Pour le procureur, l’affaire de prédateurs

Décédé en 2012, le procureur du roi de Nivelles, Jean Deprêtre, a toujours attribué les tueries du Brabant à des «prédateurs ».

Philippe Leruth
Pour le procureur, l’affaire de prédateurs
DEPRETRE ©BELGA

Jusqu'au bout, Jean Deprêtre aura été obsédé par les tueries du Brabant wallon. Décédé le 12 juin 2012, à l'âge de 76 ans, le procureur du roi de Nivelles avait supervisé l'enquête sur les tueries du Brabant wallon de 1983 à 1987. Il avait été ensuite déchargé du dossier, transmis à la Justice de Charleroi. Un dessaisissement qu'il n'avait jamais accepté: «si nous avions pu continuer à travailler, nous aurions sans doute trouvé les auteurs », déclarait-il, quatre mois avant sa mort, à nos confrères du «Soir Magazine », alors qu'il était à la retraite depuis une bonne dizaine d'années.

Aucun mobile politique!

Peu de temps auparavant, il avait adressé une lettre au procureur du roi de Charleroi, Christian De Valkeneer, aujourd'hui procureur général à Liège. Il y détaillait les agissements d'une bande de malfrats originaires de Braine-l'Alleud, et y citait même le nom de cinq personnes suspectes à ses yeux. «Pour moi, les tueurs n'ont aucun mobile politique, ce sont des prédateurs. C'est ma conviction depuis 30 ans! », insistait-il. «Je vais plus loin: les auteurs sont sans doute des gens de Braine-l'Alleud. Prenez une carte de Belgique et pointez tous les lieux des faits et les déplacements des auteurs: tout converge vers Braine-l'Alleud. Je suis aussi persuadé que le chauffeur de la bande, pilote très rapide, connaissait parfaitement la région et ses petites routes. Car à l'époque, il n'y avait pas de GPS! ».

Dès le départ, sa conviction avait été faite, et cela lui sera beaucoup reproché: les tueurs du Brabant étaient «des prédateurs ». Beaucoup en ont douté, au vu de la maigreur du butin emporté (quelque 6 millions de FB de l'époque; 150 000 euros) au regard du nombre de victimes des criminels; Jean Deprêtre, jamais!

«La plupart des attaques ont été commises en fin de semaine, dans des grandes surfaces vers 19-20 heures, au moment où il y a le plus d'argent dans les caisses! », poursuivait-il dans sa dernière interview. «Ils volent aussi de l'alcool, sans doute pour faire la fête ensuite. Vous croyez que des terroristes ou je ne sais qui d'autre agiraient de la sorte? »

D’autres voyaient dans ces pratiques une manière pour les auteurs de brouiller les pistes.

«Peu de gens le savent mais un membre de ma famille a été tué lors de l'attaque du Delhaize de Braine-l'Alleud en 1985. Je pense souvent à toutes ces familles qui attendent une réponse. Et j'enrage en voyant que l'on enquête sur de mauvaises pistes. Il n'est pas trop tard pour découvrir la vérité. Je veux savoir », concluait-il. L'heure de vérité a peut-être enfin sonné…

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