niveau des chansons, il y a eu Les Confinis, Bientôt, Mes adieux provisoires qui se retrouvent sur le disque paru l’an dernier. Et puis il y a cinq ou six chansons que je n’ai pas encore enregistrées et trois ou quatre sur le feu et que j’espère finir dans les six mois.
«Les Confinis» totalise 3,6 millions de vues sur YouTube. Vous vous attendiez à pareil succès?
(rires) Je ne m’attendais à rien du tout. J’ai fait ça pour me marrer, parce que je trouvais totalement absurde cette situation surréaliste à laquelle nous avons été confrontés. J’ai regardé ça par un tuyau parallèle de la lorgnette afin de souligner tous les traits de l’infantilisation qu’ils nous ont fait subir, de ces aberrations gouvernementales… J’ai trouvé cela insultant que les gens soient dans le malheur et qu’on leur enfonce la tête encore plus en disant ‘attention, vous allez être punis’ . J’ai écrit ça en me baladant sur les chemins en Seine-et-Marne.
Elle fait partie du nouveau spectacle?
Oui, oui. Je n’étais pas sûr de la chanter mais quand j’ai vu qu’il y avait beaucoup de gens que cela amusait… Ils rient comme des enfants et ils me disent que je leur ai fait du bien en disant ce qu’ils pensent.
Comment s’opère le choix des titres que l’on va interpréter sur scène dans un répertoire de 500 chansons?
Je vous remercie de me poser une question à laquelle on ne peut pas répondre! (rires) Ma femme m’a aidé car choisir parmi ses enfants, c’est très difficile.
Il y a des incontournables, de toute façon…
C’est vrai que si je ne chante pas Lily ou Le zizi… Mais à côté de ça, il y en a des tas d’autres. Certaines je les fais sous forme d’évocation, sans aller jusqu’au bout, comme Tonton Cristobal, Le tord-boyaux… Et puis dans un autre registre, il y a La femme grillagée, La femme battue… que les gens sont aussi ravis d’entendre et de chanter avec moi. Les gens qui m’aiment connaissent tout. Mais certains découvrent encore l’une ou l’autre.
Vous ne vous lassez jamais de chanter toutes ces chansons depuis plus de 60ans?
Mais c’est mon métier! (rires) Pour moi, le spectacle est dans la salle. De la scène, je vois le public vivre une émotion terrible ou qui éclate de rire et c’est tellement réjouissant ou rassurant de voir que la fraîcheur de la spontanéité est toujours là… Je ne m’en lasse pas.
Pour le clip des «Confinis», vous avez travaillé avec Les ogres de Barback. Ce sont un peu vos enfants spirituels…
Oui! Je les aime beaucoup. Leur répertoire est frais et bien ficelé. Ce sont de très bons musiciens, des passionnés.
Dans la nouvelle génération, vous en avez d’autres des enfants spirituels? Vous écoutez qui aujourd’hui?
Je n’écoute plus grand-chose… Je trouve que l’écriture est absente. Aujourd’hui, il y a très peu de chansons faites comme une chanson, écrite avec des mots choisis, avec du contenu, de la viande, quelque chose que vous retenez. Dans le rap, il n’y a pas de musique et la plupart du contenu c’est «j’encule la police». Moi je veux bien, mais ça ne va pas très loin. Mais il y a en qui essayent de tirer leur épingle du jeu, comme Zaz, Olivia Ruiz, Cali, Mouss et Hakim, Alexis HK… Il y en a, mais pas de quoi me faire passer 800 km dans la voiture en me régalant.
Quand on réécoute certains de vos titres aujourd’hui, on se dit que vous ne seriez sans doute plus aussi libre dans le propos et les mots…
Je suis entièrement d’accord. On ne peut plus mettre un mot plus haut que l’autre… C’est très compliqué d’écrire. À cela s’ajoute selon moi un appauvrissement du vocabulaire. Moi je m’en fous, je continue d’écrire ce que j’ai envie. Si on le veut, on le prend, si on ne le veut pas on le laisse…
Je suppose que l’actualité vous bouleverse toujours autant. Quand on réécoute «La petite kurde», que vous avez écrite en 1992, on ne peut s’empêcher de penser à l’Ukraine maintenant…
Oui, il faut juste changer le nom. Ce sont les atrocités qui se passent en Ukraine tous les jours et qui touchent particulièrement les enfants. Malheureusement c’est un éternel recommencement. On est toujours épaté, on se dit toujours ‘C’est pas possible’, cela ne peut pas se reproduire au 21e siècle. Moi ce que j’ai connu de pire dans ma vie, c’était l’Occupation, la guerre… Et je me suis toujours dit, maintenant c’est fini. Et non, maheureusement… On entend un crétin à la radio qui dit qu’en 200 secondes, il peut anéantir Paris, Londres ou New York…
Idem si on réécoute «La bête est revenue», écrite en 1998…
Elle fait aussi partie des chansons qui ont pavé tout mon parcours et que l’on peut écrire aujourd’hui, hier ou demain. Malheureusement, on n’en écrit pas assez. Je n’ai pas assez de concurrence pour piétiner mes plates-bandes. Et pourtant, j’aimerais bien.
Cela vous décourage?
Ah non, au contraire! Cela m’incite à me battre et à protester encore plus. Tant que je suis vivant, je ne baisserai jamais les bras.
Pierre Perret en concert le 11/06 au Palais des Beaux-Arts de Charleroi et le 12/06 au Cirque royal de Bruxelles. Tickets: www.ticketmaster.be