ÉlyZée [CRITIQUE] - Après Marine, place au cas Zemmour
Après Marine Le Pen en 2017, François Durpaire et Farid Boudjellal projettent, cette fois, l’arrivée d’Éric Zemmour à l’Élysée.
Publié le 31-03-2022 à 11h37 - Mis à jour le 31-03-2022 à 11h41
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L’ histoire va tellement vite et plus loin que ce qu’on avait imaginé qu’en allant vers la science-fiction, on est finalement plus proche de la réalité", nous confiait, fin 2016, François Durpaire, au moment de la sortie du 2evolet deLa Présidente, une trilogie scénarisée par l’historien et qui projetait l’arrivée au pouvoir de Marine Le Pen à la faveur des élections du printemps 2017.
On sait que le basculement à l’extrême droite n’a finalement pas eu lieu, au profit d’Emmanuel Macron. Et si l’avènement de la fille de Jean-Marie reste plausible, le fait qu’il se produise cette année, mais avec une autre "tête d’affiche", l’est tout autant depuis qu’Éric Zemmour s’est lui aussi lancé dans la course à l’Élysée.
Il est l’homme politique le plus clivant depuis Jean-Marie Le Pen
L’occasion, pour l’ami Durpaire de s’offrir une nouvelle dystopie, cette fois consacrée à l’ex-trublion du PAF. " Il est l’homme politique le plus clivant depuis Jean-Marie Le Pen, explique-t-il dans l’avant-propos d’ Élyzée, un titre en forme de mot-valise avec, en son cœur, un "Z" qui veut dire Zemmour.Les gens peuvent en venir aux mains à la seule évocation de son nom […]. C’est, comme l’avait fait Donald Trump, aux États-Unis, celui qui a réintroduit de l’émotion dans une vie politique atone. Ce contexte passionné laisse peu d’espace entre l’hagiographie et la stigmatisation. Nous avons pourtant tenté de nous frayer ce chemin, en étant ni complaisants ni caricaturaux. Nous nous sommes attachés à interroger les idées au-delà de l’homme."
La revanche de Mourad Boudjellal?
L’entreprise est séduisante, surtout à quelques encablures du scrutin d’avril. D’autant qu’elle marque le retour à la BD de Mourad Boudjellal: le fondateur des éditions Soleil l’avait quittée pour s’en aller présider le club de rugby du RC Toulon. Une nouvelle marotte qui lui avait permis de mettre un pied dans la machine médiatique. Et de nouvelles prérogatives qui l’avaient notamment vu affronter, sur les plateaux télé, un certain Éric Zemmour. À l’automne 2021, ce dernier lui avait par exemple reproché, sur le plateau desGrandes Gueulesde RMC, de… s‘appeler Mourad, un nom pas assez "français" à ses yeux.
Rien d’étonnant, dès lors, à ce que ce premier album publié par Mourad Éditions – rebaptisé, pour la blague, "Maurice Éditions" sur la couverture – lui soit consacré. Ni à ce que ce soit son frère dessinateur, Farid, qui se soit chargé du dessin, comme il l’avait déjà fait pour les trois tomes deLa présidente.
Moins convaincant
Reste que cet album, moins épais que ses devanciers, s’avère aussi moins convaincant: contrairement à ce que prétend François Durpaire, il s’intéresse moins aux idées du candidat Zemmour qu’à sa personne, le confrontant même, dans un symbole un peu tarte à la crème, à une "cousine" portant le même patronyme et venue en France dans l’illégalité. Un parcours qu’il compare volontiers à celui des parents de Zemmour lui-même.
L’exercice n’en reste pas moins intéressant, mais peut-être aussi intéressé quand on sait son important tirage. Et, bien sûr, la proximité avec les échéances électorales d’avril. On saura, alors, si, cette fois, l’ami Durpaire a vu juste.
Mourad Éditions, Durpaire/Boudjellal, 104 p., 18.50 €.